La loi du 12 juillet 2010, portant engagement national pour l'environnement et la responsabilité des constructeurs( Télécharger le fichier original )par Florence COUTURIER- LARIVE Université Aix- Marseille III - Master II Droit immobilier public et privé 2010 |
Chapitre II- L'extension de la notion de destination de l'ouvrage243. Une extension prétorienne relayée par la Loi Grenelle 2- C'est un constat indéniable : la construction jurisprudentielle de la notion de destination s'est effectuée dans le sens d'une conception extensive, faisant entrer dans le champ de la garantie spécifique des constructeurs des désordres qui auraient pu ne relever que de la qualification de défauts de conformité ou de celle de désordres intermédiaires483(*). Là où l'on aurait imaginé que les limites de cette extension auraient pu être atteintes avec l'intégration de l'essence de l'ouvrage484(*) dans l'acception de la destination, force est de constater que la Loi du 12 juillet 2010 repousse ces limites encore un peu plus loin que ne l'ont fait les juges et ce, tant si l'on se réfère à l'esprit de cette Loi (Section I), qu'à sa lettre ( Section II). Section I- En référence à l'esprit de la Loi du 12 juillet 2010244. Vocation universelle de la sauvegarde écologique- Par « esprit » de la Loi du 12 juillet 2010, il convient d'entendre l'intention qu'avait le législateur lors de la conception de ce texte. Si les conventions internationales et le droit européen ne sont pas étrangers à l'élaboration en droit interne de principes légaux à vocation environnementale485(*), encore faut-il, au delà de l'obligation de le faire pour les Etats membres, que la volonté réelle de transposition existe. C'est le cas en matière de sauvegarde écologique. En effet, la motivation réside dans une préoccupation qui ne concerne pas seulement une catégorie particulière de la population, mais qui concerne bel et bien la planète tout entière. C'est ainsi que s'est inscrite dans la Loi la nécessité de forcer l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments. Et si ce principe impératif de sauvegarde écologique est décrit comme étant « d'intérêt national » (§2), il est intéressant d'avoir confirmation de sa vocation universelle à travers un aperçu du droit comparé (§1). §1- La performance énergétique des bâtiments, un principe impératif de sauvegarde écologique en droit comparéA- En Belgique245. Le privilège de la construction passive - En Belgique, la politique énergétique privilégie le passage au bâtiment passif, plutôt qu'au simple bâtiment éco performant, ce qui augmente d'autant les exigences liées à ce type de construction. Pour ce faire, les autorités publiques ont prévu des mesures incitatives, mais également des sanctions. 246. Bâtiment passif définition- La définition du bâtiment passif qu'offre la Belgique vise une consommation de 15 kWh par m² par an en besoin de chauffage, de 120 kWh/m²/an d'énergie primaire pour tous les postes de consommation, électrodomestique compris, et tolère des fuites d'air représentant un orifice plus petit qu'un dixième de feuille de papier format A4. Ces trois exigences principales sont celles qui doivent répondre pour un bâtiment qui prétendrait au label d'origine allemande «Passivhaus ». 247. Mesures incitatives- En ce qui concerne les mesures incitatives que la Belgique a adoptées pour la construction de bâtiments labellisés passifs, la région bruxelloise offre des subventions spécialement dédiées aux bâtiments passifs, actuellement de l'ordre de 100 Euros par m², plafonnés à 200 000 Euros et de 1 000 000 d'Euros pour les établissements recevant du public. Paradoxalement, alors que la région Wallonne n'octroie aucune subvention, il se compte autant de projets passifs en Wallonie qu'en région bruxelloise. Au niveau fédéral, il existe une déduction d'impôts de 1500 euros sur 10 ans pour les particuliers occupant un logement « zéro énergie » (consommation de chauffage entièrement comblée par une production locale). 248. Labels et certifications- En ce qui concerne les labels et certifications, c'est la certification anglo-saxonne Breeam qui connaît un développement important en Belgique du fait que l'exigence de son standard se combine en adéquation avec une labellisation passive. Il existe cependant des bâtiments certifiés Leed Platine, qui est la certification américaine la plus exigeante, mais qui s'avère peu fiable en matière énergétique. Enfin, la certification française HQE n'est pas usitée car elle se trouve être, contrairement au Breeam qui ne fixe que des objectifs, un système simplement prescriptif. En outre, les belges voient un avantage dans l'implantation internationale de la certification anglo-saxonne Breeam, présente par exemple en Australie et au Japon. 249. Sanctions- Avant le 1er janvier 2011, les dispositifs belges étaient incitatifs, mais un accord du gouvernement de la région bruxelloise en application depuis le 1er janvier 2011 prévoit que tous les bâtiments publics devront être passifs. Cet accord prévoit en outre qu'à partir de l'année 2015 toute nouvelle construction devra également être passive, sous peine d'une amende de 62 000 Euros et 5 mois de prison486(*). * 483 Supra, n°91 et 101 * 484 Supra, n° 241 et s * 485 Supra, n°1 et s * 486 V : S. Moreno Vacca, "A Bruxelles, si on ne construit pas passif, on risquera bientôt 5 mois d'emprisonnement", Propos recueillis par E. Leysens, http://www.lemoniteur.fr/, L'actualité en continu et les services de la construction, 21 déc. 2010 |
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