1.3. ENVIRONNEMENT DE L'ENREPRENEURIAT PRIVE
CONGOLAIS
1.3.1. Situation sociodémographique
Avec une population estimée à 64,420
millions d'habitants, mais
disproportionnellement répartie sur le
territoire la RDC figure parmi pays le les plus peuplé d'Afrique
subsaharienne. Selon l'Enquête 1-2-3 (2005), 69,6 % de la population vit
en milieu rural contre 30,4% en milieu urbain. Le pays est sous-peuplé
avec seulement 24 habitants au km2. Il sied de souligner que
particulièrement la ville Province de Kinshasa a une très forte
densité, avec 577 habitants au km2 suite à la
concentration des infrastructures économiques, scolaires, universitaires
et sanitaires ainsi que des institutions administratives et politiques,
à l'exode rural lié aux conflits et à la
dégradation des conditions de vie en milieu rural . Ceci crée
pour la population l'idée de bénéficier une meilleure
offre d'emploi dans la capitale qu'en Province.
La population d'âge économiquement actif
(20-64 ans) c'est-à-dire les adultes qui doivent prendre en charge
à la fois des enfants et des vieillards, représente 40% de la
population totale, soit 38,8% chez les hommes et 41,2% chez les
femmes.
La croissance démographique105 de
3,1% expliquée par une mortalité infantile décroissante au
cours de ces vingt dernières années et une fertilité
constante sur la période avec 6 enfants en moyenne par femme, s'il n'est
pas régulé, fera doubler la population congolaise tous les 25
ans. Cette population restera très jeune et exercera des pressions
nouvelles et plus fortes encore, aussi bien sur le système scolaire, le
système sanitaire que sur le marché du travail. Avec cette
tendance démographique, 50% de la population de la tranche d'âge
supposée active de 15 à 64 ans, serait des jeunes et aggraverait
la situation du marché du travail.
1.3.2. Le contexte socioculturel congolais
La prise en compte du contexte culturel local peut,
comme le note MUAMBA106, »permettre une meilleure
connaissance de la mentalité des gens, et
plus particulièrement du modèle implicite de management que
cette mentalité recèle». Et
104 NZUZI LELO et C.TSHIMANGA, op cit
105 RDC, DSCRP 2, op.cit., p.19
106 MUAMBA MULUMBA NGANDU, Relativité culturelle et
management des entreprises africaines - Le cas du Zaïre, IST/UCL, Cahier
Orange n° 39, 1994, p. 4
cette connaissance, poursuit-il, peut contribuer à
mieux définir les priorités du changement sur le plan de la
gestion.
Les cultures africaines étant multiples et
diverses, la tentation est, dit-il, de »rassembler quelques traits
dominants du système des valeurs en vigueurs» dans
différents groupes. Nous pouvons, dans le cadre du présent
travail, nous arrêter sur les quelques traits ci-après
caractérisant le contexte socioculturel africain107 : la
sociabilité, le rapport au temps et le rapport à
l'argent.
1.3.2.1. La sociabilité.
Contraint par la nécessité de
l'existence, écrit MUAMBA108, l'Africain recherche d'une
manière générale la vie du groupe. Celle-ci s'offre
à lui soit sous forme de société tribale, soit sous celle
de la société moderne. Quel que soit le groupe de vie auquel il
s'attache, il se laissera mouler selon les lois de la socialisation dans les
vues et les valeurs du groupe qui le porte. Le recours aux relations de
parenté, de voisinage et de camaraderie est favorisé par toute la
tradition culturelle qui encourage et impose la solidarité et
l'entraide.
Solidarité et entraide impliquent, selon
BOURDIEU109, que celui qui a réussi doit se servir de sa
propre réussite pour aider les autres, à commencer par les
membres de sa propre famille : chaque individu qui se respecte se sent
responsable de plusieurs parents plus ou moins proches, à qui il se
doit, entre autres choses, de trouver du travail en usant de sa position et de
ses relations personnelles. Cette solidarité, qui repose essentiellement
sur la précarité des conditions de vie, a entre autres
conséquences un esprit de dépendance élevé qui
affecte les relations entre l'individu et les autres membres du groupe, va
à l'encontre de l'efficacité et du développement de
l'entreprise.
Paul KAMMOGNE110 soutient à ce sujet
que l'entrepreneur africain, en cas de réussite, doit payer un lourd
tribut à sa communauté d'origine, tribut auquel il peut
difficilement se soustraire.
D'abord, sa réussite est
considérée comme un don du ciel par toute sa communauté et
il doit en conséquence partager les fruits avec tous. Se soustraire
à cette obligation c'est entraîner la malédiction
collective qui peut aller jusqu' à l'élimination physique.
Remplir convenablement cette obligation, à la satisfaction, c'est
renoncer au développement de l'entreprise, au moins dans un premier
temps, en consacrant des fonds nécessaires à des festins et des
cadeaux divers. Ensuite, la réussite dans certains cas peut être
considérée comme la conséquence d'une pratique de
sorcellerie.
107 Cette liste n'est pas exhaustive. D'autres traits
cités sont : l'exercice du pouvoir, l'attitude envers le travail,
etc.
108 Muamba M. Ngandu, op. cit.
109 BOURDIEU P., Algérie 60- Structures économiques
et structures temporelles, Edition de minuit, Paris, 1977. Cité par
Muamba M ; Ngandu, op. cit., p. 6
110 Paul KAMMOGNE FOKAM, L'entrepreneur africain face au
défi d'exister, L'Harmattan, 1993.
La meilleure attitude que recommande KAMMOGNE, c'est
de rechercher l'équilibre entre la solidarité africaine, qui
possède des vertus évidentes pour la réussite de
l'entreprise, et l'individualisme qui favorise la constitution d'une
épargne abondante susceptible de financer l'investissement.
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