9.3 LES TEXTES EN COURS
(( Maintenant on ne sait plus rien depuis le dernier CSA .On
a perdu toute la dynamique et le dialogue » regrette un salarié de
la CNOP.
A partir de là nous abordons la phase de mise en oeuvre
dans un cadre mouvant et flou, , sans pression, ni directive du plus haut de
l'État, chacun naviguant a vu au gré de l'intérêt
porté a la LOA. Avant de tenter une analyse de textes en cours, nous
allons essayer de décrypter leur cheminement officiel.
9.3.1 Parcours pour les procédures des textes
législatifs
Un exposé du juriste du Ministère de
l'Agriculture lors de l'atelier de concertation, va nous éclaire sur le
parcours des textes, en faisant sélectivement ressortir les points
concernant les différents acteurs en jeu. Mise au point
nécessaire faite à la demande de la CNOP mais qui arrive au bout
de 3 ans ! A ce jour aucun document n'existe pour expliquer ce processus !
« Un texte sur le cheminement des décrets et lois n'est pas fait,
mais la CNOP ne m'a pas relancé là-dessus». Faut-il attendre
la demande d'une OP pour rendre public des textes sur le fonctionnement du
système législatif ?
Cheminement des décrets
« Il y a les lois et le niveau réglementaire
ce sont les décrets, il y a 2 sortes de décrets les
décrets ministériels et les décrets simples. ».
Dans le langage courant il n'est jamais spécifié quelle
sorte de décret est en cours, donc à quelle étape il
est.
« Le décret est proposé par les
ministères. L'APCAM est obligatoirement saisie de tous les textes mais
cela ne lie pas le gouvernement. Si pas d'avis de l'APCAM le texte repart, mais
c'est aussi à ce moment là que les OP sont consultées.
» Alors qu'il y a des élus CNOP à l'APCAM, nous
retrouvons là la dualité ou le dysfonctionnement entre les 2
structures. Les informations arrivent aussi par d'autres canaux par les ONG de
renforcement de capacité comme la SNV ou par le relationnel.
« Tout acteur peut faire des propositions au
Ministère. Le Ministère fait un projet de décret, les
directions le soumettent aux départements, puis si le conseil juridique
estime que c'est bon, ça passe au Secrétariat du gouvernement
où les textes sont écrits pour passer au Ministère. »
Le problème à ce niveau est de savoir quel texte est en
cours, à quel niveau d'écriture il est, quel est le
référent et donc à quel moment il est opportun
d'intervenir.
« Puis le texte [du Ministère] va au
Secrétariat Général du gouvernement qui rédige le
texte en se référant aux autres différents textes, car
c'est là que sont les archives. Il y a une mémoire, une logique
à pérenniser à stabiliser. C'est un garde-fou pour
permettre de savoir si le texte est bon, s'il n'existe pas déjà,
par rapport à l'histoire, à la cohérence du texte ».
C'est l'aspect rédaction juridique et harmonisation avec tous les textes
nationaux, et internationaux.
« Après il y a une réunion avec les
ministères concernés, et là c'est dur car le texte touche
automatiquement d'autres domaines! Chacun défend son secteur, chacun
défend les intérêts de son département, s'ils ne se
mettent pas d'accord, retour au Secrétariat général du
gouvernement. Le premier ministre tranche en dernier recours après avis
du Président » Où est la prise en compte de l'intérOt
général, de la voix paysanne ?
« Puis il y a un tirage en 60 exemplaires pour tous
les ministères, Cour suprême, institutions, chambres etc. Ce sont
des textes sans tâche, ni rature, puis retour au Conseil des Ministres et
s'il est adopté par lui, c'est dans l'état tel quel qu'il est
validé avec des remarques, des réserves si besoin !
».
Ayant moi-même expérimentée la recherche
de documents tels que les décrets déjà sortis, ce n'est
pas une simple affaire de pouvoir mettre la main dessus, alors que ce sont des
textes votés, signés et publics. Lorsque la CNOP a accès
aux textes en cours, c'est quand ils sont finalisés par les juristes des
départements ministériels et arrivés au SP. Ce dernier les
diffuse alors et devrait reprendre les remarques pour les intégrer avant
l'étape suivante. Mais il y a toujours le problème de temps pour
bien traiter le dossier en faisant des concertations. Ce temps là n'est
jamais prévu.
Effectivement les décrets sont désormais
écrits dans le cadre d'un circuit interne administratif avec
plutôt une simple consultation rapide auprès des organisations
Agricoles, surtout l'APCAM, avec la contrainte de « répondre pour
hier » et sans débat, sans savoir ce qui va être repris ou
pas.
