Quel questionnement philosophique sur les conflits en Afrique ?( Télécharger le fichier original )par Emmanuel MOUTI NDONGO Grand seminaire - Fin cycle de philosophie 2006 |
III.7.3. S'éduquer à la vertu et aux valeursLe déficit de vertu est observable chez l'Africain48(*). Aussi est-il porté à agir de façon excessive et passionnée. Cette carence convie à une éducation à la vertu prise ici dans le sens d'une disposition habituelle à réaliser des actes moraux, à vouloir le bien et à le faire. Humainement, l'Africain doit s'éduquer à pratiquer les quatre vertus cardinales que sont : La tempérance, la prudence, la force et la justice49(*). Il devra davantage s'approprier la prudence qui consiste dans la force de l'esprit et dans la connaissance de la vérité. Celle-ci lui permettra d'acquérir la prévoyance par laquelle il peut éviter les dangers de la vie. La justice, première vertu sociale devra aussi être pratiquée. Elle permettra à l'Africain de se décentrer de lui-même. Elle implique en fait toutes les autres vertus sur lesquelles elle exerce une fonction ordonnatrice. Celle-ci aidera l'Africain à reconnaître jusqu'à quel point il est légitime de respecter autrui dans ses idées, ses sentiments, sa liberté et sa propriété. Par l'exercice de la justice, l'homme d'Afrique saura apprécier les mesures générales qui s'impose à tous et permettent de bien attribuer les avantages communautaires. Au niveau politique, l'éducation à la vertu doit cultiver en l'Africain « cet amour demandant une préférence continuelle de l'intérêt public au sien propre »50(*). Cet amour est le principe de la république et de la démocratie. Cela exige de l'Africain une prédilection pour l'Etat et non pour son propre salut. Ceci n'est pas facile car il est question de renoncer à soi-même pour faire des actions utiles aux autres. En outre, l'homme africain devrait s'éduquer à la valeur suprême et sacrée qu'est la vie. Celle-ci est ce par quoi la personne humaine arrive dans le monde et existe. Par elle l'homme se réalise et s'accomplit dans l'histoire de façon singulière. A ce titre, il faudrait savoir que la vie est précieuse et revêt un caractère inviolable. Il s'agit de prendre conscience que « la vie est une caractéristique fondamentale de la condition sociale de la personne humaine. Sans elle, la famille, la société (...) n'existeraient pas (...). Elle est tout et sans elle rien n'est »51(*). Il est dès lors question de cultiver la vie, de la faire épanouir en évitant de l'agresser et de l'annihiler. La nature ayant horreur du vide, la vie apparaît comme cette « victoire de l'être sur le néant »52(*). Loin de la supprimer, il faut pour l'Africain apprendre à perpétuer la vie. L'Africain est convié à sortir de lui-même. Se transcender revient pour lui à dépasser cet amour exclusif et excessif qu'il a de sa personne. C'est la voie pour ne plus subordonner l'intérêt de l'autre au sien propre et de juger tout de ce seul point de vue. Cette tâche est individuelle mais fait aussi appel à une oeuvre communautaire et collective au niveau identitaire. * 48 Aussi bien de la part
des dirigeants que des citoyens africains, nous constatons qu'il manque cet
habitus * 49 Pour ce qui est de notre travail, seules la prudence et la justice nous intéressent. * 50 C. DE MONTESQUIEU, De l'esprit des lois, Paris, Classiques Larousse, p. 251. * 51 J. MBARGA, Op. cit., pp. 33-34. * 52 Id., p. 34. |
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