6.3.2 L'habitat informel de moyen standing
L'habitat informel de moyen standing regroupe la catégorie
dite habitat urbain c'est-à-dire les maisons construites en
matériaux définitifs, et qui se repartissent en trois groupes
:
- les maisons en banco : le banco est une sorte de
pisé fait de glaise mélangé à de la paille et
formant de briques séchées au soleil. Les constructions en
banco sont prédominantes dans les villages urbains. Elles constituent le
modèle évolué d'habitat exigé par l'administration
coloniale après l'incendie qui ravagea les paillotes de Niamey en
1935.
- Les maisons en semi dur : Ce sont les constructions faites
de banco sur lequel est fixé du ciment sur un grillage
lui-même solidarisé au banco par des pointes
métalliques. Contrairement au banco où la toiture est faite
généralement de terrasse constituée de poutres de
rônier ou d'Eucalyptus recouvertes de branchages et de seccos ou parfois
de tôles de récupération ou de tonneaux
dépliés sur lequel on coule du banco, la toiture des semis durs
est généralement faite de tôles ondulées. C'est une
imitation du dur mais qui est moins résistante. - Les maisons en dur :
c'est l'habitat des classes aisées, symbole de réussite
économique et sociale. Nous l'avons classé dans le moyen standing
pour le simple fait que malgré la nature de la construction, dans les
zones informelles, il n'y a en général pas les commodités
accompagnant ce type d'habitat : eau courante, électricité, ou
dans le meilleur des cas la présence de l'une ou de l'autre.
De prime abord, on peut dire que les occupants de cet habitat
de moyen standing sont les squatters à revenus moyens. Certes pour
bâtir une maison en banco de deux pièces
communément appelée
célibatorium28, il faut au moins 200 000 F CFA
(environ 305 €), mais cette réalité en cache une autre :
c'est le statut de l'espace qui détermine beaucoup à Niamey la
nature de l'habitat informel. Beaucoup de gens qui occupent les paillotes ont
le moyen de construire en banco mais ils ne le peuvent pas parce qu'ils savent
le risque qu'ils courent d'engager des frais importants pour
bâtir une demeure qui sera détruite tôt ou tard. Par contre,
ceux qui construisent en matériaux définitifs le font pour deux
raisons principales. D'abord, les terrains sur lesquels ils construisent leur
ont été vendus et ils disposent d'une attestation de vente
signée par le propriétaire coutumier et le chef de quartier.
Disposant donc
Figure n°8 : un exemple de construction en banco, le
quartier Pays-Bas.
Source : ISSAKA H (2007), cliché ABDOU I.
de cette légitimité, ils estiment qu'ils courent
moins de risques en construisant en matériaux définitifs car ils
espèrent être confirmés dans leur droit après une
opération de restructuration. Ensuite, lors de l'achat il leur est
exigé de construire en matériaux définitifs pour mieux
renforcer la capacité des habitants à lutter contre toute
tentative de déguerpissement pour taudification que les autorités
avancent comme prétexte pour déguerpir l'habitat informel. Mais
au vu des résultats de notre enquête, il faut aussi dire que la
présence de 34% de
28 Il s'agit en fait d'une maison composée
d'une pièce et d'une véranda.
squatters sans revenu s'explique par le fait que certains
commerçants, leaders politiques ou religieux construisent des maisons
dans ces zones et les font occuper par des parents ou des disciples ou encore
des militants. Par contre, 32% des chefs de ménage de l'habitat de moyen
standing ont des revenus qui leur permettent de faire un tel investissement
comme le prouve la figure ci-dessous.
Figure n°9 : Revenu des squatters habitant les lotissements
coutumiers à Niamey
Revenu en F.CFA
Effectifs en (%) ('
34 34
23
5 4
30
25
20
15
10
5
0
40
35
Aucun revenu Moins de 50 000
50 000 - 100 000
100 000-150 000 Plus de 150 000
Source : ISSAKA H. enquête (2004)
Cette figure montre que 9% des squatters habitant l'habitat de
moyen standing font partie de la classe moyenne car pour
bénéficier d'un revenu mensuel de 100 000 F CFA, il faut
être un cadre dans l'administration. 32% des chefs de ménage ont
donc au moins un revenu mensuel de 50 000 F CFA et sont loin des
critères de pauvreté établis par l'enquête nationale
sur le budget et la consommation. Dans cet habitat de moyen standing, se
retrouve une population cosmopolite constituée aussi bien de
lettrés 66,7% (dont 2% ont des diplômes universitaires) que
d'analphabètes (33,3%). Contrairement à ceux qui habitent les
paillotes, les squatters vivant dans l'habitat de moyen standing ont moins de
personnes à charge. Par exemple, la proportion des chefs de
ménage ayant au moins 10 personnes à charge varie de 44,8%
à 47%. A un niveau plus élevé, l'écart
d'élargit. En effet, 31,3% des chefs de ménages habitant les
paillotes ont plus de 15 personnes à nourrir contre 20,1% de ceux qui
habitent les maisons en matériaux durables. La paillote est le reflet de
la vie villageoise où le communautarisme est plus
développé.
Les squatters constituent une population contrastée
appartenant à des catégories sociales diverses. On y trouve aussi
bien des pauvres que des gens à revenu moyen. Parmi eux ce sont les
artisans qui sont les plus nombreux 34% (ISSAKA H. 2004). Ils sont
secondés par les revendeurs (19%) et les cultivateurs 10%. Si toutes ces
catégories ont des revenus aléatoires, il faut souligner la
présence de salariés parmi lesquels des fonctionnaires (environ
3%), des chauffeurs (4%), des forces de défense et de
sécurité (2%) mais aussi des gardiens (9%). Par contre, les
éleveurs qui sont à l'origine de la création du premier
squat autorisé depuis la période coloniale représentent
une infime proportion (1%). Comme on peut le constater même s'ils ne sont
pas tous de la classe moyenne, certains squatters ont les moyens de vivre dans
les zones d'habitat traditionnel si les conditions d'accès à la
parcelle officielle étaient équitables.
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