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Le gage-espèces

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par Fouad HAMIDI
Université Paris I - Master 2 Recherche Droit patrimonial approfondi 2006
  

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CHAPITRE II : LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTIES AU MOMENT DE LA REALISATION DU GAGE-ESPECES

La réalisation du gage-espèces dépend de la figure choisie. Dans tous les cas, elle est facilitée par la nature pécuniaire de la substance de l'universalité. Elle est simplifiée tant en présence d'un nantissement (Section I) que d'une sûreté fiduciaire (Section II).

SECTION I / LA REALISATION DU GAGE-ESPECES EN PRESENCE D'UN NANTISSEMENT

En présence d'un nantissement, la sûreté se réalise par l'attribution en propriété de l'universalité. Après avoir présenté les conditions de cette attribution (sous-section I), nous recherchons sa nature juridique (sous-section II).

§ 1 : Les conditions de l'attribution en propriété de l'assiette

L'attribution du nantissement peut être conventionnelle (I) ou judiciaire (II).

I) La réalisation du gage-espèces en présence d'un pacte commissoire

La jurisprudence antérieure (A) comme le nouveau droit des sûretés (B) permet aux parties de conclure un pacte commissoire afin de réaliser la sûreté.

A) La validité du pacte commissoire avant la réforme des sûretés

Dans l'état antérieur à la réforme du droit des sûretés, le Code civil prévoyait un principe de prohibition du pacte commissoire (1). Mais ce principe était écarté en matière de gage-espèces en raison de son objet (2).

1) Le principe de prohibition du pacte commissoire

Avant la réforme, l'article 2078 du Code civil disposait que : « Le créancier ne peut, à défaut de payement, disposer du gage : sauf à lui à faire ordonner en justice que ce gage lui demeura en payement et jusqu'à due concurrence, d'après une estimation faite par experts, ou qu'il sera vendu aux enchères. Toute clause qui autoriserait le créancier à s'approprier le gage ou à en disposer sans les formalités ci-dessus est nulle ».

167. La raison d'être de la prohibition du pacte commissoire : la protection du constituant - La justification de cette prohibition était la protection du débiteur. En effet, le constituant accordant le plus souvent un gage en même temps qu'il bénéficiait d'un crédit, on craignait qu'un « prêteur sans scrupules171(*) » (le créancier) ne profite de la situation face à un débiteur « aux abois 172(*)» pour imposer la stipulation d'un pacte commissoire.

168. Le tempérament : la validité du pacte commissoire postérieur à la conclusion du contrat de gage - Ainsi, dans cet esprit, il était permis de stipuler un pacte commissoire après la conclusion du contrat de gage173(*), car dans cette situation, le constituant pouvait avoir un consentement libre et éclairé. Mais ce n'était pas la seule raison. La prohibition du pacte commissoire est aussi justifiée par le souci d'éviter aux parties de procéder à l'évaluation de l'objet remis en garantie. Cette justification était aussi motivée par le souci de protection des intérêts du débiteur : en soumettant l'évaluation du bien affecté en garantie au contrôle judiciaire - qui procédera à la nomination d'un expert - le débiteur était protégé contre un créancier désirant sous-évaluer le bien concerné. C'est cette dernière raison d'être qui justifie l'écart de la prohibition du pacte commissoire lorsque l'objet garanti consiste dans une somme d'argent.

2) L'écart de la prohibition en matière monétaire

169. Une validité dès la conclusion du contrat de gage - En matière de gage-espèces, la prohibition du pacte commissoire est écartée en raison de la nature de son objet : la monnaie. Contrairement à tous les autres biens, sa valeur ne dépend pas de la volonté des particuliers mais de celle de l'Etat ou aujourd'hui de la Banque Centrale Européenne. La monnaie est un bien dont la valeur se confond avec sa substance. L'unité de paiement n'est pas évaluée au gré des particuliers mais d'une instance supérieure. Dès lors le problème de la fixation de la valeur du gage - justifiant la prohibition du pacte commissoire - ne se pose pas.

170. La validation jurisprudentielle de la validité du pacte commissoire en matière de gage-espèces - C'est en ce sens que par un arrêt du 4 mai 1993, la 3ème chambre de la Cour d'appel de Paris174(*) avait admis la validité du pacte commissoire en matière de gage-espèces. Selon cette juridiction : « ...la prohibition du pacte commissoire a pour but d'éviter la spoliation du débiteur qui a affecté à la garantie de sa dette un gage d'une valeur pécuniaire supérieure et prend tout son sens lorsque se pose le problème de l'évaluation du gage ; Que par sa nature, le gage constitué en espèces ne soulève aucune difficulté quant à la fixation du juste prix et rend donc inutiles les deux modes classiques de réalisation du gage ». Sur cette motivation les juges du fond admettent la validité du pacte commissoire (conclu dès la conclusion du contrat de gage) : « Que les dangers du pacte commissoire étant en l'espèce inexistants, la clause par laquelle IHM (le constituant) a autorisé la banque Worms (le créancier gagiste) à s'attribuer à due concurrence du montant de la somme impayée au titre du prêt dans la limite de la garantie conférée est valable ».

Cette décision a été validée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation par un arrêt du 9 avril 1996 : « N'est pas prohibée par l'article 2078 du Code civil la stipulation d'attribution d'un gage constitué en espèces par le créancier, à due concurrence du défaut de paiement à l'échéance ».

