II- Description de la méthode et du panel
1- Cadre méthodologique
Une méthode qualitative
La méthode choisie pour cette étude est
principalement d'ordre qualitative. En effet, elle s'appuie sur des entretiens
semi-directifs menés auprès de professionnels de l'école
et des lieux de loisir. Ces entretiens visaient à aborder quatre
thèmes principaux avec les personnes interrogées6. Il
s'agissait, dans un premier temps, de comprendre l'histoire professionnelle et
le parcours de formation initiale des interviewé.e.s ; puis
d'accéder à leur expérience des rapports de genre chez les
jeunes qu'ils.elles côtoient au quotidien ; de tenter avec eux.elles une
évaluation des différentes formations auxquelles ils.elles ont pu
participer ; et enfin de recueillir leurs représentations de genre dans
une perspective plus large.
Il faut bien sûr noter que la méthode des
entretiens présente un certain nombre de biais, notamment du fait que
l'on interroge directement la personne sur ses propres agissements et choix. En
effet, l'échange lors de l'entretien formel est basé sur les
souvenirs et l'analyse de son propre vécu. Or, on sait que la
mémoire présente un risque de reconstruction a
posteriori. Ainsi, il faut prendre en compte les logiques et les processus
dans lesquels les acteurs peuvent être pris. De même, on peut se
demander dans quelle mesure le chercheur doit faire confiance au discours
produit par l'acteur. La connaissance de ces biais, loin d'empêcher
l'analyse, doit rester présente tout au long de cette dernière
afin de les éviter au maximum.
De la même manière, les caractéristiques
du chercheur qui prend place face à la personne enquêtée
peuvent entraîner des biais quand au discours que ce dernier produit.
Particulièrement lorsqu'on aborde le sujet du genre, le fait que la
chercheure ait été une femme a pu induire des formes de discours
de la part des personnes interrogées, une forme de connivence avec les
femmes parfois, une position défensive de la part des hommes, quelques
fois. Comprendre ces mécanismes lors de l'entretien pour les
éviter, puis après, dans le but de les analyser, est alors
nécessaire.
6 Voir le guide en annexe 2.
Cette étude s'est également appuyée sur
une méthode de sociologie visuelle, associée aux entretiens. En
effet, afin d'accéder aux représentations des personnes
interrogées, il leur a été présenté des
photographies permettant d'aborder certains sujets d'une manière plus
fluide. Ces supports photographiques sont reproduits en annexe 3.
D'autres outils sociologiques ont également
été utilisés pour cette étude, que l'on pourrait
regrouper dans une méthodologie d'observation. En effet, la
participation à la formation « Cet autre que moi »7
a permis d'observer les professionnel.le.s de l'école et des loisirs
organisés en périphérie de l'école lors de temps de
réflexion. Venant de différentes structures, ayant des postes
très divers, mais appartenant au même quartier, ces
professionnel.le.s y ont échangé leurs opinions, leurs cultures
professionnelles, leurs avis et différends. De plus, bien que les jeunes
n'aient pas été interrogés dans cette étude puisque
la volonté était de mettre l'accent sur l'expérience et
les représentations des professionnel.le.s, ils sont tout de même
présents à travers diverses occasions d'observation. En effet,
ayant suivi la formation « Cet autre que moi », il a
été possible d'intervenir au sein de la campagne ayant lieu sur
le collège Edouard Vaillant de Bordeaux, et donc d'assister aux
réactions et à l'expression du discours des jeunes. Le fait que
la chercheure travaille depuis plusieurs années en tant qu'assistante
d'éducation dans un des collèges enquêtés du
quartier Bastide, puis dans un lycée professionnel de
l'agglomération bordelaise a également pu être un vecteur
de questionnements et d'observation des jeunes en situation.
Les territoires d'étude
Le quartier de la Bastide est un quartier traditionnellement
populaire et ouvrier, ainsi décrit par le collectif Victoire (Victoire
et al., 2007) : « [...] la rive droite de la ville devient une enclave
ouvrière que, longtemps, les "vrais" bordelais tiendront pour un peu
étrangère à la cité. Ainsi, le fleuve tracera
durablement une frontière sociale séparant la ville bourgeoise de
la "plèbe" ouvrière [...] ». Depuis peu, le tramway
relie les deux rives et redynamise l'artère centrale de la rive droite,
mais celle-ci reste encore marquée socialement.
On peut découper ce quartier en deux zones8,
une première s'étendant du long des
7 Formation au support « Cet autre que moi
» de l'association « Je, tu il... », proposée
conjointement par la mairie de Bordeaux et l'association Remue-Méninges
de Bègles. Elle s'est déroulée en trois séances
à l'Athénée municipal de Bordeaux, réparties sur
les mois de novembre et décembre 2011.
8 Voir carte des zones en annexe 1.
quais de Queyries à l'Eglise Sainte-Marie de la
Bastide, que l'on appellera Bastide-Queyries, et une seconde plus à
l'intérieur des terres, décrivant un cercle autour du quartier
d'habitat social de la Benauge (Bastide-Benauge). Quatre structures ont
été enquêtées sur ce quartier. Dans la zone
Bastide-Queyries, des entretiens ont été menés au
collège Léonard Lenoir et au centre social Queyries. De la
même manière, à Bastide-Benauge, le collège Jacques
Ellul et le centre social Benauge ont été enquêtés.
Ces quatre structures travaillent toutes plus ou moins en partenariat. Les deux
collèges sont classés établissements de ZEP. Un entretien
a également été mené au sein du lycée
professionnel accueillant des élèves du quartier dans une classe
de troisième d'insertion professionnelle.
Le quartier du Jardin Public est un quartier de centre ville
aisé, dans la continuité de ce que l'on appelle le Triangle d'Or
(Place Gambetta - Allées de Tourny - Grand Théâtre),
regroupant historiquement les familles de la bourgeoisie bordelaise. Même
si aujourd'hui, il ne s'agit plus de la bourgeoisie marchande qu'à connu
Bordeaux autrefois, ce quartier accueille « une classe administrative
et politique, un monde composite d'élus, d'entrepreneurs, de
fonctionnaires et de professionnels de la médecine et de
l'Université » (E. Victoire, 2007).
Deux structures ont été enquêtées
pour ce quartier, le collège Cassignol, établissement
favorisé et demandé (la carte scolaire apparait en
première page de leur site internet) et la maison de quartier
Chantecler, se divisant en plusieurs pôles (le pôle centre de
loisir et sports dans les locaux de la maison de quartier, et le pôle
culturel à l'Espace Lagrange, bâtiment neuf se trouvant à
quelques centaines de mètres de la maison mère). Nous n'avons pas
pu y trouver de centre social, sans doute du fait du caractère
favorisé de ce quartier.
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