A- Neutralité de l'administration
électorale
La création des commissions électorales en
Afrique a été motivée par le souci de neutralité et
de la transparence dans la conduite des opérations électorales,
gage d'une alternance politique pacifique. La cour constitutionnelle
béninoise a bien traduit cette aspiration dans sa décision du 23
décembre 1994 « [...] La
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création de la Commission Electorale Nationale
Autonome, en tant qu'autorité administrative indépendante, est
liée à la recherche d'une formule permettant d'isoler, dans
l'administration de l'Etat, un organe disposant d'une réelle autonomie
par rapport aux gouvernements, aux départements ministériels et
au Parlement, pour l'exercice d'attributions concernant le domaine sensible des
libertés publiques, en particulier des élections honnêtes,
libres et transparentes [...] Elle est une étape importante de
renforcement et de garantie des libertés publiques et des droits de la
personne ; qu'elle permet, d'une part, d'instaurer une tradition
d'indépendance et d'impartialité en vue d'assurer la transparence
des élections, et, d'autre part, de gagner la confiance des
électeurs, des partis et mouvements politiques ».
Si ces commissions ont connu des succès dans certains
pays111, elles ont failli dans d'autres du fait des limites
structurelles et conjoncturelles évoquées plus haut notamment
l'insuffisante étendue de leurs compétences et leur
incapacité à les exercer, l'imprécision de leurs missions,
leur dépendance financière et la politisation de leur
composition. Les hommes politiques africains doivent tirer les
conséquences de ces dysfonctionnements pour prendre des mesures
idoines.
Il s'agit d'une part d'attribuer la conduite des
opérations électorales exclusivement à ces institutions
car leur caractère ad hoc et le partage des attributions avec d'autres
institutions portent atteinte à l'efficacité de ces commissions
électorales. Leur rôle ne doit pas être réduit au
contrôle ou à la supervision des opérations
électorales112.
D'autre part, l'autorité administrative électorale
doit être une institution
permanente à l'instar des pouvoirs exécutif,
législatif et judiciaire ou encore de la juridiction constitutionnelle
et de l'organe de régulation des médias, etc. Autrement dit, les
membres de l'institution seront désignés pour un mandat dont la
durée doit être légalement voire constitutionnellement
déterminée. La pérennité de l'administration
électorale offre des avantages : d'abord elle favorise le
professionnalisme des membres par la capitalisation des
111 Au Bénin et au Mali par exemple.
112 Au Sénégal, au Gabon et au Cameroun,
malgré la création des commissions électorales, c'est le
Ministère de l'Intérieur qui organise des élections et ces
commissions sont chargées de la supervision uniquement.
expériences, ensuite elle favorise la bonne
conservation du matériel électoral non consomptible capable de
servir pour plusieurs consultations électorales et enfin
l'administration électorale permanente offre l'avantage de garantir la
fiabilité des listes électorales car cela permettra non seulement
d'en assurer l'informatisation et la permanence mais aussi de les apurer
régulièrement afin de les rendre toujours aptes à servir
en cas de consultations électorales.
Le Togo et le Sénégal ont déjà
opté pour des commissions permanentes. Les membres sont nommés
pour un mandat déterminé mais qui ne siègera que lors
d'une consultation électorale. Entre deux échéances, la
gestion sera assurée par un Secrétariat Administratif Permanent
(SAP).
La crédibilité et la sincérité des
scrutins viendront de la neutralité et la permanence de l'administration
électorale mais encore faut-il que les acteurs politiques changent de
comportement.
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