Paragraphe 2 : Le renforcement du rôle et des
capacités des acteurs privés pour un
meilleur
contrôle de la mise en oeuvre du droit
A- le secteur privé
La communauté internationale, doit redoubler
d'efforts pour atteindre les objectifs fixés par le droit international
de l'environnement en vigueur. C'est pourquoi, gouvernements et entreprises
sont condamnés à coopérer.
(7)-Sandrine Maljean-Dubois : « La mise en
oeuvre du droit international de l'environnement », les notes de
l'IDDRI, n° 4, P. ,2003
(8)-Le protocole de Kyoto a adopté le 11
décembre 1997 et entré en vigueur le 16 février 2005
Le contrôle des mouvements transfrontières de
déchets dangereux et leur élimination figurent parmi les
priorités du droit international de l'environnement en vigueur et
constitue de ce fait un bel exemple de cette coopération indispensable
pour la mise en oeuvre du droit international de l'environnement .La Convention
de Bâle (*9) vise à la fois les déchets dangereux et les
autres « déchets », mais le dispositif contraignant
mis en place ne concerne que les déchets dangereux. La
dangerosité est définie selon deux modalités .la
Convention liste dans son annexe 1 une série de substances à
contrôler dont la dangerosité est établie grâce
à des critères définis dans l'annexe III et issus des
normes du transport international : toxique, explosif, corrosif,
inflammable, comburant, infectieux et écotoxique. Les déchets
dangereux entendus comme tels par les législations nationales des Etats
parties entrent également dans le champ de la convention .Les
déchets les plus nombreux au sens de la Convention, sont issus des
activités industrielles et des exploitations minières. Mais ils
comprennent aussi les déchets des hôpitaux, laboratoires, des
pharmacies. Le principe fondateur de la Convention est le principe de la
« gestion écologiquement rationnelle ».Ce principe
est entendu comme « toutes mesures pratiques permettant d'assurer
que les déchets dangereux ou d'autres déchets sont
gérés d'une manière qui garantisse la protection de la
santé humaine et de l'environnement contre les effets nuisibles que
peuvent avoir ces déchets. » La Convention définit un
système de contrôle fondé sur le consentement
préalable donné en connaissance de cause, au moyen des
notifications. C'est donc un objectif ambitieux nécessitant des
investissements considérables dont la réalisation
nécessite la participation du secteur privé, donc un partenariat
public-privé. Car, le traitement de déchets suppose de lourds
engagements, à la fois financiers et humains. Collecter, trier,
valoriser et recycler si possible et éliminer demandent des
infrastructures budgétivores que les Etats développés ou
en voie de développement ne peuvent assumer à seuls.
Globalement, le droit international de
l'environnement en vigueur a encouragé et constaté la place du
secteur privé , c'est-à-dire des principaux groupes du commerce
et de l'industrie dans la protection de l'environnement, donc au respect du
droit international de l'environnement transcrit en droit interne des Etats. En
effet, dans les pays développés, les entreprises privées ,
notamment les plus grandes et les plus puissantes,sont de plus en plus à
l'avant- garde du développement de technologies et d'investissements
respectueux de règles environnementales.
Par contre, dans la plupart des pays en voie de
développement, les entreprises privées nationales disposant de ce
type de compétences sont encore très rares .De plus, tant que les
gouvernements n'adoptent pas les réglementations et les réformes
politiques nécessaires, les entreprises n'ont guère de raison de
modifier leur habitudes polluantes et d'améliorer leur propre gestion
de l'environnement.
Par ailleurs, pour mettre en place leur politique
de gestion de l'environnement, les pouvoirs publics des pays en
développement ont tout intérêt à solliciter la
participation des entreprises nationales et étrangères, et
à faire appel à leurs ressources.
(9)-La Convention de Bâle sur le contrôle des
mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur
élimination a été adoptée le 22 mars 1989 et est
entrée en vigueur le 5 mai 1992.
