1.4.1.2 Dans les pays en voie de
développement
Ces pays caractérisés par une urbanisation
récente, ont commencé à voir se développer les
quartiers informels au cours des années 50 et 60. Deux facteurs
expliquent le phénomène : d'une part, la paupérisation
des campagnes suite aux programmes étatiques axés plus sur un
désir d'industrialisation. Cette priorité accordée
aux villes au détriment des campagnes a provoqué une migration
importante des ruraux pauvres vers les villes. Une fois arrivées en
ville, ces petites gens construisent des baraques près des foyers
d'emploi et ainsi se développe l'habitat spontané et insalubre
où habite une main d'oeuvre bon marché. D'autre part, la famine
et le désoeuvrement dans les campagnes constituent l'autre raison.
Le phénomène concerne quasiment l'ensemble des
pays du tiers-monde à l'exception de la Chine, du Sri Lanka et de la
Birmanie qui ont su éviter la bidonvilisation de
leurs agglomérations car ils ont conservé une politique ne
dévaluant pas le travail des
agriculteurs3. En épargnant leurs
ruraux de la faim, ils ont su les garder dans leurs campagnes, évitant
ainsi les fortes migrations vers les villes avec leur cortège de
squats.
1.4.1.2.1 En Asie
Comme dans d'autres villes du tiers-monde, certains
bidonvilles asiatiques s'étendent plus rapidement que la ville
légale. A Bombay par exemple, la croissance du bidonville est deux fois
plus rapide que celle du reste de la ville de 1950 à 2002 avec une
croissance annuelle de 8% contre 4%4. Ce bidonville compte un peu
plus d'un million d'habitants en 2002. Ce n'est plus un regroupement de
baraques mais des structures qui recouvrent plusieurs centaines d'hectares.
1.4.1.2.2 En Amérique du Sud
Qu'il s'agisse du Pérou, de la Bolivie ou des autres
pays, l'occupation irrégulière de l'espace urbain est une
réalité. Au Pérou, s'observent le plus souvent des
invasions d'espace qui font naître des véritables quartiers
spontanés appelés les barridas. Ces invasions
étaient encadrées au début des années 50 par des
étudiants et ingénieurs qui planifient l'opération. Selon
BARNET (2003) une zone particulière était choisie à
l'avance parmi les terrains publics puis l'invasion se produisait. La nuit bien
sûr puisque le jour les forces de l'ordre s'y seraient opposées.
Pour éviter des affrontements entre forces de l'ordre et squatters,
les autorités mises devant le fait accompli ne feront que constater
l'opération.
En Colombie, face à l'insuffisance des logements
sociaux produits par l'Etat, les habitants de Bogota se sont lancés dans
l'autoconstruction. A titre d'exemple, l'occupation illégale qui ne
concernait que 20% de la superficie de la ville dans les années 60,
atteint 50% au début des années 90. Contrairement à de
nombreuses grandes villes d'Amérique Latine, l'invasion
c'est-à-dire l'occupation de terrains non mis en valeur sans le
consentement du propriétaire, pour y établir un quartier, demeure
minoritaire dans le processus d'occupation illégale de terrains à
Bogota (en 1992, à Bogota, 14% seulement des quartiers
sous-équipés résultaient d'une invasion, alors que cette
proportion était de plus de 40% à Cali et dans d'autres villes de
Colombie). Dans cette ville l'occupation irrégulière se fait
à travers les lotissements pirates effectués soit par des
propriétaires terriens ou tout simplement par des individus qui en
3 BARNET Y. (2003)
4 idem
agissant ainsi apportent des solutions à la crise de
logement en permettant au grand nombre d'y accéder. C'est ainsi que
selon DUREAU F. et HOYOS M.C (1995), deux quartiers ont été
créés par un lotisseur pirate bien connu, qui n'était en
aucune façon propriétaire du terrain ; il a donc commencé
par occuper les terres en organisant une invasion collective, avant de les
diviser et vendre des lots de ces terrains acquis illégalement). En
dehors de ces individus, des associations communautaires ou politiques
participent à l'encadrement des squatters en leur enseignant la vie
communautaire et les stratégies pour faire pression sur les
autorités en vue d'obtenir une régularisation.
1.4.1.2.3 En Afrique du Nord
Le terme bidonville qui de manière grossière
désigne l'habitat irrégulier aurait été
utilisé au Maroc au cours des années 30 pour qualifier l'habitat
précaire fait de bidons d'huile d'olive dépliés.
L'occupation illégale de l'espace se fait de façon pacifique.
Contrairement au Pérou et à la Colombie, ce sont surtout les
habitants des quartiers centraux saturés qui se retrouvent dans les
bidonvilles de la périphérie. En Algérie, malgré
l'option socialiste du régime qui a fait que l'Etat a construit des
tours d'habitat collectif pour loger les citadins, les recensements de la
population et de l'habitat de 1966 et 1977 ont montré un décalage
entre l'offre de logements et la population urbaine. Les structures officielles
font montre d'une ségrégation dans l'attribution des logements
à des différences près : la commune procède
à une politique plus « sociale » de l'habitat, alors que la
Wilaya (le Gouvernorat) retient une quantité importante de logements
pour ses cadres et son personnel HAERINGER PH. et DAVID J.C. (1986). C'est
ainsi que s'est développé à côté de cet
urbanisme officiel mafieux, un urbanisme sauvage, illicite dont l'origine
remonte dans certains cas à la guerre d'indépendance.
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