8 LES GRANDES LIGNES DE LA LOA
Avec 7 TITRES, 33 chapitres, 200 articles, elle aborde les
questions liées au développement Agricole et du
périAgricole (transformation, transport, distribution
etc.)37, intégrant aussi les stratégies et objectifs
de décentralisation, le CSCRP, les engagements sous-régionaux et
internationaux (articles 4 et 6) « Elle [est] l'instrument directif et
fédérateur pour les politiques Agricoles~. La LOA innove et met
en exergue la reconnaissance de l'EAF et de ses membres, le droit à la
sécurité alimentaire dans le cadre de la souveraineté
alimentaire, l'équité sociale, la responsabilisation des acteurs
pour pallier au désengagement de l'État. L'article 9 est clair
là-dessus :
(( La politique de développement Agricole repose
sur la responsabilisation de l'État, des CT, de la profession Agricole,
des exploitants Agricoles et de la société civile. Flle s'appuie
sur la solidarité, l'équité et le partenariat entre les
acteurs, la subsidiarité, la complémentarité, la promotion
de l'exploitant Agricole, des secteurs privé et associatif. Flle affirme
le principe du désengagement de l'État des fonctions productives
et commerciales, Agricoles et péri Agricoles. Flle privilégie la
promotion de partenariats et la création de marchés communs au
sein des grands ensembles économiques sous régionaux,
régionaux et internationaux. »
La LOA n'est qu'une loi cadre d'oü découleront
d'autres lois et des décrets. Mais quand ? Quel sera le contenu des
décrets ?
Nous pouvons d'ors et déjà apporter un
éclairage sur : quand ? En effet entre le document d'orientation
de l'avant projet et la loi votée, une modification notable a
été faite: la disparition des délais d'applications.
Ils étaient initialement prévus « dans les 3 ans maximum
[sauf+ l'évaluation qui doit être faite tous les 2 ans ».
36 Guide pratique des mesures
37 (voir annexe n°1)
Cette absence de délai laisserait-elle la porte ouverte
pour ne pas mettre en application les sujets les plus délicats à
gérer politiquement comme le foncier par exemple ? En tout cas la
position du représentant de la FAO est différente et a
pesé « J'ai dit au monde paysan de faire mener des
études, ils veulent la réalisation de la loi dans les 3 ans,
c'est moi qui ai demandé qu'on enlève ce délai dans la LOA
! ». Étant un des bailleurs de fond et un malien en poste
depuis longtemps dans différentes institutions agricoles, on peut
supposer qu'il a pu réellement influer.
Dans tous les cas l'espoir apporté par la LOA ne semble
pas répondre aux demandes des paysan-ne-s , qui en souhaitaient ((
une exécution rapide et opérationnelle », ni celles du
CIFA (( J'aurai aimé que ce qui se fait, sa mise en oeuvre soit
activée et finie en 2012 * fin mandat ATT+ mais il reste beaucoup de
choses à faire ! ».
8.1 QUELQUES POINTS FORTS REVENDIQUES ET APPORTES PAR LA
CNOP
Tout au long de ce chapitre 8, vont être retenus et
développés quelques points forts inscrits dans la LOA et
portés par la CNOP Le choix fait est lié aux concepts nouveaux
introduits comme la souveraineté alimentaire ou la défense de
l'exploitation Agricole familiale et de ses membres. Ses visions paysannes sont
aussi reconnues par le Ministère de l'Agriculture comme des dires
ci-dessous le confirmeront. Mais ce n'est pas parce que c'est inscrit dans la
LOA que leur réalité est tangible comme nous allons le voir.
Ainsi la CNOP elle-même revendique:
«Les principales propositions paysannes relatives a
la vision de l'agriculture : la reconnaissance de l'EAF, la souveraineté
alimentaire, la protection et la gestion des ressources naturelles, la
sécurité foncière, le financement et l'implication des OP
dans la mise oeuvre pour la partie gouvernance » ont été
prises en compte avec comme objectif l'équité sociale.
»
8.1.1 L'Exploitation Agricole Familiale (EAF)°
« L'EAF ne doit pas disparaître et c'est le but
de la loi » affirme un représentant de la CNOP lors de
l'atelier d'octobre 2009. Sa reconnaissance est traduite dans le TITRE II du
chapitre I a travers 16 articles du 11 au 26 qui doivent assurer un statut a
l'exploitation et aux exploitant-e-s, dont l'enregistrement et
l'immatriculation qui font partis des 5 décrets
sortis38. L'article 3 annonce (( que la
politique de développement agricole malienne a pour but de promouvoir
une agriculture durable et compétitive reposant prioritairement sur les
EAF reconnues et sécurisées ». L'article 13 classe les
exploitations Agricoles en 2 catégories: l'EAF et l'entreprise
Agricole.