La non ratification par les Etats-Unis porte donc quelque peu
atteinte au caractère véritablement universel de la Convention.
Toutefois, l'administration américaine est prête à
appliquer ce texte, sa réticence à devenir Partie provenant du
fait que ce pays aurait l'obligation de reprendre sur son territoire les
déchets dangereux produits sur ses bases militaires situées dans
le Pacifique alors que sa législation interne prohibe ces mouvements
.Dans le cas de filiales appartenant à de multinationales, on peut
encourager la société mère à former les
ingénieurs et techniciens nationaux aux techniques et
procédures de maîtrise de la pollution, de réduction des
déchets et de manipulation et de traitement des déchets toxiques.
Des mesures incitatives peuvent être prises pour encourager les
entreprises locales à développer et à utiliser de
techniques produisant peu de déchets par exemple. La participation du
secteur privé concerne l'obligation de celui-ci à effectuer des
autocontrôles avec l'obligation de transmettre
régulièrement les résultats à l'administration et
au public. Pourtant, cette démarche n'est pas suffisante pour garantir
un véritable contrôle, les entreprises ne pouvant pas être
à la fois juges et parties .D'où l'appui des ONG.
B- Les ONG nationales et internationales
Bien que les organes publics de contrôle
exercent, de leur mandat, une fonction de contrôle, ce dernier est
presque exclusivement fondée sur des données étatiques
.Or, celles-ci sont souvent incomplètes ou biaisées. D'où
la nécessité d'ouvrir le système de contrôle
à d'autres acteurs qui, tout en ayant accès aux à des
informations environnementales, n'ont pas de lien de dépendance avec
l'Etat. A condition que ces ONG aient suffisamment de ressources humaines,
financières et matérielles pour affirmer leur indépendance
vis-à vis des pouvoirs publics. Ce qui n'est souvent pas le cas. La
corruption faisant rage, il est possible que ces acteurs soient obligés
de produire de rapports incomplets et erronés. Dans cet ordre
d'idées, les ONG doivent conserver leur autonomie si elles souhaitent
garder la liberté de porter un jugement critique sur les
conséquences pour l'environnement des politiques et des projets
adoptés par les pouvoirs publics. Par conséquent, les ONG
internationales pourvues de moyens ont un rôle potentiel de premier plan
à jouer dans le financement et le soutien d'ONG nationales.
C- le renforcement du rôle et des
capacités des citoyens dans le contrôle
Le défi de renforcer l'application du droit
international de l'environnement en vigueur passe aussi le renforcement de la
participation des citoyens à l'élaboration et à la mise
en oeuvre de ce droit. Cette participation active est garante d'une meilleure
adaptation des règlements aux réalités et d'un meilleur
respect des textes (*10) .Il s'agit en fait de construire la démocratie
participative environnementale au niveau local et national comme nous le
verrons dans la section suivante, au niveau international. Aussi, pour
reprendre l'expression de Michel Prieur, il s'agit du défi de
perfectionner la démocratie là ou elle existe
déjà, l'établir là où elle n'a pas encore
été instituée. Par conséquent,l'accès
à l'information en matière d'environnement détenue par
les autorités publiques est une condition primordiale permettant de
renforcer l'application et le contrôle du droit international de
l'environnement en vigueur au niveau local et national .Est
considérée comme une information relative à
l'information : toute information disponible sous forme écrite ,
visuelle et sonore ou contenue dans des banques de données , qui
concerne l'état des eaux , de l'air, du sol, de la faune , de la flore,
des terres et des espaces naturels , ainsi que les activités ou les
mesures les affectant ou susceptibles de les affecter et les activités
ou les mesures destinées à les protéger.
