PARAGRAPHE II : UNE MEILLEURE GESTION DU
CONTENTIEUX
ELECTORAL
Le contentieux électoral est une opération qui
vise à régler les litiges mettant en cause la
régularité des processus électoraux. Il a pour but de
vérifier la régularité des actes et la validité des
résultats des élections. L'adhésion de l'Afrique au
principe de l'organisation d'élections disputées à
intervalles réguliers implique l'institution des mécanismes de
gestion du contentieux électoral. Mais le règlement du
contentieux électoral en Afrique peine à satisfaire l'opinion
commune (A) d'où la nécessité de le redynamiser (B).
A- Un contentieux électoral balbutiant
L'organisation d'un scrutin compétitif passe par la
maîtrise et la réussite de toutes les étapes du processus
électoral. Elles vont de la détermination du cadre normatif et
institutionnel, à la proclamation des résultats définitifs
en passant par l'établissement d'un fichier électoral fiable,
l'enregistrement des candidatures, la campagne, le vote, le
dépouillement et la transmission des résultats et la gestion du
contentieux éventuel.
L'élection pluraliste étant aujourd'hui
indispensable pour mesurer la légitimité des gouvernants, le
contentieux est incontournable pour assurer la crédibilité de la
consultation électorale. Mais comme le souligne Djedjro Francisco
MELEDJE, « en faisant une appréciation rétrospective du
contentieux électoral en Afrique, on est saisi par une impression de
vide et un fort sentiment de déception »118.
En effet sous le régime du parti unique, le contentieux
électoral était souvent préalablement vide du fait du
rôle du parti dominant ou simplement sans issue. Mais le renouveau
démocratique a replacé la question de la justice
constitutionnelle119 et le contentieux électoral en
particulier au coeur des débats politiques.
118 MELEDJE (D.) : Le contentieux électoral en Afrique,
Pouvoirs 2009/2, N° 129, pp. 139-155.
119 Voir HOLO (T.):Émergence de la justice
constitutionnelle, Pouvoirs 2009/2, N° 129, pp. 101- 114.
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Certes on a assisté à l'institution des
juridictions constitutionnelles en Afrique, qui en dehors du contrôle de
constitutionnalité, gère le contentieux
électoral120. Mais deux décennies après, le
règlement du contentieux en Afrique est, de loin, non satisfaisant.
Cette situation est liée à des difficultés structurelles
et conjoncturelles.
S'agissant des difficultés structurelles, elles
tiennent à la procédure ; par exemple comment comprendre le fait
pour le juge électoral au Nigeria ne se prononce que plus d'une
année et demie après l'élection présidentielle
d'avril 2007 sur la régularité de ce scrutin ? Dans ces
conditions et raisonnablement, Umaru Musa YAR'ADUA, donné comme
élu et exerçant depuis un temps très long les fonctions de
chef de l'État, ne peut plus voir son élection
invalidée.
Il est aussi question de la composition des juridictions faite
souvent en majorité des profanes du droit121. Parfois la
règle de la majorité et le secret de la
délibération sont de nature à rendre inefficace les
décisions de ces juridictions. Les dysfonctionnements conjoncturels
constituent une pesanteur qui influence les décisions en matière
électorale. « Dans une démocratie, disait Jürgen
HABERMAS, les citoyens doivent avoir la conviction que ce sont eux, par leurs
décisions électorales, qui conservent, à certains moments
cruciaux, le pouvoir d'influencer une politique par ailleurs
étatisée et encapsulée »122. Oui, en
Afrique, le juge électoral influence les résultats
électoraux le plus souvent pas sur les moyens évoqués mais
par sa gratitude à l'égard du pouvoir en place, dont il est
l'émanation. N'entend-on pas des détenteurs du pouvoir chanter
que la Cour leur est acquise ? Le constat fait par le Professeur Koffi AHADZI
selon lequel « en Afrique, l'expérience montre trop souvent que les
liens d'allégeance s'établissent entre l'organe politique et ceux
qu'il désigne »123 est vérifié.
Le contentieux électoral en Afrique est loin de trouver
un dénouement heureux eu égard à ces multiples
vicissitudes que présentent les institutions en charge de ce
contentieux.
120 Il s'agit souvent du contentieux des consultations
nationales : présidentielles, législatives et le referendum. Le
contentieux des élections locales est de la compétence des
juridictions ordinaires.
121 Voir art.100 de la Constitution du 14 octobre 1992 du Togo
122 HABERMAS (J.), Cité par DAKO (S.), thèse de
doctorat, op.cit. P.436
123 Voir K. AHADZI, Les nouvelles tendances du
constitutionnalisme africain : le cas des Etats d'Afrique noire francophone,
Cité par Simon DAKO, Thèse de doctorat, op.cit. P.438
123 Voir DUHAMEL- MENY (Y.), Cité par Simon DAKO,
Thèse de doctorat, op.cit.p.432
Il faut trouver des solutions adéquates pour redynamiser
le juge électoral, gage de la crédibilité et de la
fiabilité des consultations électorales.
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