2 LES STRUCTURATIONS SYNDICALES AU MALI
2.1 LES PREMIERES STRUCTURATIONS PAYSANNES : SCAON, SYCOV,
SEXAGON
Une multitude de formes d'organisations existent, souvent
très localisées ou avec un objet très précis. Mais
peu de structuration syndicale ont émergé, pour porter des
revendications face aux autorités, hormis sur les propres terres
gérées par l'État, dans l'Office du Niger et le Sud-Mali.
Grâce notamment aux programmes d'encadrement, la paysannerie s'est
organisée. Par exemple la Compagnie Malienne pour le
Développement des Textiles très présente sur le terrain a
alphabétisé 10 000 personnes/an alimentant une capacité de
réflexion autonome chez les producteurs qui « a surement permis
a l'origine la création du Syndicat des Producteurs Cotonniers et
Vivriers ». GENTIL (in DAGNON, 1992).
5 Note technique de présentation de la LOA et le point de
sa mise en oeuvre, 10 novembre 2009, ministère de l'agriculture
6 Les chiffres de ce paragraphe sont issus d'une étude sur
le statut des exploitants et exploitations agricoles, Bréhima N'DIAYE
7 Selon les résultats du dernier Recensement
Général Agricole de 2004
2.1.1 Syndicat des Colons et Agriculteurs de l'Office
du Niger : SCAON
Depuis le XIX éme siècle, le
colonisateur français avait introduit l'économie dite de traite,
introduisant la monétarisation et le déplacement forcé de
main-d'oeuvre, issue d'autres contrées, ethnies (Mossi).
Deux mesures fortes marquent le monde paysan qui était
sous le joug de la colonisation : l'abolition du travail forcé (11 avril
1946) et la loi accordant le droit d'association aux colonisés. Mais
l'adhésion obligatoire aux coopératives laissait peu de
liberté. Cette volonté, perpétuée par tous les
gouvernements, de spolier les paysan-ne-s des revenus de leur travail et de les
contrôler, leur laissait peu de marge de manoeuvre. Il y a eu plus de
résistance passive qu'active, même si un des premiers acte fort,
la manifestation de 1000 colons en 1944 à Niono reste dans les
mémoires8 .Dix ans plus tard naissait le
premier syndicat le SCAON qui a été récupéré
puis dissout par les mêmes qui ont pris le pouvoir au moment des
Indépendances. Traités comme des
esclaves9, « le paysan a l'époque
*années 60+ est prié d'emprunter la voie qui lui est
proposée et il n'a pas eu son mot a dire dans la conception de
l'évolution jugée souhaitable en haut-lieu » (DEVEZE,
2008)
2.1.2 Syndicat des Producteurs Cotonniers et Vivriers :
SYCOV
L'origine du mouvement de mai 91, du côté paysan
dans la zone Sud-Mali, a puisé ses racines « en 1990 au niveau de
Koutiala et était lié aux exigences du remboursement global des
crédits entre des producteurs de la Compagnie Malienne du Textile (CMDT)
et la Banque Nationale de Développement Agricole (BNDA), au prix du
coton trop faible et des intrants trop haut» selon DEMBELE Tahirou leader
paysan et secrétaire général du SYCOV (in DAGNON 1992).
Alors qu'en parallèle les salariés de la CMDT obtenaient, eux,
une augmentation de salaire.
Pour la 1ère fois les Associations
villageoises* et les Tons* des cercles de Koutiala et San se
réunissaient avec des revendications communes pour faire pression sur
l'État en menaçant de grève. Le coton représentant
plus de la moitié des recettes d'exportation, celui-ci ne pouvait se
permettre de perdre une année. Le 6 mai, une coordination demande
à être reçue par ATT, président du gouvernement
provisoire, pour présenter leurs « 12 points de doléances
» qui ont été refusés par la CMDT.10 Le
déplacement de la Ministre « sous les manguiers » a
marqué les esprits en accordant une augmentation de 10 FCFA/kg (0.01
€) de coton graines. Galvanisés, les paysans fondent le SYCOV le 29
septembre 1992, après un séminaire à Ségou le 23/24
septembre et entament un bras de fer avec la CMDT. Cette épreuve de
force aboutit a la construction d'un contrat-plan tripartite :
État/CMDT/SYCOV garantissant un prix minimum et un réajustement
en fonction du prix de vente obtenu, et mis en application dès 1993. Le
SYCOV en tant que syndicat est reconnu comme acteur dans la zone
cotonnière du Sud Mali, mais est très corporatiste. Il est
adhérent de la CNOP.
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