Quel questionnement philosophique sur les conflits en Afrique ?( Télécharger le fichier original )par Emmanuel MOUTI NDONGO Grand seminaire - Fin cycle de philosophie 2006 |
III.7.2. S'éduquer à une conscience de la paixL'analyse des causes des conflits nous a fait constater que l'Afrique s'est bâtie une nouvelle culture : celle de la guerre et de la violence. A l'origine de celle-ci, les appétits démesurés, les passions non maîtrisées des africains. Il faut donc transformer cette culture de l'agression en une culture de la non violence et de la concorde. Pour y arriver, l'homme africain doit s'éduquer à la conscience de la paix. Dans son agir et dans son être, il doit en faire son option fondamentale au quotidien. La paix est donc une construction permanente. Plus que la corvée de Sisyphe dans la mythologie grecque, elle est le travail de l'araignée tissant sa toile. Ceci se fait dans un effort constant que l'Africain aura, de se rapprocher de l'autre dans la vérité, la liberté, la justice, la fraternité et le pardon. Dans la vérité, l'Africain doit apprendre à écouter l'autre et avoir le souci d'intégrer la part de vérité dont il est porteur. Dans la liberté, l'Africain doit se débarrasser de ce désir et de cette volonté de tout ramener à lui, à accumuler les avantages, l'argent, les richesses et le pouvoir. Ceci doit le libérer de la peur qui diabolise l'autre et « engendre les mécanismes de défenses que sont les préjugés, les procès d'intention, les caricatures de l'autre, les jugements dévalorisants, les discours xénophobes ou racistes »44(*). Dans la justice, l'Africain doit s'astreindre au respect de certains droits et devoirs : Droit à l'éducation, à la santé, au travail et au respect de la dignité humaine. Dans la fraternité, l'Africain doit détruire les murs qui le séparent des autres et les accueillir dans la grande famille humaine qui est au dessus des liens naturels et conventionnels. Dans le pardon, l'homme d'Afrique refusera de réduire l'autre au seul acte qu'il a posé et acceptera de renouer une relation avec lui. C'est grâce à cela qu'ils pourront ouvrir un horizon nouveau et préparer de façon édifiante l'avenir. Cette éducation à une conscience de la paix devra amener l'Africain à avoir un respect aigu de « la vie conçue, naissante, croissante et vieillissante (...) car l'avenir de l'humanité dépend nécessairement »45(*) du prix accordé à celle-ci. La conscience de la paix à laquelle l'Africain doit se former ne fait pas table rase du passé. Elle garde plutôt éveillé la mémoire de ce dernier et le souvenir de celui-ci « l'empêche de reproduire des tragédies qui ont eu lieu dans le monde et l'aide à bien organiser la vie sociale »46(*). Sans exclure les divisions et les rivalités, mais seulement leur expression violente ; la conscience de la paix doit dépasser la simple absence de troubles pour établir entre les Africains une confiance réciproque et pérenne. C'est dans cet état que ceux-ci peuvent tisser des liens sociaux et « faire éclore les potentialités de chaque personne qui peut alors se développer, s'affirmer et se réaliser »47(*) pour le bonheur de tous. * 44Mgr. Jean-Pierre RICARD, « Ensemble au chevet de la paix » in La Documentation catholique, 3 octobre 2004, n° 2321, p. 831. * 45 J. MBARGA, Op. cit., p. 36. * 46 Id. * 47 Ibid., p. 135. |
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