La protection des logiciels en droit ivoirienpar Ariel Maixent KOUADIANE Université des Lagunes - Master 2 2024 |
B : Le matériel de conception préparatoireAux termes de l'article L122-2 du Code français de la propriété intellectuelle, le matériel de conception préparatoire du logiciel est aussi protégé par le droit d'auteur, en tant que forme d'expression du logiciel. Cela rejoint également la position du droit communautaire européen, qui a adopté une conception extensive de la notion de logiciel. Le matériel de conception préparatoire « s'entend des documents, établis en principe avant le démarrage du développement du logiciel, mais aussi au cours du développement et à l'occasion des évolutions du logiciel, qui décrivent les fonctionnalités du logiciel, son fonctionnement technique, la structure des données qu'il exploite et qu'il génère, etc. »47(*) De ce point de vue, quiconque détient ces documents est potentiellement en mesure de réaliser le logiciel, en cela ils en sont indétachables. Cela justifie amplement qu'ils soient considérés comme une partie intégrante du logiciel. Alors se pose le problème de l'étendue de ce concept. En effet, aucune législation n'en fournit une définition légale de telle sorte que la portée de cette notion reste à préciser. Il est cependant admis que le cahier des charges, qui peut émaner de personnes autres que les programmeurs, ne vaut pas matériel préparatoire48(*). C'est pourquoi, Alain BENSOUSSAN propose que l'analyse fonctionnelle marque le départ des travaux préparatoires49(*). De ce point de vue, le matériel de conception préparatoire doit regrouper les analyses fonctionnelle et organique. Cela correspond à la définition que Bertrand LIAUDET donne de la phase de conception du logiciel50(*). L'analyse fonctionnelle sert à déterminer les algorithmes nécessaires pour mettre en place les fonctions que le logiciel offre à ses utilisateurs. L'analyse organique s'attache à « la façon dont sera construit le système pour répondre aux attentes de l'analyse fonctionnelle51(*) ». Nous nous inscrivons dans la même ligne de pensée, d'autant qu'elle correspond à la définition dégagée par la jurisprudence : « l'ébauche informatique du programme dès lors qu'elle est suffisamment avancée pour contenir en germe les développements ultérieurs52(*) ». Le législateur ivoirien ne prévoit pas expressis verbis que le matériel de conception préparatoire du logiciel peut être protégé par le droit d'auteur. Mais cela peut se déduire de l'article 5 alinéa 1 de la loi ivoirienne53(*) sur le droit d'auteur. En effet, le droit d'auteur s'applique aux oeuvres inachevées. Ainsi, le fait que le logiciel soit inachevé ou en cours d'élaboration n'est pas un obstacle à sa protection par le droit d'auteur. Sous ce rapport, il y a tout lieu de penser que le matériel de conception préparatoire des logiciels, en ce qu'il contient les germes du programme d'ordinateur, est également protégé par le droit d'auteur. Nous avons montré comment le droit d'auteur s'appliquait aux formes d'expression du logiciel. Il convient, à présent, d'analyser l'application du droit d'auteur aux éléments autonomes du logiciel. * 47Dictionnaire Juridique, Logiciel, [8 févr. 2024]. Lien * 48Y. BISMUTH, op. cit., p.75 * 49A. BENSOUSSAN, Informatique, télécoms, internet : Réglementation, contrats, fiscalité, communications électroniques, Éditions Francis Lefebvre, 2012 p.25. * 50 Bertrand LIAUDET, CONCEPTION des SYSTÈMES d'INFORMATION UML, Epitech 3 - Automne 2007, p.2. * 51 Ibid. * 52CA Toulouse, 9 octobre 2007, 05/02 806 * 53 Loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016. |
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