(( La seule grosse concession qu'on a accepté dans
la loi c'est l'entreprise Agricole. On nous a dit que par rapport aux accords
internationaux, et dans l'esprit du libéralisme on ferait fuir les
investisseurs, c'était une concession librement acceptée »
explique un représentant de la CNOP.
En effet c'est pour au moins être conforme aux
engagements de l'ECOWAP que l'entreprise Agricole est inscrite dans la LOA.
Elle est gérée par les réglementations de l'Organisation
pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), ce qui la situe
d'emblée dans le champ des investisseurs liés aux échanges
régionaux et internationaux. Elle est clairement affichée
à côté des EAF comme dans la LOA :
38 Nous y reviendrons dans la partie mise en oeuvre de la LOA
a promouvoir une agriculture moderne et durable,
fondée sur l'efficacité et l'efficience des exploitations
familiales sans remettre en cause la diversification des productions »,
sont aussi reconnues a les entreprises agricoles grâce a
l'implication du secteur privé. ».
Ceci est en concordance avec le NEPAD qui veut promouvoir
« les gros investisseurs nationaux ou étrangers
d'accéder à des milliers d'hectares sécurisés par
l'État.». Des mesures sont déclinées
spécifiquement dans ce sens pour le Mali «appui à
l'initiative malienne d'investissement régional dans l'ON :
définition des conditions d'investissements privés
étrangers sur la zone »39 d. ATT a
précisé lors du CSA du 20 avril 2008 que dans ce cadre là
pour la période 2008-2012 103.356 ha dont 61 000 en maîtrise
totale de l'eau seront aménagés, mais pas pour les paysans, pour
les investisseurs -comme MALIBYA-
Même si pendant l'atelier de concertation le
représentant du Ministère de l'Agriculture a effectivement
rappelé cette reconnaissance de l'EAF défendue par la CNOP en
déclarant :
a Dans la LOA le législateur a pris l'option que
les femmes et les hommes seraient au centre et donc l'EAF qu'on a essayé
de formaliser, en lui donnant une structure, un sens juridique pour être
un acteur économique, elle l'est déjà, c'est dans le sens
juridique je veux dire»
Mais les interrogations subsistent quant à la
volonté de soutenir les EAF comme pilier de l'économie agricole,
alors que les programmes financent d'autres exploitations. Cette question est
aussi portée par T.DIARRA40, :
a La LOA entretient l'ambigüité sur la nature
de cette agriculture familiale. Elle sous-tend en réalité que
l'exportation doit revenir a la grande entreprise Agricole qui a par nature une
orientation commerciale et les petits paysans ne devront cultiver que pour se
nourrir et seront laissés-pour-compte. Ils deviendront des ouvriers
agricoles. La LOA pourrait ainsi institutionnaliser un système où
les petits paysans majoritaires au Mali seraient réduits a des
conditions de vie encore plus rudes qu'aujourd'hui.>
La reconnaissance de l'EAF passe aussi par la reconnaissance
de ses membres qui est l'enjeu du pré-projet de statut41 et par
l'équité sociale. Elle est transcrite dans l'article 8 a La
politique de développement Agricole vise à assurer la promotion
des femmes et des hommes qui vivent du secteur Agricole dans le respect de
l'équité, notamment entre les milieux rural et urbain.
»
Plus spécifiquement dans l'article 24 l'État
«privilégie l'installation des jeunes, des femmes, des groupes
vulnérables~. Dans l'article 45, il «favorise
l'équité entre les femmes et les hommes en milieu rural, en
particulier dans l'exploitation agricole~. L'article 17 précise «
Les membres d'une EAF, qu'ils soient de sexe masculin ou féminin, ont
l'obligation d'oeuvrer a la rentabilité économique et sociale de
l'exploitation. Le chef d'exploitation a l'obligation de promouvoir des
pratiques de gestion participative et des mesures incitatives au sein de
l'exploitation ~. L'article 19 complémente : A noter aussi un article
pour la mise en place d'un régime de protection sociale pour les
travailleurs des exploitations familiales (article 26).
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