II. CDO ET GESTION DU RISQUE
II.1 CDO : un instrument de redistribution de risque de
crédit
Les CDO synthétiques permettent aux investisseurs de
prendre des positions sur des signatures absentes du marché obligataire.
Fondamentalement, ils contribuent ainsi à la complétude du
marché du crédit tout en facilitant la diversification des
portefeuilles. Ceci est particulièrement vrai dans la zone euro,
où le marché obligataire corporatif est concentré
sur un petit nombre de secteurs (automobile, télécommunications)
qui sont de ce fait souvent surpondérés dans les
portefeuilles.
Des acquisitions ciblées de tranches de CDO
synthétiques sont ainsi le moyen d'obtenir des expositions mieux
équilibrées et plus diversifiées. Ce qui permet de bien
calibrer la part d'une signature ou d'un secteur donné au sein du
portefeuille.
En autorisant des expositions ad hoc sur un spectre
élargi de signatures, les CDO peuvent également se
révéler très utiles pour la gestion de portefeuilles
bancaires. Ceux-ci ne sont pas naturellement diversifiés, tels que ceux
des banques régionales ou de banques spécialisées dont les
risques se concentrent sur certains secteurs d'activité. Ces
établissements peuvent ainsi déterminer, à l'aide de
modèles internes, les signatures à même d'assurer une bonne
diversification de leur portefeuille et investir, dès lors, dans des CDO
référençant les signatures en question. Dans le même
ordre d'idées, ils peuvent aussi émettre des CDO de bilan afin de
se défaire de risques sur des secteurs ou signatures auxquels ils
peuvent s'estimer surexposés.
Partant de l'analyse de cette caractéristique des CDO, il
importe de s'attarder sur les risques particuliers qui sont liés
à ce produit.
II.2 Les risques spécifiques
II.2.1 Risque de corrélation
Il faut noter qu'il est délicat d'évaluer le
risque de crédit d'un portefeuille englobant diverses signatures que
celui se rapportant à des entreprises prises individuellement. En effet,
il faut tenir compte du fait que le défaut d'une signature donnée
peut s'accompagner, dans des proportions variables, de défauts d'autres
signatures présentes au sein du portefeuille. Cette problématique
revêt bien évidemment toute son acuité dans le cas des CDO
dont la performance des différentes tranches dépend largement du
degré de corrélation des défauts susceptibles de survenir
au sein du portefeuille sous-jacent. Toute analyse du risque des tranches d'un
CDO requiert ainsi une analyse en deux étapes :
· Dans un premier temps, la détermination de la
probabilité de défaut de chaque signature au sein du portefeuille
sous-jacent (le plus souvent à l'aide de la notation),
· Puis dans un second temps, l'estimation, à
l'aide de modèles et d'hypothèses ad hoc sur le niveau
de la corrélation des défauts, de la distribution de pertes
potentielles du portefeuille.
De fait, selon les hypothèses retenues quant au
degré de corrélation des défauts, le profil de la
distribution de pertes potentielles sur un portefeuille sous-jacent varie
considérablement (cf. graphique ci-après).
Figure 10 : Niveau de corrélation et distribution de
perte d'un portefeuille de référence
d'un CDO
Source : Merrill Lynch
Pour une corrélation faible, les signatures
sous-jacentes ont tendance à évoluer de manière
indépendante. La distribution est centrée autour d'un niveau
moyen de pertes relativement faible. En revanche, un degré
élevé de corrélation se traduit par une distribution
asymétrique avec une augmentation de la probabilité de situations
extrêmes (à la limite, soit aucune signature ne fait
défaut, soit toutes les signatures font défaut
concomitamment).
Compte tenu de ce phénomène, le
découpage du CDO, selon un ordre qui concentre le risque sur les
tranches les plus subordonnées, aboutit à des effets
contrastés de la corrélation des défauts sur la
performance des différentes tranches. Chaque tranche -- senior,
mezzanine, equity -- présente ainsi une sensibilité
différente à cette corrélation. En se
fondant sur leurs hypothèses de corrélation et leurs
modèles, les agences de notation déterminent le niveau de
protection requis pour que la tranche senior d'un CDO obtienne une
note AAA. Ceci est un aspect clé du montage, étant entendu que
toute erreur d'estimation de la corrélation des défauts peut
aboutir à des structures inadaptées et exposées à
des dégradations de notes rapides et brutales.
Au-delà des risques découlant de la composition
de leur portefeuille de référence, les CDO présentent
d'autres risques relatifs au montage utilisé pour transférer les
revenus et/ou le risque de crédit des actifs sous-jacents aux
investisseurs.
|