d / L'alternance : un ticket gagnant pour
l'entreprise
« On aimerait bien trouver un jeune sérieux,
qui travaille et a qui on pourrait apprendre le métier. »
confiait récemment un garagiste, qui venait de se séparer d'un
apprenti un peu trop paresseux à son goût. Sur la question de
l'alternance les employeurs sont quasi tous unanimes : «On a tous
à y gagner mais... »
Examinons d'abord les aspects positifs pour l'employeur.
L'alternance n'est pas un fait nouveau dans l'organisation du travail. Dans les
années 60 les jeunes contribuaient déjà à la
production industrielle en plus de leurs études, moyenant quelques
rétributions. Une pratique plutôt répandue d'ailleurs dans
le monde agricole. Aujourd'hui le cadre de l'alternance s'est renforcé
et présente des avantages pour les employeurs, financiers notamment.
Qu'il soit engagé en contrat d'apprentissage, ou en contrat
professionnel, le jeune fait économiser des charges sociales à
son patron. Selon l'âge la rémunération impacte plus ou
moins le budget de la masse salariale, mais les primes et autres aides
régionales et d'Etat viennent compenser le léger manque à
gagner.
« Au sein de l'entre- prise classique,
le jeune peut symbo- liser une ouverture et de nouveaux
en- jeux commerciaux, économiques».
Pour le chef d'entreprise faire le choix de l'alternance c'est
aussi un moyen de dynamiser ses ressources humaines. La nomination d'un tuteur
ou d'un maître d'apprentissage (dans le cas de l'artisanat il s'agit
souvent de l'artisan lui même), développe une dynamique
d'échange et de remise en question positive de l'expérience. Dans
une société idéale on parlerait volontiers de transmission
intergénérationnelle. Au sein de l'entreprise classique, le jeune
peut symboliser une ouverture et de nouveaux enjeux commerciaux,
économiques.
LES REVERS DE L'ALTERNANCE
« Il ne s'agit pas seule- ment de
transmettre un savoir et une pratique en vue de l'amener
au diplôme : l'entreprise s'engage également dans une
démarche éducative».
Les représentations des chefs d'entreprise vis à
vis des jeunes freinent souvent la motivation des premiers à faire le
choix de l'alternance : « il n'était pas à l'heure, il
rechignait à faire ce qu'on lui disait, il n'avait pas l'air
motivé ». Un discours récurrent chez les employeurs,
mais qui soulève d'autres inquiétudes. Prendre un jeune en
formation en entreprise n'est pas neutre. Il ne s'agit pas seulement de
transmettre un savoir et une pratique en vue de l'amener au diplôme :
l'entreprise s'engage également dans une démarche
éducative. Certains employeurs en ont pris conscience : «
lorsqu'on prend un jeune chez nous, on l'accueille et c'est notre devoir de
lui donner une vision concrète de son futur métier. Notre
objectif ce n'est pas de le dégouter », explique Didier
Meggiolaro, PDG de Sib Bordas (Rhône), une entreprise du bâtiment
spécialisée dans le revêtement de sols industriels. Le
jeune arrive dans l'entreprise avec son bagage de problématiques
résolues ou non, et en même temps avec des représentations
du métier, un comportement pas forcément adapté, une
motivation parfois fragilisée.... L'employeur va devoir trouver
la clé pour intéresser, motiver et former dans les meilleures
conditions ».
Ainsi, accepter un jeune en formation n'équivaut pas
simplement à une exonération de charges, mais bel et bien
à un investissement en énergie et en temps.Et souvent on oppose
ce choix à celui de « prendre un stagiaire » à moindre
risques. Les questions liées au statut, à la
rémunération, au double rythme scolaire/salarié, ou encore
la, notion d'engagement sur un long terme.... Ces questionnements sont bien
réels chez les employeurs et font encore hésiter un bon nombre
d'entre eux.
L'autre point d'achoppement concerne la lisibilité de
l'information donnée aux entreprises. Alors que les campagnes de
communication nationales abordent l'alternance comme l'antidote pour le
chômage des jeunes, l'opacité et la complexité des
dispositifs d'alternance est souvent remise en cause par les employeurs. Les
organismes de formation prennent spontanément en charge les
démarches administrative pour l'entreprise, pour pallier aux defections
de certains employeurs découragés.
Une enquête récente menée par l'AJE
(Assciation Jeunesse et Entreprises) sur la perception de l'alternance, met
à jour un point essentiel : ce sont les grandes entreprises qui
adhèrent le plus à l'alternance, parce que mieux informées
sur les modalités. Les PME et TPE n'étant pas concernées
par l'obligation de quotas (imposés dans la loi de 2005) sont moins
impactées par les mesures gouvernementales. Seulement 28% des petites
entreprises déclarent ne pas connaître ces dispositifs.
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