L'efficacité du contrôle des commissaires aux comptes des sociétés anonymes (OHADA )( Télécharger le fichier original )par Didier Andy TAKAFO KENFACK Université de Dschang - Diplome d'études approfondies (DEA ) 2005 |
2. Le régime des poursuites disciplinaires
Le régime des poursuites tourne autour de la procédure (a) et des sanctions pouvant être prononcées (b). a. La procédure disciplinaire. Quand l'Ordre professionnel conclut à une faute disciplinaire, les poursuites disciplinaires doivent être engagées contre le mis en cause devant la chambre de discipline de l'Ordre. Au Cameroun, l'ONECCA dispose depuis sa création d'un organisme chargé d'assurer la discipline de ses membres. Il est composé de deux instances : le Conseil de l'Ordre et la Chambre d'Appel présidée par un magistrat de la Cour suprême désigné par le Président de la Cour suprême. Le Conseil de l'Ordre reçoit toutes les plaintes et accusations formulées contre les commissaires aux comptes qu'elles proviennent de l'Ordre, des tiers, des actionnaires ou des dirigeants sociaux. Il est chargé entre autres de l'instruction du dossier et doit rendre une décision sur le fond. Le principe du contradictoire est respecté, le commissaire aux comptes accusé a le droit de se défendre. Mais peut-il exiger le remplacement d'un membre du Conseil de l'Ordre pour suspicion ? Les statuts de l'ONECCA sont muets. A notre sens, pour les besoins d'une bonne justice, une telle action devrait être admise. Le Conseil de l'Ordre joue le rôle d'une juridiction de première instance, ses décisions sont susceptibles d'appel devant la Chambre d'Appel de l'Ordre. Cette dernière joue le rôle reconnu à toute Cour d'appel. A cet effet, elle reçoit en appel toutes les questions qui ont été soumises au Conseil de l'Ordre et doit réexaminer le fond du litige. On se pose une question : les décisions de la Chambre d'Appel sont-elles susceptibles de recours ? Si oui, devant quelle Juridiction ? Les statuts de l'ONECCA ne répondent pas à cette préoccupation. A notre sens, ses décisions devraient être « insusceptibles » de recours d'autant plus qu'on note la présence des magistrats de la « haute » juridiction. Cette solution éviterait l'encombrement des prétoires. Lorsque la chambre de discipline (via le Conseil de l'Ordre ou la Chambre d'Appel) conclue à des actes constitutifs de fautes disciplinaires contre le commissaire aux comptes, elle prononce des sanctions disciplinaires. b. Le prononcé des sanctions disciplinaires Un commissaire aux comptes reconnu coupable d'atteinte à la probité ou à l'honneur de la profession sera sanctionné par l'Ordre professionnel. Dans le cadre de l'ONECCA, la Chambre de discipline peut prononcer l'une des sanctions suivantes : l'avertissement, la réprimande, la suspension d'activité allant de trois (3) mois à un (1) an et la radiation. Tandis que les deux premières s'analysent en des sanctions de portée morale (á), les deux dernières s'analysent plutôt en sanctions privatives de droit (â). á Les sanctions de portée morale : l'avertissement et la réprimande L'avertissement est la première sanction que peut prononcer l'Ordre professionnel. Il s'agit d'un appel à l'intention, d'un « rappel à l'ordre » fait à un individu ou une autorité C'est donc la sonnette d'alarme faite au commissaire aux comptes d'avoir à mieux se comporter et de respecter l'éthique de la profession. La réprimande est un blâme fait au commissaire aux comptes en cas de manquements aux règles professionnelles dans l'exécution de ses missions. Mais contrairement à l'avertissement, elle suppose que le commissaire ait posé des atteintes d'un certain degré. C'est ainsi qu'elle peut faire l'objet d'une publicité auprès des sociétés contrôlées par l'intéressé. Ce qui aura inévitablement des effets néfastes sur la suite de sa carrière. Quoi qu'on puisse dire, l'avertissement et la réprimande ne sont que des sanctions minables, car ne privant pas l'intéressé de l'exercice de certains droits comme la suspension et la radiation. â. Les sanctions privatives de droit : la suspension et la radiation Si la suspension d'activité181(*) et la radiation sont des sanctions qui se révèlent privatives de droit parce qu'elles empêchent le commissaire aux comptes « condamné » de continuer l'exercice de ses fonctions, des différences notables sont à relever. La suspension d'activité est juste « temporaire ». Le droit français en fournit la précision utilisant le terme « suspension à temps ». La radiation est définitive, car elle emporte le retrait du nom de l'intéressé de la liste. Le commissaire aux comptes suspendu ne reprendra ses fonctions qu'après l'assemblée générale appelée à statuer sur les comptes de la société, qui suivra l'expiration de la période de suspension. La radiation est une sanction grave. Elle emporte nécessairement l'interdiction d'exercer et de faire état de la qualité de commissaire aux comptes. C'est une exclusion, en théorie, définitive. Bien que les statuts de l'ONECCA prévoient une possibilité de réinscription à l'Ordre dans un délai de cinq ans à compter de la décision de radiation, les chances de reprise du commissaire réinscrit par les sociétés sont très faibles. Le commissaire condamné à une radiation restituera aux sociétés qu'il contrôlait toutes les sommes déjà perçues par anticipation ne correspondant pas à un travail effectif. C'est dire le caractère « particulièrement infamant »182(*) de cette sanction. Elle constitue une « mesure d'assainissement » de la profession comptable et du contrôle des sociétés. L'oeuvre des Ordres professionnels sur le sentier de la recherche de l'efficacité du contrôle est salutaire vu l'exemplarité des sanctions telle que la radiation. Un commissaire aux comptes suspendu ou radié qui établit les comptes d'une société voit sa responsabilité engagée et ses délibérations annulées. * 181 La suspension d'activité peut s'entendre de la cessation temporaire d'activité. * 182 CHAPUT (Y.), Le commissaire aux comptes, partenaire...op.cit, p.118. |
|