Section 2 - Une analyse de la situation juridique de
l'environnement au
regard des principes du droit de l'environnement
En Haïti le décret-loi portant sur la gestion et
la protection de l'environnement adopté en conseil des Ministres le 12
octobre 2005 fixe les responsabilités des citoyens, des
collectivités territoriales, des entreprises et des institutions
gouvernementales dont le ministère de l'Environnement. Il a permis
d'introduire dans la législation du pays les principes consacrés
dans les accords internationaux. Nous tenons à considérer
l'état de la législation nationale de l'environnement
confronté aux principes du droit de l'environnement pour relever
l'évidence des failles qui y subsistent. Des principes fondamentaux du
droit international de l'environnement tel que ; la prévention, le droit
à l'information, le principe de Participation et le principe
pollueur-payeur.
2.1- La législation environnementale au regard du
principe de prévention et d'information
1- La Prévention
Le droit de l'environnement a pour fin d'assurer la protection de
l'environnement, non d'en organiser sa destruction, son but est
d'éviter, d'empêcher et de prévenir sa
dégradation.
Le principe de prévention apparaît
d'emblée comme le principe phare du droit de l'environnement. Son
principe corollaire est la précaution. Tout semble être bâti
autour de cette idée de prévention des dommages
écologiques. Il occupe une place essentielle parmi les différents
principes du droit de l'environnement car il est à l'épicentre de
cette politique. Tout le
58 André VICTOR, Analyse du cadre légal et
institutionnel relatif à la gestion durable des terres, PNUD-Haïti,
2010, P. 15
droit administratif de l'environnement pourrait s'expliquer par
l'objectif de réduire les nuisances et pollutions.
C'est également sous l'égide du principe de
prévention que s'inscrivent les procédures d'évaluation
des incidences environnementales d'un projet. ces régimes ont une
fonction préventive en ce qu'ils visent à amener le promoteur
d'un projet, à atténuer lui-même des impacts
environnementaux d'un projet, quitte à ce que les pouvoir publics
suppléent aux carences du promoteur en interdisant la réalisation
d'un projet ou en l'assujettissant à différentes normes et
contraintes59.
La politique de protection de l'environnement trouve sa
justification par le dicton: mieux vaut prévenir que guérir. En
matière d'environnement, il est en effet préférable tant
du point de vue écologique qu'économique de prévenir
l'apparition des pollutions et des nuisances que de devoir remédier
ultérieurement aux maux qu'elles auront provoqués.
L'intégration législative du principe de prévention et la
protection de l'environnement dans toutes les décisions et
stratégies publiques et privées sont une exigence fondamentale
pour garantir le développement durable.
La mise en oeuvre du principe de prévention se traduit
essentiellement par les études d'impact environnemental60.
En Haïti, la législation environnementale reconnait
ce principe, bien que son application fasse défaut. Certaines
contraintes font obstacles à sa réalisation.
A- Insuffisances et contraintes entravant l'étude
d'impact et l'obligation de prendre en compte l'environnement
59 Piette. J, l'émergence d'un droit nouveau, le droit de
l'environnement, exposé de M. Piette, Mars 2002, Canada
60 Michel PRIEUR, les principes généraux du droit
de l'environnement, cours tronc commun, DICE, actualisation 2004-2005,
université de Limoges
L'étude d'impact peut être perçue comme
une procédure administrative que l'on peut qualifier de
révolutionnaire car elle va pénétrer dans l'ensemble du
dispositif de droit administratif et contraindre les autorités publiques
et les acteurs privés à changer de mentalité et
d'attitude. Cette alliance du bon sens et de la révolution
qui caractérise la procédure d'étude d'impact exprime bien
la philosophie du combat pour l'environnement.
De manière générale, dans les pays en
développement, malgré l'existence d'un important corpus,
l'application de l'EIE en tant qu'instrument de gestion environnementale
préventive est limitée par certaines insuffisances et contraintes
aussi bien du cadre juridique et institutionnel, de par la très faible
expérience concernant la pratique de la gestion environnementale en
générale et de l'EIE en particulier; que de la
disponibilité de ressources humanises en quantité et en
qualité dans le domaine des EIE. Bien entendu Haïti n'y
échappe pas.
Les contraintes majeures concernent l'inapplicabilité
de certaines lois votées qui ne sont pas souvent codifiées et
réadaptées au contexte actuel. A cet effet, on note un vide
juridique à cause de l'inexistence d'un Code de l'environnement qui pour
être opérationnel doit être accompagné de
Décret et d'Arrêtés d'application qui réglementent
et définissent le champ d'application des évaluations
environnementales et sociales et qui classe et catégorise clairement les
projets, selon l'impact potentiel, la nature, l'ampleur et la localisation du
projet.
L'autre contrainte est liée au fait que le
Ministère chargé de l'Environnement a pour mission
l'élaboration et l'application de la politique environnementale dont la
gestion implique plusieurs autres acteurs, notamment les autres
Ministères techniques, les collectivités territoriales. Parfois
des problèmes de coordinations, de prérogatives et de
lisibilité de domaines de compétence se posent dans de tel
cas.
Il existe plusieurs spécialistes au sein des services
de l'Etat (ingénieur des eaux et forets, chimistes, agronome,
biologiste, juriste, économiste, sociologue etc.), alors que
l'environnement se doit d'être abordé selon une approche
intégrée et multidimensionnelle, qui nécessite une
formation pluridisciplinaire qu'offre la plupart des modules de formation en
développement durable et en gestion de l'environnement. Il n'est pas
évident que tous les spécialistes actuels ont eu
l'opportunité de participer à ces formations.
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