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La liberté fiscale sur Internet

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par Romain-Jean Pichardie
Université de Rouen - Master Droit des Affaires et Fiscalité 2006
  

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Chapitre 2. L'adaptation des règles fiscales aux spécificités d'Internet

Malgré la tentation, pour certains pays, d'imposer une zone franche, l'activité sur Internet est trop importante, en volume, pour échapper à la fiscalité. D'ailleurs, la France n'a jamais envisagé de faire échapper le réseau à son droit fiscal national.

Section 1. Entre zone franche internationale et fiscalisation internationale

1. Le «Framework for global electronic commerce»

Au départ, Internet était un outil communautaire gratuit. initialement destiné à la recherche et au partage de données scientifiques, le réseau était majoritairement non marchand. La question de la fiscalité n'était donc pas posée.

Mais dès 1997, La maison Blanche, devant l'apparition de sites marchands, a tenté d'imposer ses choix juridiques et fiscaux pour l'Internet. Ainsi, le FGEC, Framework for Global Electronic Commerce 13(*) a été publié le 1er juillet 1997.

Ce texte est un document unilatéral signé par le président des États-Unis, Bill Clinton. C'est une déclaration destinée à influencer les gouvernements étrangers dans l'élaboration des législations nationales propres à ce média nouveau. Elle est également destinée à influencer les États américains fédérés, afin qu'il n'entravent pas le développement d'Internet.

Ce texte énonce cinq principes :

· Le secteur privé doit mener l'évolution du réseau.

· Les gouvernements doivent éviter les restrictions illégitimes au commerce électronique.

· Lorsque l'implication des gouvernements est nécessaire, son but doit être d'encourager et d'assurer un environnement légal prévisible, minimaliste, et simple pour le commerce électronique.

· Les gouvernements doivent reconnaître les qualités uniques de l'Internet.

· Le commerce électronique par Internet doit être facilité de façon globale.

Ce texte présente l'Internet comme une opportunité pour les entrepreneurs, du fait du faible capital social nécessaire à l'exercice d'une activité. Il met en avant la nouveauté que constitue l'accès immédiat à une clientèle quasi-illimitée. Qualifiant Internet de révolutionnaire, le texte insiste sur la nécessité d'adopter une législation la moins contraignante possible. La non-imposition de toutes les activités est demandée.

Les seules législations tolérées sont relatives à la protection de la propriété intellectuelle et à la prévention de la fraude.

Dans le quatrième point, il est même suggéré que toute législation existante interférant avec le commerce électronique doit être révisée, ou abrogée. Il est en faveur d'une auto-régulation totale par les commerçants et les clients.

Le FGEC incite à une absence totale d'imposition. Les États-Unis étaient alors en faveur d'une vaste zone-franche, aussi bien pour les ventes de biens que pour les prestations de services. Toutefois, en cas d'échec de la création d'une telle zone-franche, le texte prévoyait le cadre fiscal qu'il souhaitait. Il prônait une fiscalité égalitaire, simple, transparente, et compatible avec la fiscalité américaine.

Les États-Unis semblent ici s'être inquiétés du risque de paralysie du commerce électronique. Cependant, les États-Unis ayant une place prédominante dans l'Internet, ceci était avant tout destiné à conférer un avantage concurrentiel décisif aux entreprises américaines.

Parallèlement à cette proposition de zone franche, une taxe au bit à caractère humanitaire a été envisagée en 1994, par Arthur Cordelle, puis rejetée. L'avantage de cette taxe était que son montant ne pouvait être ni dissimulé, ni discutable. En effet, le transfert de données en lui même était imposé.

Une taxe à la vente a également été proposée par Madame Falque-Pierrotin en 1997, mais n'a reçu aucun écho, du fait de la complexité de sa mise en oeuvre.

2. le développement considérable de l'activité économique sur Internet

Les plus gros distributeurs et médias sont aujourd'hui présents sur Internet. C'est par exemple le cas de Carrefour, du groupe Casino, de la FNAC et du journal Le Monde.

L'avantage principal d'Internet est que les coûts sont extrêmement faibles par rapport à la distribution classique. En outre, on obtient, à partir d'un établissement unique, une présence mondiale. Les réseaux de distribution deviennent inutiles, alors que dans le même temps, la clientèle est démultipliée. En quelques années, des sociétés se sont assurées des parts de marché considérables.

En France, l'année 2005, avec une croissance supérieure à 40%, a généré un chiffre d'affaires de plus de 10 milliards d'euros, services financiers inclus. A titre d'exemple, RueDuCommerce a été créée en 1999 avec pour objet la distribution de produits informatiques et électroniques grand public par l'intermédiaire de son site Internet. Au 30 juin 2006, rueducommerce.com a enregistré un chiffre d'affaires sur le premier trimestre de son exercice (avril 2006 à juin 2006) de 54.8 millions d'euros, contre 42.8 millions d'euros l'année dernière sur la même période, en progression de 27.9%.

Par ailleurs, le Conseil des ventes, l'autorité de régulation des 360 maisons d'enchères en France et 539 commissaires-priseurs, a calculé qu'EBay a vendu en 2005 pour 53 millions d'euros de biens culturels, ce qui en fait virtuellement la 9e SVV (société de ventes volontaires) de France. Le conseil considère que 60 % des vendeurs de ces biens ont acquis un caractère professionnel et demande donc qu'un statut de courtier en ligne soit instauré.

Si Internet était une zone franche, ceci créerait une distorsion de concurrence et une importante évasion fiscale. Il y a donc eu l'obligation pour les Etats de fiscaliser l'Internet, sous peine de perdre d'importantes recettes fiscales.

* 13 FGEC : signifie « texte-cadre pour un commerce électronique global ». Le texte est consultable en anglais à l'adresse : www.technology.gov/digeconomy/framewrk.htm

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