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Le Droit de Propager ses Croyances en Droit International des Droits de l'Homme, à la Lumière de la Jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme

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par Michael Mutzner
Institut Universitaire de Hautes Etudes Internationales (IUHEI) - Université de Genève - Diplôme d'études approfondies en relations internationales, spécialisation: droit international 2007
  

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2.1.3 La fuite vers l'article 10: les affaires Pitkevitch c. Russie et Murphy c. Irlande

Dans les affaires les plus récentes où la Cour a eu à faire à des cas de propagation de croyances, elle a préféré se placer directement sous l'article 10, sans prendre la peine d'examiner les cas sous l'angle de la liberté de religion et de conviction, modifiant ainsi son approche de celle développée dans les affaires grecques.

Pitkevitch c. Russie

C'est en fait une véritable fuite de la Cour à laquelle on assiste dans l'affaire Pitkevitch c. Russie. L'affaire concerne une juge, engagée politiquement dans le camp de l'opposition à la mairie en place, qui s'est faite congédier, sur demande de la maire. Il lui fut reproché d'avoir poursuivi des

98 VALTICOS Nicolas, « Interprétation juridique et idéologies », in MAHONEY Paul, MATSCHER Franz, PETZOLD Herbert, WILDHABER Luzius (eds.) Protection des Droits de l'Homme: la Perspective Européenne. Mélanges à la Mémoire de Rolv Ryssdal, Carl Heymans Verlag KG., Köln, 2000, pp. 1476 et 1481

activités religieuses, dans l'intérêt de son église,99 sur son lieu de travail. Elle a notamment tenté, sans succès, d'enrôler des personnes au sein de sa dénomination religieuse, prié au cours de certaines audiences, et elle aurait également promis à certaines parties une issue favorable à leur procès si elles rejoignaient son église. De part ces agissements, la requérante a, d'après les juridictions russes, nui à sa réputation en tant que juge et a affaibli l'autorité du pouvoir judiciaire.

La Cour dans sa décision, s'adonne à un véritable tour de passe-passe pour éviter l'article 9. En effet, elle constate tout d'abord que cette situation constitue bel et bien une ingérence à la liberté de religion et à la liberté d'expression, protégées par les articles 9 et 10 de la Convention. Puis elle poursuit en affirmant, qu'elle examinerait dans un premier temps si l'ingérence est justifiée dans le cadre de l'article 10. Après avoir constaté que l'ingérence en question ne violait pas la liberté d'expression de la requérante, elle ajoute simplement que « pour des raisons similaires », la plainte est également mal fondée au regard de l'article 9. Pourtant les faits en question, à savoir la manifestation de ses convictions religieuses sur son lieu de travail, semblent clairement être bien plus une ingérence à sa liberté religieuse qu'à sa liberté d'expression. Par ailleurs, le malaise de la Cour est également visible dans son usage de périphrases, pour éviter absolument l'usage du terme « prosélytisme ».100

Sous l'angle de l'article 10, la Cour accepte que l'ingérence poursuivait deux buts légitimes, à savoir d'une part la garantie de l'autorité et de l'impartialité du pouvoir judiciaire, et la protection des droits d'autrui, mais dans l'analyse de la nécessité d'une telle ingérence, la Cour se contente d'examiner en quoi elle était justifiée par la protection du pouvoir judiciaire. Elle évite ainsi la limitation qui se baserait sur le droit des individus à ne pas être soumis à une forme de prosélytisme qui violerait leur liberté de pensée, de conscience et de religion. De plus, le but légitime de la protection du pouvoir judiciaire ne figure pas parmi les raisons justifiant une ingérence à l'article 9, ce qui fait encore davantage regretter que la Cour se permette de rejeter la requête au regard de l'article 9 « pour des raisons similaires ».

La Cour s'est visiblement trouvée embarrassée par cette affaire, et plutôt que de se pencher sur la question du prosélytisme de la requérante, qui aurait peut-être suscité un débat inconfortable

99 La requérante est membre d'une église évangélique.

100 « Elle exprima ses opinions religieuses » (« She expressed her religious views »); « elle avait essayé sans succès d'enrôler un certain nombre de personnes » (« she had unsuccessfully attempted to enrol a number of persons »); « elle avait essayé de recruter plusieurs collègues ou tierces personnes pour en faire des membres de son église » (« she had recruited several colleagues and third persons as members of the Church »).

parmi les juges, la Cour s'est débinée en refusant d'entrer véritablement en matière.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry