A- Un mimétisme manifeste
Peut-on encore, au XXIème siècle,
analyser les démocraties en Afrique en termes de mimétisme et en
se situant par rapport à la période coloniale? La question n'est
pas surprenante car malgré des efforts de création des textes
originaux, l'arsenal juridique et institutionnel africain est largement une
photocopie du droit occidental et particulièrement de l'ancienne
métropole.
Malgré une rupture dans les années 1970-1980, le
renouveau constitutionnel africain des années 1990 illustre, à
plus d'un titre, l'intérêt marqué au droit occidental par
les Etats africains. On ne saurait, à cet effet, ignorer les
ressemblances textuelles, les recopies d'articles de constitution, la reprise
de systèmes forgés ailleurs, les conditions d'élaboration
des nombreux régimes aboutissant à de véritables «
copier-coller »66. Nombre de lois fondamentales adoptées
au moment des indépendances apparaissent comme des textes miroirs de
constitutions en vigueur au nord et plus spécialement dans les anciennes
métropoles, reprenant, volontairement ou contraints et forcés,
tout un dispositif institutionnel, une série de dispositions juridiques
ou encore, ceci n'excluant pas cela, des modèles types
d'institutions.
Cette situation illustre la permanence du facteur externe qui
est un des traits de l'histoire africaine. Ces analyses, quelque peu
oubliées dans les années 1970 et 1980 à une époque
de remise en cause des régimes démocratiques et de rupture de
l'ordre constitutionnel existant, ressurgissent avec le déclenchement
des transitions démocratiques dans les années 1990.
L'Afrique est de nouveau marquée par un regain de
mimétisme, avec l'établissement de régimes plus proches
que jamais des modèles extérieurs, en réalité de
l'un d'entre eux, la démocratie libérale et pluraliste. Les
transitions ont gommé, éradiqué du constitutionnalisme
africain les particularités et originalités institutionnelles qui
s'étaient développées dans les années 1970. Il
existe encore un discours, légitimant, des élites des pays en
développement qui insistent sur la performance des modèles
exogènes sans analyser les structures sociales locales effectives.
Même si certains réduisent ce mimétisme à
l'appartenance à une même école en se fondant sur une
différence
66Du Bois de GAUDUSSON (J.), Le mimétisme
postcolonial, et après ?, Pouvoirs 2009/2, N° 129, p.
45-55.
d'interprétation et d'application67, les
textes juridiques africains sont largement une transplantation des
systèmes juridiques occidentaux. Cette influence étrangère
qui s'explique par l'universalité des valeurs démocratiques a
ignoré, dans bien de cas, les réalités socioculturelles et
ethniques de l'Afrique.
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