SECTION II : UNE ASSISTANCE ELECTORALE AUX LIMITES
SURMONTABLES
L'assistance électorale, quel que soit son degré
ou sa forme, est la résultante d'un compromis entre l'Etat hôte et
les partenaires impliqués dans le processus électoral. L'atteinte
des objectifs ultimes de cette pratique dépend de la volonté
réelle et de l'attitude des acteurs en jeu. Mais certaines
défaillances de l'assistance électorale constituent, dans
certains cas, un frein (§1) qu'il faut desserrer pour parfaire
l'efficacité de l'assistance électorale (§2).
PARAGRAPHE I : LES LIMITES DE L'ASSISTANCE ELECTORALE
L'absence de lisibilité et de cohérence est l'un des
grands maux qui minent l'efficacité de l'observation internationale des
élections. Cette carence se trouve aussi bien dans les normes qui
gouvernent la matière (A) que dans la valeur juridique des rapports et
recommandations (B).
A- Les limites techniques et organisationnelles
Les limites observées ici tiennent au cadre juridique
instituant l'observation des élections. La quasi inexistence et le
caractère disparate des normes internationales en matière
d'assistance électorale traduit les limites organisationnelles que l'on
peut relever. Ces limites organisationnelles se situent à deux
niveaux.
Sur le plan interne, l'observation internationale des
élections demeure confrontée, d'une part, à des obstacles
techniques relatifs à la mise en place des missions d'observation
internationales des élections et, d'autre part, à des obstacles
techniques liés à leur durée et à leur
financement.
S'agissant des obstacles techniques limitant l'impact des
missions d'observation internationale des élections sur le processus
électoral, on signalera les problèmes relatifs au nombre et
à la qualité des observateurs internationaux. Certains
partenaires internationaux impliqués dans la pratique de l'observation
internationale des élections ne dépêchent, en effet,
parfois que quelques observateurs pour le « monitoring » des
élections dans des Etats hôtes très vastes. Les quelques
observateurs se placent dans les bureaux de vote de la capitale et dans un ou
deux villages, et, par conséquent, ne peuvent pas observer et juger
valablement la sincérité d'un scrutin électoral. A ces
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limites s'ajoute le problème de la durée et du
financement. Comme le fait observer Bangui-Rombaye, « la
fragilité d'une mission d'observation vient aussidu fait qu'elle est
là pour constater un événement circonscrit dans le
temps,
sans forcément prendre en compte tous les
éléments en amont de l'élection proprement dite
(problèmes d'état civil, établissement des listes
électorales, informatisation de celles-ci, délivrance de cartes
d'électeurs, modalités d'accès aux médias)
»141.
Les observateurs internationaux en sont souvent réduits
à témoigner du seul déroulement du scrutin. Aussi le
financement des missions d'observation internationales des élections
demeure-t-il également une autre limite majeure du moment qu'il provient
des autorités politiques ou des bailleurs de fonds non impartiaux
vis-à-vis du processus électoral. La dérive de
l'observation internationale des élections au titre du critère
financier découle des satisfécits délivrés par
certaines missions d'observation en dépit de fraudes électorales
avérées et connues de tous. La prise en charge des observateurs
par le gouvernement du pays hôte risque d'entraver l'indépendance
de l'institution qui aurait bénéficié des faveurs des
autorités locales, et, partant, la crédibilité de la
mission d'observation.
Sur le plan externe, les limites proviennent tant de
l'insuffisante couverture du territoire de l'État hôte que de la
non-coordination des différentes équipes impliquées. En
effet l'état défectueux des voies de communication terrestre,
aérien et maritime réduit les capacités d'accès aux
zones rurales souvent enclavées des missions d'observation des
élections. Généralement, les membres des bureaux de vote
sont transportés sur les lieux par l'administration un jour avant le
scrutin. Ils ne sont récupérés que plusieurs jours
après la clôture du scrutin. Peu d'observateurs internationaux
accepteraient d'emprunter une pirogue pour atteindre l'autre rive du fleuve
où siège le bureau de vote. Or, leur absence sur les lieux laisse
le champ libre à toutes les manipulations électorales.
De même la non-maîtrise de certaines
spécificités socioculturelles et les barrières
linguistiques constituent des limites auxquelles il faut ajouter la
141Bangui-Rombaye (A), Tchad : Elections sous
contrôle cité par KOKOROKO (D.), Contribution à
l'étude de l'observation internationale des élections,
thèse, op. cit. p.423
diversité des missions d'observation car elle n'est pas
sans conséquences sur les remarques ou appréciations
portées sur le déroulement et la régularité des
scrutins. Ces différentes limites ont une incidence sur les rapports et
recommandations des observateurs dont la valeur juridique est discutable.
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