(10)- Prieur (M.), Le droit à l'environnement et les
citoyens : la participation, R.J.E. 1984-4, P.397
Les Etats veilleront à ce que les autorités
publiques mettent à la disposition de tout demandeur, qu'il soit
personne physique ou morale et sans qu'il soit obligé de faire valoir
un intérêt, l'information en matière d'environnement
qu'elles détiennent ou qui est détenue pour leur compte.Ils
veilleront également à ce que les fonctionnaires aident le public
à avoir accès aux informations recherchées. Car, beaucoup
de textes ont été adoptés et ratifiés par les Etats
en matière d'environnement sans parfois tenir compte des acteurs pour
lesquels ils sont destinés. Il n'est pas étonnant que, au bout de
quelques années, des difficultés imprévues surgissent sur
le chemin du droit.
D-le rôle de l'éducation
Il est important d'insister sur le rôle de
l'éducation dans le cadre du défi de renforcer l'application du
droit international de l'environnement en vigueur. Dans son rapport de 1979
« Pas de limites pour le savoir », le Club de Rome a
souligné l'importance de l'apprentissage en précisant que la
limitation externe de la sphère terrestre pourrait être
compensée en gagnant sur la « marge intérieure sans
limites » des êtres humains. Le rôle que doit jouer
l'éducation dans l'établissement d'une société
durable est grand, car c'est l'éducation qui développe la
dimension intérieure de chaque individu.
C'est pourquoi le sens de l'éducation dans
la réalisation du développement durable est constamment
souligné depuis le Sommet de la Terre en 1992, quand plusieurs
Conventions internationales environnementales de portée mondiale ont
été signées. Au Sommet mondial du développement
durable tenu à Johannesburg en 2002, sur une proposition d'ONG
japonaises, la délégation japonaise a souhaité la
proclamation d'une décennie des Nations Unies pour l'éducation en
vue du développement durable, qui a été ensuite
adoptée par l'Assemblée des Nations Unies à la fin de
cette même année. C'est ainsi qu'en janvier 2005 a
été lancée la Décennie des Nations Unies pour
l'éducation en vue du développement durable (DNUEDD).La vision
fondamentale que promeut cette Décennie est celle d'un monde où
chacun a la possibilité de tirer bénéfice de
l'éducation et d'apprendre les valeurs, les comportements et les modes
de vie indispensables pour un avenir durable et pour une transformation
positive de la société. La DNUEDD doit ainsi trouver son
rôle à jouer dans la résolution des grands problèmes
environnementaux mondiaux, y compris dans les mesures de lutte contre le
réchauffement climatique planétaire qu'elle pourra appuyer.
Cette préoccupation a été
exprimée dans la Déclaration de Limoges du 15 novembre 1990 en
ces termes : « La méconnaissance des règles
déjà existantes en matière d'environnement étant
une des causes de l'inapplication de ce droit et de l'aggravation des
problèmes d'environnement. Il est impératif de mettre en place
un véritable système d'information et de formation en droit de
l'environnement dans chaque Etat et au plan international .Des
séminaires de droit national, de droit comparé et de droit
international doivent être organisés régulièrement
pour les praticiens et les ONG aussi bien dans les pays
développés que dans les pays en développement »
(*11).
(11)-« Déclaration de Limoges »,
Centre International de Droit Comparé de l'Environnement, Réunion
mondiale des Associations de Droit de l'Environnement, alinéa 2 du
préambule, Novembre 1990.Ont participé à cette
réunion : les experts du Conseil international du droit de
l'environnement, les juristes de l'environnement, les Associations de droit de
l'Environnement, venant de 43 Etats différents.
Dans cet ordre d'idées, Michel Prieur (*12)
écrit la chose suivante à propos du Congo
Brazzaville : « L'accroissement continu du droit de
l'environnement tant international que régional répond au besoin
de mieux contrôler les activités humaines qui risquent de
dégrader de façon irréversible les ressources naturelles,
la faune, la flore, le climat et qui mettent en cause la survie même de
l'Humanité. Mais il ne suffit pas d'adopter des lois et des
règlements qui posent des principes nouveaux, fixent des objectifs de
développement durable et organisent des procédures de
prévention, de précaution et de participation. Il faut que le
droit édicté soit vivant .Pour cela il doit être connu de
tous, donc facilement accessible » (*13).
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