IV.2 Questions à propos de Bâle II
En imposant un niveau minimum de fonds propres aux banques et en
exigeant ainsi une couverture accrue des actifs à risque, l'Accord de
Bâle de 1988 -- avec le
ratio de solvabilité ou ratio « CooKe » - a
encouragé les banques à faire sortir leurs activités
risquées de leur bilan. En d'autres termes, l'essor des véhicules
d'investissements structurés (structured investment vehicles --
SIV) et des conduits n'est pas tout à fait le fruit du hasard. Par
construction, la création de ces entités hors- bilan a permis aux
banques de réduire le montant de capital associé à un
profil de risque donné. En outre, elle a amoindri la transparence des
activités risquées en les soustrayant à l'examen des
instances de réglementation.
Bâle II, que les autorités de contrôle
bancaire internationales ont élaboré dans le but de
remédier à certaines de ces carences, est entré en vigueur
à compter du premier trimestre de 200829. Dans le cadre de
cet accord, les instances de réglementation vont prendre en compte le
risque de l'intégralité du portefeuille d'une banque, y compris
les créances conditionnelles, lors du calcul du niveau de fonds propres
requis. Cette nouvelle approche suppose que les banques utilisent des
modèles de portefeuilles pour évaluer leur risque. Lorsque les
circonstances ne permettent pas une telle modélisation, les banques
doivent calculer leurs besoins de fonds propres à partir des notations
de crédit attribuées à leur portefeuille obligataire.
Avec ce régime, elles devraient être moins
incitées à transférer leurs activités à
risque dans un véhicule ad hoc ou un conduit, étant
donné que la possibilité d'un retour de la position au bilan est
prévue dans l'exercice de modélisation. Habituellement, les
banques peuvent partir du principe qu'une fois vendu, un prêt est
définitivement sorti de leurs comptes. Toutefois, dans la pratique, les
émetteurs peuvent se sentir contraints de racheter des titres qu'ils
avaient auparavant vendus pour protéger leur réputation.
Selon David Dodge, ancien gouverneur de la Banque du Canada,
il faut relever le niveau général des exigences en fonds propres
pour compenser ce biais (Dodge, 2007). Cependant, Les normes comptables en
vigueur continuent d'autoriser les banques à utiliser leurs propres
modèles internes pour procéder à cette évaluation.
On
29 Cf. Bureau du surintendant des institutions
financières Canada
peut donc douter de la volonté des
établissements à pondérer correctement les risques de
baisse. Même les modèles les plus sophistiqués ont tendance
à sous-estimer la probabilité de résultats extrêmes
(probabilité de pertes extrêmes). Ils sous-estiment la
corrélation des rendements des différents actifs en
période de forte volatilité30.
Ce faisant, pour faire face à ces problèmes, Une
option consisterait à revenir à Bâle I, régime dans
lequel les autorités plaçaient les différents actifs dans
différentes tranches de risque et définissaient le niveau de
fonds propres requis en conséquence. Il serait également possible
de revenir à Bâle 1,5, variante de Bâle I dans laquelle les
autorités étaient plus attentives aux actifs et passifs
conditionnels et hors-bilan et les provisionnaient. À l'autre
extrême, les instances de réglementation pourraient admettre
l'impossibilité de résoudre ces problèmes et renoncer aux
exigences de fonds propres au profit de la discipline du marché. Elles
pourraient demander aux banques d'émettre de la dette subordonnée
dans l'espoir que ce soient les porteurs de titres de dette qui surveillent
attentivement les décisions d'investissement et de gestion des banques,
comme le recommande Calomiris (2007).
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