INTRODUCTION
Malgré les larges évolutions dans
l'égalité entre hommes et femmes - en droit et dans les
représentations - qui ont eu lieu au cours du dernier siècle,
certaines inégalités existent toujours (salaires, accès au
monde politique, accès à certains métiers...), et beaucoup
de stéréotypes sont encore présents (sexisme,
homophobie...).
Cette persistance interroge dans le sens où
l'égalité de traitement est généralement
prônée par une large majorité des individus. Si,
finalement, les inégalités persistent « malgré nous
», c'est peut-être qu'elles se reproduisent par le biais de ce que
l'on peut appeler la socialisation genrée.
Ainsi, ce travail propose de s'intéresser à la
reproduction des inégalités de genre chez les jeunes adolescents
dans les espaces de socialisation en groupe que sont l'école et les
loisirs organisés en périphérie de l'école. Ils ont
en effet reçu une socialisation primaire au sein de leur famille, qui
s'articule avec cette socialisation secondaire. Si la famille est hors
d'atteinte pour les pouvoirs publics, l'école et les lieux de loisirs
peuvent être considérés comme une cible
privilégiée de la mise en place de politiques publiques visant
à lutter contre le sexisme et l'homophobie.
Comment sont organisées les structures d'accueil ?
Quelles représentations de genre ont les professionnels travaillant
auprès des jeunes ? En quoi cela peut-il avoir un effet sur la
socialisation des jeunes ? Comment adapter l'offre de formation afin
d'éviter le sexisme et l'homophobie ?
La commande de la mairie de Bordeaux
Le service du Développement Social Urbain de la mairie
de Bordeaux a proposé depuis quelques années des formations sur
la thématique du genre pour les enseignants et/ou les professionnels de
l'animation socioculturelle, et ce principalement dans les quartiers
considérés comme particulièrement sensibles à cette
question. Le but de ces formations est de lutter contre le sexisme et
l'homophobie chez les jeunes et les adultes qu'ils seront.
Il s'agissait donc pour le commanditaire à la fois
d'évaluer l'impact que peut avoir ce
genre de formation sur les professionnels, mais aussi de
comprendre l'expérience que ceux-ci peuvent avoir du terrain - ou des
terrains. En effet, bien que certains quartiers aient été
ciblés lors des formations qui ont eu lieu précédemment,
il s'agissait également dans cette étude de comparer les
expériences des professionnels de deux territoires très
différents de la ville de Bordeaux : un quartier dit « sensible
» ayant fait l'objet de plusieurs politiques de sensibilisation et un
quartier de centre ville favorisé ; le but in fine étant
d'adapter et d'étendre l'offre de formation afin de luter contre le
sexisme et l'homophobie sur l'ensemble de l'agglomération, en
évitant la stigmatisation de certains quartiers.
Problématique et hypothèses
· Problématique
Dans quelle mesure une sensibilisation des professionnels de
l'école et des lieux de loisirs aux thématiques du genre
peut-elle éviter la reproduction du sexisme et de l'homophobie ?
· Hypothèses
H1 : Le sexisme et l'homophobie sont les conséquences de
la reproduction des schémas hétéronormatifs à
travers la socialisation de genre.
H2 : L'organisation des structures d'accueil, des enseignements
et des activités participe à cette socialisation
genrée.
H3 : La faible sensibilisation à cette thématique
et les représentations que peuvent avoir les profesionnel.le.s de
l'école et des loisirs encouragent cette reproduction.
H4 : Former les professionnel.le.s sur les thèmes du
genre, de la mixité, et de leur gestion est un moyen de lutter contre le
sexisme et l'homophobie.
Ce rapport est divisé en trois parties. Le cadre
théorique et méthodologique sera d'abord donné, afin de
placer la présente étude et le lecteur au coeur des
réflexions et du
travail de terrain qui ont permis l'analyse.
Les résultats seront ensuite présentés et
analysés. L'intérêt se portera sur l'organisation des
structures étudiées, sur les diverses formations qu'ont pu
recevoir les professionnel.le.s rencontré.e.s, sur leurs visions des
relations de genre chez les jeunes et dans la société en
général afin de déterminer s'ils peuvent être les
vecteurs d'une reproduction de la socialisation genrée.
Enfin, les enjeux opérationnels d'adaptation de l'offre de
formation pour la mairie de Bordeaux seront discutés, ainsi que les
enjeux scientifiques que ce travail soulève.
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