La capacité de la femme mariée en matière du travail en droit français et en droit congolais( Télécharger le fichier original )par Yves-Junior MANZANZA LUMINGU Université de Kinshasa - Licence en Droit 2006 |
§2. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmesLa CEDEF a été adoptée le 18 décembre 1979 par l'Assemblée Générale des Nations Unies. Elle est entrée en vigueur en tant que traité international le 3 septembre 1981 après avoir été ratifiée par vingt pays. Nous parcourrons son historique avant d'analyser son contenu. A. Historique de la CEDEFLa CEDEF a marqué l'aboutissement de plus de trente années de travail de la Commission de la Condition de la femme, organe fondé par les Nations Unies en 1946 (28(*)) pour examiner la situation des femmes et promouvoir leurs droits. Les travaux de la Commission ont contribué à mettre en évidence tous les domaines dans lesquels les femmes se voient dénier l'égalité avec les hommes et s'est inspirée pour cela des textes internationaux fondamentaux dont la charte des Nations Unies, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, les pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, etc. Cette Commission s'attaqua donc dès sa création aux inégalités existant au préjudice des femmes dans tous les domaines du droit. Par ses résolutions et recommandations, elle influença sans conteste les droits nationaux dans le sens de l'égalité de sexes ; et c'est à son initiative que l'Assemblée Générale adopta à l'unanimité le 7 novembre 1967 la déclaration sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, déclaration qui fut à la base de la CEDEF. Celle-ci est un instrument juridique fondamental le plus complet et occupe une place importante parmi les traités internationaux relatifs aux droits de la personne humaine car elle rappelle les droits inaliénables des femmes. B. Contenu de la CEDEFL'esprit de la Convention s'inspire des principes fondamentaux des Nations Unies qui proclament l'égalité des droits entre hommes et femmes. En analysant en détail la signification de la notion d'égalité et les moyens de l'atteindre, la Convention, en plus d'être une déclaration internationale des droits des femmes, énonce aussi un programme d'action pour que les Etats parties garantissent l'exercice de ces droits. Dans son préambule, la CEDEF reconnaît explicitement que « la discrimination généralisée contre les femmes existe toujours » et souligne qu'une telle discrimination « viole les principes de l'égalité des droits et du respect de la dignité humaine » Elle réaffirme le principe de l'égalité en demandant aux Etats parties de prendre « toutes les mesures appropriées, y compris des mesures législatives, pour assurer le plein épanouissement et le progrès de femmes en vue de leur garantir l'exercice et la jouissance des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur la base de l'égalité avec les hommes » Divisée en six parties et en trente articles dont quatorze énonçant le programme d'action pour l'égalité, « la convention expose en détail les droits civiques et le statut juridique des femmes, mais porte aussi - et c'est cela qui la différencie en particulier des autres traités sur les droits de l'homme - sur la procréation ainsi que sur les incidences des facteurs culturels sur les relations entre les hommes et les femmes » (29(*)). Dans son approche méthodologique, la CEDEF a choisi de couvrir trois aspects de la situation des femmes et envisage l'égalité au foyer, face à l'emploi et sur la scène politique.
L'étude de l'émancipation économique des femmes dévoile l'existence d'un immense potentiel, qui reste trop souvent inexploité. Au travail, les femmes sont souvent victimes de discrimination et peuvent être tenues à l'écart des emplois les mieux rémunérés. Pourtant, le choix du salarié par l'employeur doit s'effectuer sans discrimination ni de race, ni de culture, ni d'opinion ou de croyance religieuse, pas davantage de sexes. Ainsi, les Etats parties à la CEDEF s'engagent à prendre toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans le domaine de l'emploi, afin d'assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, les mêmes droits en particulier (31(*)): § le droit au travail en tant que droit inaliénable, § le droit aux mêmes possibilités d'emploi, y compris l'application de mêmes critères de sélection, § Le droit au libre choix de la profession et de l'emploi... Abondant dans le même sens, ARSEGUEL et REYNES, soutiennent que « cette égalité ne peut être entendue non comme une identité sémantique, mais plutôt comme la recherche volontaire d'un meilleur accès à l'emploi pour les femmes et d'un plus juste équilibre dans l'emploi entre hommes et femmes » (32(*)). En R.D.C. l'emploi formel reste en grande partie dominé par la présence masculine dans presque tous les domaines sauf dans le secteur de la santé (infirmière) et les services traditionnellement féminins (secrétaires, réceptionnistes, hôtesses, caissières, opératrices de saisie, agents de marketing...). Quant à celles qui travaillent dans les autres domaines, elles occupent rarement des postes de prise de décision et de gestion (33(*)).
La participation des femmes à la vie politique est l'un des objectifs du millénaire pour le développement. Cette participation est essentielle pour promouvoir l'égalité des sexes, donner aux femmes des moyens d'action et faire respecter leurs droits. Ainsi, les derniers obstacles qui s'opposent à leur présence sur la scène politique doivent être levés, et les femmes doivent être encouragées et soutenues par leurs formations politiques lorsqu'elles décident de présenter leur candidature. En effet, les disparités demeurent encore remarquables entre hommes et femmes dans les institutions gouvernementales, une situation qui est due à plusieurs facteurs. Notons pour finir que malgré d'importants progrès réalisés depuis l'adoption de la CEDEF par l'Assemblée Générale des Nations Unies en 1979, la discrimination basée sur le sexe demeure omniprésente dans toutes les régions du monde. Il reste donc beaucoup à faire pour s'assurer que la discrimination n'empêche pas les femmes de travailler de manière productive. Aussi, dans l'avant-propos du Rapport de l'UNICEF déjà évoqué plus loin, la Directrice Générale de cette agence des Nations Unies, Ann M. VENEMAN, fait-elle savoir que « déclarations, conventions, objectifs, tout cela ne suffit pas. Nous devons impérativement passer du stade de belles paroles à celui de l'action concrète (....) Le jour où les femmes et les filles auront les mêmes possibilités que les hommes et les garçons de subvenir à leurs propres besoins sur le plan économique et de vivre à l'abri de la violence et de la discrimination sexistes, l'égalité de sexes ne sera plus une vaine promesse (...) » (34(*)). Signalons pour finir que concernant spécifiquement la capacité professionnelle de la femme mariée, la situation diffère d'une législation à une autre. Nous allons dans le chapitre qui suit aborder la question de la capacité de la femme mariée en matière du travail en droit français et en droit congolais, à travers une approche comparative. * 28 Résolutions du 16 et du 18 février 1946 du Conseil Economique et Social * 29 http//www.cedaw/fr.com
* 31 Article 11, al 1, literas a), b) et c) de la CEDEF * 32 ARSEGUEL, A. et REYNES, B., « L'égalité entre hommes et femmes dans le droit français », in Actes du Colloque européen, vol. 2, Louvain-la-Neuve, 1985, pp. 118-141. * 33 Ministère du Plan, Document de la stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté, Kinshasa, 2006, pp. 68-70 * 34 UNICEF, Op. cit., p. VII |
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