L'efficacité du contrôle des commissaires aux comptes des sociétés anonymes (OHADA )( Télécharger le fichier original )par Didier Andy TAKAFO KENFACK Université de Dschang - Diplome d'études approfondies (DEA ) 2005 |
B. Les autres garanties de l'indépendance du commissaire aux comptesA coté des incompatibilités, la récusation (1) et le droit d'expression du commissaire aux comptes non renouvelé dans ses fonctions (2) constituent les autres garanties de leur indépendance. 1. La récusation des commissaires aux comptesLa récusation consiste à éviter l'entrée en fonction d'un commissaire aux comptes qui ne présente pas tous les caractères qu'exige le principe d'indépendance dans sa formulation nouvelle. En effet, un commissaire aux comptes suspecté d'incompétence professionnelle, de partialité et de dépendance à l'égard des dirigeants peut faire l'objet d'une récusation. Elle est une mesure grave en raison du mauvais usage dont peuvent en faire les actionnaires. Ainsi, peut-on craindre qu'une majorité inquiétée des investigations du commissaire aux comptes ne profite pour y mettre prématurément fin à ses fonctions. C'est la raison pour laquelle le législateur l'entoure d'un formalisme de rigueur (a) la procédure étant essentiellement judiciaire (b) a. Le formalisme de la récusation L'assemblée des actionnaires nomme le commissaire aux comptes, mais n'a plus en principe le pouvoir de mettre fin à ses fonctions en cours de mandat. Cependant, il est des circonstances exceptionnelles dans lesquelles il importe d'y mettre fin. Ce sont les cas de récusation49(*). En effet, l'article 730 al 1 AUSCGIE dispose : « Un ou plusieurs actionnaires représentant au moins le dixième du capital social de même que le ministère public, peuvent demander en justice la récusation des commissaires aux comptes nommés par l'assemblée générale ordinaire ». La demande de récusation doit être fondée sur « un juste motif » propre à mettre en doute l'honorabilité, l'impartialité et l'indépendance du commissaire aux comptes. Le législateur n'a pas précisé les motifs de la récusation, le juste motif est de ce fait laissé à la charge du juge qui appréciera, en s'inspirant du droit commun50(*) et de la pertinence des raisons invoquées à l'appui de la demande. C'est ainsi que dans une espèce51(*), le juge a considéré que les conditions dans lesquelles un commissaire aux comptes avait exercé des fonctions antérieures de conseiller de la société contrôlée ne permettaient pas de retenir à son encontre des reproches de partialité ou de dépendance justifiant sa récusation. La récusation représente une procédure implicite de vérification, par chacun des partenaires de l'entreprise sociale, que le commissaire aux comptes désigné présente toute garantie d'indépendance à l'égard des autres partenaires. La récusation de l'article 730 doit donc permettre aux acteurs sociaux de corriger le choix d'un commissaire aux comptes qui méconnaît les règles de sa profession, au premier rang desquelles figure le principe d'indépendance. Cependant, l'actionnaire doit respecter la procédure qui demeure judiciaire b. La procédure judiciaire de la récusation La récusation est prononcée par le président de la juridiction du lieu de situation de la société contrôlée. L'action est intentée par un ou plusieurs actionnaires détenant au moins 10% du capital ainsi que le Ministère public, dans les trente jours de la désignation du commissaire aux comptes52(*). S'il est fait droit à la demande, un nouveau commissaire aux comptes est désigné en justice. Il demeure en fonction jusqu'à l'entrée en fonction du commissaire aux comptes désigné par l'assemblée générale53(*) apte à remplir la mission de contrôle, en lieu et place de celui qui paraît inapte à cet effet. Doit donc être remplacé, à titre préventif, tout commissaire aux comptes qui ne présente plus les garanties que l'on attend « d'un organe de régularité »54(*). Mais, parce que la mission de contrôle oblige parfois le commissaire aux comptes à prendre des positions qui déplaisent aux dirigeants véreux, ces derniers peuvent à tout bout de chemin vouloir le récuser. Au cas où ils n'auront pas réussi, ils essaieront de faire obstacle à sa réélection. Pour garantir davantage son indépendance, la loi lui reconnaît un droit d'expression devant l'assemblée générale. * 49 Ces cas de récusation peuvent être entre autres, la partialité, et la dépendance excessive envers les dirigeants sociaux. * 50 Art 158 CPCC. * 51 CA Colmar, 23 février 1983, Rev .Soc, 1983, 583, note GUYENOT (J.). * 52 Art 732 al 3 AUSCGIE. * 53 Art 730 al 2 AUSCGIE. * 54 VIDAL (D.), op.cit, n°340, p .264. |
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