3) La fiche d'observation nécessite des remaniements
considérables, en vue d'optimiser la pertinence des
résultats.
Nous allons maintenant nous pencher sur la fiche d'observation
utilisée par l'artthérapeute stagiaire dans le cadre des prises
en charge. Plusieurs remarques sont à soulever. Nous aborderons dans un
premier temps les points qui concernent le cadre formel de l'outil, puis le
contenu dans un second temps.
Le premier point concerne le volume de l'outil. Entre une
heure et une heure et demie étaient nécessaires pour remplir la
fiche d'observation après la séance ; cela est bien trop long.
Les données à observer doivent bénéficier d'une
disposition beaucoup plus simple, comme une grille par exemple, où il
suffirait juste de remplir avec un code couleur, ou des abréviations qui
caractérisent le fait observé. L'art-thérapeute aura juste
un temps d'apprentissage de ces codes, puis, avec l'expérience, pourra
compléter sa fiche avec aisance, rapidité et précision.
Cependant, les zones de commentaires libres seraient à conserver. Chaque
patient est unique et est toujours susceptible de nous amener à de
nouvelles idées, réflexions, et corrections qui permettront
d'améliorer la fiche d'observation, afin de la rendre plus efficace, et
accessible au plus grand nombre. Cela impliquerait un travail régulier
de remise en question et d'optimisation des outils de l'art-thérapeute ;
ce dernier doit être toujours prêt à gérer les
limites de sa méthodologie, et être ouvert à tout
remaniement. Il faut aussi prendre conscience qu'une fiche d'observation qui
concerne un public âgé dépendant ne sera jamais
intégralement compatible avec celle que l'on établira pour des
jeunes adultes traumatisés crâniens. L'art-thérapeute doit
pouvoir être le plus cohérent et précis possible sur la
population avec laquelle il travaille, et ne pas chercher à standardiser
son outil à une population trop diversifiée.
Autre point qui concerne la structure de l'outil : le nombre
de réponses. Afin d'être le plus cohérent possible dans sa
cotation, il est important d'utiliser une norme référentielle de
cotation. Dans notre fiche d'observation, chaque proposition comporte cinq
réponses possibles, dont une et seulement une peut être
validée. Dans un souci de simplicité et de cohérence, les
réponses ont été disposées de la plus mauvaise
à la meilleure (de haut en bas). Les réponses sont ensuite
cotées de 0 à 4 (0 pour l'absence de fait observé, et 4
pour le fait observé le plus adapté). Si l'outil comprenait
plusieurs normes référentielles, cela pourrait induire une
mauvaise lisibilité, et une mauvaise interprétation des
résultats par la suite.
Les points suivants traitent du fond de l'outil. Des remarques
importantes sont à soulever. Tout abord, nous allons parler des
faisceaux d'items qui n'ont pu être cotés dans la prise en charge.
Ils auraient pu faire l'objet d'une cotation, mais l'organisation du faisceau
d'items était incorrecte. Prenons l'exemple du faisceau << nature
du discours » ; pour que les items puissent être cotables, il aurait
fallu plutôt dire << Le sujet a émis des refus dans son
discours : » avec un ordre de fréquence pour les
réponses qui, là, auraient pu être quantifiables.
Certains faisceaux d'items ne contenaient pas de
réponse d'absence, ce qui est une bête erreur. Cet oubli n'a que
pour effet de nuire à la crédibilité de la cotation. Les
faisceaux concernés sont ceux qui n'ont pas été
cotés, plus le faisceau << cadre de communication ».
<< L'atteinte des objectifs » aurait pu être
un élément cotable à la place d'être un champ de
commentaire libre. Cela aurait permis, lors de la lecture de la cotation, une
compréhension rapide et précise du bilan de la séance.
Les deux dernières remarques concernent des fautes
méthodologiques considérables qui ont été
traitées en cours de prise en charge, mais dont la pertinence n'a pu
être scientifiquement vérifiée. Dans un souci
d'honnêteté, nous avons préféré
présenter la fiche d'observation telle qu'elle était au
départ, avant d'être modifiée. Premièrement, il n'y
a aucun faisceau d'item qui ait servi à observer les faits liés
au phénomène artistique (à savoir l'intention, l'action et
la production), ce qui est assez étonnant lorsqu'on sait que l'art n'est
autre que l'outil de prédilection de l'art-thérapeute. Trop
préoccupée par l'axe social du projet, l'art-thérapeute
stagiaire ne s'est pas tout de suite rendue compte de cet oubli.
Deuxièmement, l'absence d'une fiche
d'autoévaluation (voir exemple à la page suivante), qui avait
pourtant un grand intérêt vis-à-vis de l'objectif
thérapeutique. La fiche d'autoévaluation, aussi appelée
<< Cube harmonique » mais sous une autre forme, est un ensemble de
questions auxquelles le patient doit répondre. Ces questions concernent
son intention, son action et sa production, et font référence
respectivement au Bon (Estime de Soi), au Bien (Confiance en Soi), et au Beau
(Affirmation de Soi). L'autoévaluation cherche donc à mettre en
valeur la détermination, le jugement et le goût de la personne.
Elle peut être une bonne empreinte pour la personne qui reconstruit son
identité, elle voit en cela un repère de certains aspects de sa
personnalité. Bien sûr, tout comme la fiche d'observation, la
fiche d'autoévaluation est à adapter en fonction du patient
(pathologie, pénalité, handicap...).
Exemple de fiche d'autoévaluation
Veuillez entourer, à la suite de chaque phrase, la
réponse de votre choix parmi les 5 réponses qui vous sont
proposées.
Est-ce que je reviendrai pour la prochaine
séance ?
- Oui, certainement - Oui, pourquoi pas
- Non, je ne pense pas - Non, pas du tout
- Je ne sais pas
Ce que j'ai créé pendant la
séance était :
- Très beau
- Beau
- Pas très beau
- Vraiment pas beau - Je ne sais pas
Ce que j'ai fait au cours de la séance
était :
- Très bien fait - Bien fait
- Pas bien fait
- Vraiment pas bien fait
- Je ne sais pas
L'activité proposée dans la
séance m'a :
- Beaucoup plu
- Plu
- Pas vraiment plu - Pas du tout plu
- Je ne sais pas
Les moments que j'ai passé pendant la
séance étaient :
- Très bons
- Bons
- Pas très bons
- Vraiment pas bons - Je ne sais pas
Tout professionnel doit effectuer son travail avec une
méthodologie précise et rigoureuse, sous peine de
discréditer les résultats obtenus, et par conséquent
d'altérer l'efficacité du travail pluridisciplinaire. C'est pour
cela qu'il doit toujours faire preuve de recul et d'ouverture sur ses outils et
l'usage qu'il en fait, et de ne pas hésiter à demander l'avis de
ses collègues si un doute venait troubler son travail. Ce n'est pas pour
autant qu'il doit être dépendant des autres intervenants, au
contraire, la gestion indépendante des responsabilités assure une
efficacité de travail optimale et une cohésion du groupe de
professionnels équilibrée.
Maintenant que nous avons discuté de la
méthodologie, nous allons maintenant nous pencher sur la population
étudiée dans ce mémoire à travers
l'expérience art-thérapeutique, et traiter plusieurs
questions.
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