Vote des lois et plus spécifiquement de la
LOA
«Il y a aussi les ordonnances qui sont des textes qui
passent devant l'AN car elles vont devenir une loi, par principe elles sont
adoptées car reflètent la loi... mais elles peuvent être
annulées mais je ne connais pas d'exemple... Pour les lois c'est la
même procédure que les décrets avec un passage dans les
commissions de l'AN. Une commission de saisie au fond et des commissions
spécialisées sont consultées pour avis. Le bureau de l'AN
se réunit et partage les textes dans les commissions dans lesquelles
s'inscrivent les députés. Pour la LOA toutes les commissions ont
été saisies, elles ont fait des écoutes sans
interférence du gouvernement, elles peuvent même écouter un
fou du village si elles veulent. Elles écoutent les ministres aussi puis
font leur rapport qui passe après en session plénière avec
les remarques...Dès que c'est voté même s'il y a des
coquilles, elle est votée en l'état.. La cour suprême
peut-être saisie pour un recours mais de mémoire il en a jamais vu
».
Le passage a l'AN semble n'être qu'une formalité
d'après le fonctionnaire. Pourtant lors de l'élaboration, la CNOP
a fait du lobbying car les députés voulaient amender les textes,
« souvent parce qu'ils ne connaissaient rien au sujet ou aux enjeux
». Le travail de lobbying et plaidoyer a été
anticipé. De plus la LOA était déjà validée
par ATT. « La loi votée était bien à la fin le
reflet des principales revendications paysannes ». Le jour du
vote57 Le seul grand débat évoqué était
la discussion d'écrire agricole avec un grand A. «Agricole avec
un grand A est une convention, la majorité a accepté le texte est
passé ».
A noter que l'AN a été modifiée lors des
élections de juin 2007. Ainsi les députés actuels ne sont
pas tous les mêmes et le travail de lobbying, donc de l'énergie,
va revenir dans l'échéancier des OP.
A qui profite cette opacité d'écriture
des textes ?
Pour les décrets, lois ou politiques en cours le
désordre est maitre. Le vocabulaire employé n'est pas clair : les
cursus et procédures sont différents et la transparence n'est pas
de mise. Personne ne sait plus oü donner de la tête.
Cela a été flagrant en faisant le point avec la
CNOP en octobre sur les textes en cours suite a l'entrevue avec le SP. Sur le
foncier le SP parle d'une concertation dans 6 mois, alors que le
Ministère de l'Urbanisme, des Affaires foncières et du Logement
organiserait un colloque sur le sujet du 27 au 29 novembre (ça sera
celui du 7 au 11 décembre). Sur le texte de politique semencière,
pas au courant qu'il serait sur le bureau interministériel. Les statuts
devraient être signés dans 2 semaines -mais où ?- alors que
« ce n'est pas un décret mais une loi et donc elle doit passer
devant l'AN.~. Appelé devant moi un député confirme qu'il
n'a rien reçu. En fait c'était pour la signature au Conseil des
ministres alors que le texte proposé, ne prenait pas en compte les
remarques de la CNOP qui l'a fait savoir. En janvier le pré-projet de
loi n'était toujours pas finalisé. Nous y reviendrons. Cet
imbroglio fut mainte fois relevé par les paysans lors de l'atelier de
concertation :
« Comment s'organiser pour se faire entendre avant le
décret ? Il faut nous expliquer le processus, le cheminement des textes.
».
Cette opacité dans la rédaction des textes n'est
peut-être pas innocente ou révèle tout au moins un
dysfonctionnement et « chacun défend son
pré-carré ». Il n'y a plus d'organe directeur comme
l'était la CIFA rattachée directement à la
Présidence. Convaincue et engagée la CIFA avait aussi
réussi à faire bloc tout au long du processus en interne tout en
tissant des liens avec le monde paysan. Selon le président de la CNOP
« Sans Nouhoum TRAORE et Madame LANSRY il n'y aurait pas eu de loi
avec la CNOP. »
57 La LOA faisait partie d'une liste de 10 lois prévues
d'être toutes votées dans cette session extraordinaire du 16
août 2005. A 15h elle n'était toujours pas passée et la
session a fini vers minuit, avec 9 lois votées dont la LOA.
Aujourd'hui les textes s'écrivent pratiquement sans la
CNOP. Leur sentiment est que :
« La loi nous échappe. Il n'y a plus de
cohérence entre les différents ministères, chacun a son
conseiller juridique faisant sa loi de son côté. Chacun arrive
avec un bout de la loi qu'il doit traduire en terme juridique en veillant a
leur adéquation a toutes les dispositions existantes extérieures.
Il n'y a plus de cohérence, alors que cela doit être le souci du
SP ».
Les textes qui ne « devaient pas être écrits
dans les bureaux » se retrouvent dans un processus administratif
très normatif, corroboré par la FAO « Il y a des
problèmes parce que les juristes prennent le dessus, il n'y a que les
textes et les paysans n'ont pas le droit de dire ceci, cela »
Depuis plus de 3 ans que la mise en oeuvre de la LOA est en cours
aucune initiative n'a été prise afin que les acteurs soient
formés,informés, et surtout les OP qui s'y retrouvent
impliquées pour la première fois.
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