2) La notion de création de valeur
Quant à la création de valeur, il s'agit
d'un concept ambigu en raison de la multiplicité des pratiques
managériales qui lui sont associées : valeur
d'échange, valeur comptable ou économique, valeur partenariale,
valeur pour le client, etc.
Précisons que ces multiples approches connaissent des
succès divers. Ainsi, si certaines d'entre elles relèvent
plutôt d'un effet de mode, d'autres semblent davantage ancrées
dans la réalité du management. C'est notamment le cas dans le
domaine de la stratégie avec la généralisation des
thèmes liés à l'avantage concurrentiel qui
détermine la valeur qu'une firme peut créer pour ses clients et
dans le domaine de la finance avec le concept de maximisation de la valeur
actionnariale.
Cependant, ces deux thèmes font
référence à des logiques managériales distinctes.
En schématisant, on peut opposer une logique de financiarisation
où prédomine la création de valeur financière et
une logique d'intégration qui met en relation les différents
aspects de la création de valeur.
L'approche financière privilégie
l'idée que tout actif est assimilable, au moins conceptuellement,
à un actif financier dont la mesure correcte est celle de la valeur
actuelle des flux attendus de cet actif, compte tenu du risque qui lui est
lié. Ainsi, par analogie avec les actifs financiers, il est possible de
vendre ou d'acheter à tout moment des actifs comparables ou de
réinvestir les fonds sur d'autres opportunités. L'option fait
donc partie du choix et constitue un des facteurs de la flexibilité.
La logique d'intégration reconnaît
l'importance de la création de valeur mais elle l'analyse comme le
résultat d'une synthèse des différentes composantes de la
valeur, qu'il s'agisse des aspects organisationnels, concurrentiels ou
institutionnels. Elle met en avant des concepts comme ceux de
compétences fondamentales, de savoir-faire de coopération et de
coordination, d'avantage compétitif. Elle suppose une vision
élargie de la performance et la mise au point d'un tableau de bord
comprenant des aspects non financiers.
Ce concept de création de valeur connaît
aujourd'hui un renouveau et cela pour plusieurs raisons. Ce renouveau
résulte d'abord incontestablement de la transformation du capitalisme
financier et a pour origine les mouvements d'OPA menés sur les
sociétés qui n'exploitaient pas efficacement leur base d'actifs
pour les actionnaires. Ces pratiques ont fourni une visibilité externe
à la « discipline de marché » qui a
incité les dirigeants à faire plus d'attention à la
création de valeur et à replacer l'actionnaire au centre de la
stratégie.
En outre, le développement de la globalisation et
l'essor des nouvelles technologies de l'information et de la communication (
TIC ) ont accéléré les processus d'internationalisation
des entreprises et la constitution de réseaux complexes et
mondialisés. Il en est résulté une financiarisation de la
stratégie basée sur le recentrage sur le marché principal
et la recherche de la taille critique. C'est pourquoi, l'achat de parts de
marchés et les options de croissance externe sont
systématiquement privilégiés au détriment du
développement endogène de l'entreprise. Or, pour les
investisseurs institutionnels, qui contrôlent davantage de
sociétés grâce à leur puissance, la capacité
d'une entreprise à créer de la valeur est un critère
essentiel d'appréciation. Enfin, un autre facteur externe qui a
dynamisé la création de valeur est la disparition progressive des
monopoles d'Etat surtout dans le cas de la France. Le système de
monopole public reposait sur l'existence de participations croisées dont
la finalité était d'assurer un partenariat stable. La
globalisation financière a réduit progressivement
l'intérêt d'un actionnariat national en rendant moins essentiels
les bouclages en capital qui apportent peu de ressources.
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