171. Conclusion - Avant la réforme des sûretés, le pacte commissoire était valable en matière de gage-espèces. Son objet permettant une évaluation aisée de l'objet gagé, la justification du pacte commissoire n'avait plus à s'appliquer. Toutefois, l'attribution de l'objet gagé avait une limite : le montant de la dette garantie. Tant dans l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris que celui de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, les juges prennent le soin de préciser que cette attribution conventionnelle doit se faire « à concurrence du montant de la somme impayée ».

B) La validité du pacte commissoire dans le nouveau droit des sûretés

Le nouveau droit des sûretés a admis, à titre de principe, la validité du pacte commissoire (1). Sa mise en oeuvre est soumise à des formalités, dont certaines doit être écartées en raison de la nature juridique de l'objet gagé (2). Cette attribution aura lieu à concurrence de la valeur de la dette garantie (3).

1) La validité de principe du pacte commissoire

L'ordonnance du 23 mars 2006, transposant une proposition du Projet GRIMALDI, a inséré un nouvel article 2348 ainsi rédigé : « Il peut être convenu, lors de la constitution du gage (nous soulignons) ou postérieurement, qu'à défaut de l'exécution de l'obligation garantie le créancier deviendra propriétaire du bien gagé ». Dorénavant, le pacte commissoire, qu'il soit conclu au jour de la constitution du gage ou postérieurement, est valable. Cette disposition nouvelle n'apporte pas une grande nouveauté en matière de gage-espèces. La validité du pacte commissoire étant déjà admise dans le droit antérieur. La mise en oeuvre de ce pacte est soumise à des formalités.

2) La mise en oeuvre du pacte commissoire

172. L'inutilité des formalités de mise en oeuvre du pacte commissoire en matière de gage-espèces - La réforme, dans un souci de protection du constituant, impose une formalité : la fixation objective175(*) de la valeur du bien gagé. Aux termes de l'article 2348 alinéa 2 : « La valeur du bien est déterminée au jour du transfert par un expert désigné à l'amiable ou judiciairement, à défaut de cotation officielle du bien sur un marché organisé au sens du code monétaire et financier. Toute clause contraire est réputée non écrite ». En théorie, les parties à un nantissement de somme d'argent devront donc faire appel à un expert pour fixer la valeur de la « somme d'argent ». A notre avis, cette formalité devra être écartée concernant un nantissement de somme d'argent. Comme nous l'avions souligné précédemment, la valeur des unités monétaires contenues dans l'universalité est indépendante de la volonté des parties. Cette valeur est fixée par la Banque Centrale Européenne. Dès lors, la valeur est fixée de manière objective. Il serait dès lors inutile de respecter les formalités prévues.

3) L'étendue de l'attribution conventionnelle

L'attribution conventionnelle se fait à hauteur de la dette garantie (article 2348 alinéa 3 C.civ.). La loi prévoit deux solutions lorsque la valeur du bien gagé est supérieure au montant de la dette garantie. Soit le créancier devra verser la différence au constituant. Soit l'excédent sera consigné s'il y a d'autres créanciers gagistes. La question qui se pose est de savoir la nature de la restitution du surplus. Est-ce la restitution de l'universalité ou une simple dette de sommes d'argent ?

173. Une appropriation des éléments contenus et une restitution de l'universalité - Dans un souci de protection du constituant, il serait préférable d'analyser la mise en oeuvre du pacte commissoire de la manière suivante. Le créancier s'approprie non pas l'universalité dans son ensemble mais les éléments contenus à hauteur de la dette garantie. En d'autres termes, il deviendra propriétaire d'une certaine quantité d'unités monétaires à hauteur des unités de paiement dues. Par la suite, soit le créancier restitue l'universalité s'il est le seul à avoir un droit de préférence dessus, soit l'universalité est consignée pour les autres créanciers gagistes. Par exemple, en matière de nantissement de compte bancaire, le créancier prendra les sommes d'argent contenues dans le compte en laissant le compte au constituant. L'extinction du contrat de gage par l'appropriation aura aussi l'avantage de permettre au constituant de revendiquer l'universalité ainsi diminuée.

* 171 M. CABRILLAC & Ch. MOULY, Droit des sûretés, 7ème éd., n°524, p.444

* 172 Ph . SIMLER & Ph. DELEBECQUE, Les sûretés - La publicité foncière, 4ème éd., n°616, p.511

* 173 Cass.com., 12 janvier 1965, Gaz. Pal.1965.1.372 : « La prohibition ne s'applique pas à une convention conclue postérieurement à la constitution du gage ». V. dans le même sens : Cass.civ., 25 mars 1903, D.1904, 1, 273 - Cass. 1ère Civ., 17 nov. 1959, Bull.civ., I, n°480, Gaz. Pal. 1960, 1, 62 ; D.1960, somm.37 - Cass.com., 13 janvier 1965, JCP 1966.II.14469, note R.D.M.

* 174 CA Paris, 4 mai 1993, « Société Immobilière Hôtelière Montparnasse c/ Banque Worms », Bull. Joly, 1993, § 251, p.861, obs. Ph. DELEBECQUE

* 175 Par une fixation objective, nous entendons une fixation indépendante de la volonté des parties. En effet, la valeur du gage est fixée soit par un tiers (« expert désigné à l'amiable ou judiciairement ») soit par le marché (« cotation officielle du bien sur un marché organisé...)

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