Chapitre I : La réglementation des taux
d'intérêt du micro-crédit
79. - L'approche de la problématique des taux
d'intérêt du micro-crédit. Le problème
d'accès au crédit des exclus bancaires pouvait être
résolu, le grand pas restant le problème de taux
d'intérêt. Ce dernier préoccupe non seulement les exclus
mais aussi les responsables politiques dans le monde. On s'aperçoit que
les taux d'intérêt pratiqués par les opérateurs du
micro-crédit sont beaucoup plus élevés que ceux
demandés par les banques classiques. Pourquoi les opérateurs du
micro-crédit, qui s'implantent au Cambodge et généralement
dans les pays en développement, imposent-ils des taux
d'intérêt aussi élevés s'ils ont pour vocation
d'aider les pauvres ? Faut-il admettre la pratique des taux
d'intérêt très élevés pour le
micro-crédit145 ? Pourquoi l'ADIE peut-elle pratiquer le taux
du marché ? Il s'agit là d'un vieux débat touj ours
d'actualité qui mérite d'être analysé
profondément dans le cadre de cette étude.
On peut remarquer que le problème de taux
d'intérêt relève des constatations suivantes. Suite aux
faillites successives qu'ont connues certaines institutions de
microcrédit, les opérateurs du micro-crédit ont pris
conscience de la nécessité de donner la priorité à
l'équilibre financier pour prétendre à des systèmes
durables. Toutefois, cette tentative conduit à éloigner peu
à peu le système de sa volonté initiale de se rapprocher
des populations défavorisées pour s'adresser à des
clientèles aisées et rentables. On assiste donc à deux
logiques difficilement conciliables: la logique de type « bancaire »
et les logiques de type « développementaliste ». La
première est celle où le souci de viabilité
financière exclut progressivement les petits clients. La seconde est
celle où le crédit est un instrument pour atteindre d'autres
objectifs146. Comment associer ces deux logiques ? Quelle est la
position du droit positif en ce qui concerne le taux d'intérêt du
micro-crédit ? L'analyse des arguments généraux favorables
ou défavorables à la libéralisation des taux
d'intérêt du micro-crédit constitue une première
étape importante (Section I) avant de traiter de la
politique législative en droit positif en matière de taux
d'intérêt du micro-crédit (Section II).
C'est sur ce point que l'on peut voir que le micro-crédit,
notion inconnue en droit, exerce, en revanche, une influence incontestable sur
le changement du droit français
145. Brigit HELMS et Xavier REILLE, « Le plafonnement des
taux d'intérêt et la microfinance : qu'en est-il à
présent ? », CGAP, Etude spéciale, n°9, septembre 2004
; CGAP, l'explication raisonnée des taux d'intérêt
utilisés pour le microcrédit, n°6.
146 . OULD NEMINE Ahmed, préc., p. 14.
en matière de taux d'usure.
|