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La protection des logiciels en droit ivoirien


par Ariel Maixent KOUADIANE
Université des Lagunes - Master 2 2024
  

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Section 2 : Les moyens supplémentaires de protection des auteurs de logiciels

La propriété littéraire et artistique ne s'attache qu'à l'aspect littéraire du logiciel. Or, en réalité, d'autres aspects du programme d'ordinateur méritent également d'être sécurisés. Par exemple, il est primordial de protéger la notoriété de son logiciel, ou même le comportement de son programme d'ordinateur. Dans ce but, l'auteur du logiciel peut mettre en oeuvre des moyens supplémentaires de protection. Les moyens supplémentaires de protection des auteurs de logiciels sont destinés à couvrir des aspects du logiciel qui ne sont pas protégeables par le droit d'auteur. Deux mécanismes semblent se démarquer : le droit des marques (Paragraphe 1) et le droit de la concurrence (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le droit des marques, moyen de sécurisation de la notoriété du logiciel

Aux termes de l'article 2 de l'annexe 3 de l'ABR232(*), la marque est tout signe visible ou sonore utilisé ou que l'on se propose d'utiliser et qui est propre à distinguer les produits ou services d'une personne physique ou morale. Le logiciel, en tant que produit233(*), peut être protégé par le droit des marques. Nous montrerons dans ce paragraphe comment peut être constituée une marque de logiciel (A) et quels sont les effets qui y sont attachés (B).

A : La constitution de la marque de logiciel

La constitution de la marque est subordonnée, dans un premier temps, à des conditions de fond. En effet, la marque, pour être valable, doit être distinctive, disponible, licite et non déceptive.

L'article 3 de l'annexe 3 de l'ABR234(*) ne donne pas de définition positive de la distinctivité de la marque. Ce texte illustre simplement cette notion en précisant qu'une marque « est dépourvue de caractère distinctif notamment du fait qu'elle est constituée de signes ou d'indication constituant la désignation nécessaire ou générique du produit ou la composition du produit ». D'abord, selon Ida JIAZET, par désignation nécessaire, il faut comprendre « un signe dont on a besoin pour nommer les produits ou les services désignés par la marque, dès lors qu'il n'en existe pas d'autre pour désigner d'une manière aussi précise ou aussi concise les produits en question.235(*) » Par exemple, les termes « Software », « logiciel », « progiciel », ne sauraient être déposés comme marque. Ensuite, par désignation générique, l'on entend le signe qui définit non pas un produit ou le service en cause, mais la catégorie, l'espèce ou le genre, auquel appartient ce produit ou service236(*). Par exemple, les vocables « Antivirus », « Logiciel de gestion » ou « Logiciel Comptable » ne saurait constituer des marques valables. Enfin, les signes descriptifs sont des signes qui définissent, indiquent ou évoquent l'objet en cause dans sa nature, dans ses propriétés ou dans ses qualités237(*).

La marque doit être aussi disponible. C'est dire qu'elle ne doit pas être identique à une marque déjà enregistrée pour la commercialisation de logiciels ou une marque notoire, ni ne doit présenter de ressemblance avec une telle marque au point de comporter un risque de confusion ou de tromperie. Par exemple, l'on ne saurait déposer les termes « Microsoft » ou « Mycrosoft ». De même, la marque n'est pas valable quand elle reproduit, imite ou contient parmi ses éléments des armoiries, drapeaux ou autres emblèmes, abréviation ou sigle ou un signe ou poinçon officiel de contrôle et de garantie d'un Etat ou d'une organisation intergouvernementale créée par une convention internationale, sauf autorisation de l'autorité compétente de cet Etat ou de cette Organisation.

En plus, la marque doit être licite. Autrement dit, elle ne doit pas être contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs.

Par ailleurs, la marque ne doit pas être déceptive. Une marque est déceptive quand elle est susceptible d'induire en erreur le public ou les milieux commerciaux, notamment sur l'origine géographique, la nature ou les caractéristiques des produits ou services considérés. Par exemple, le terme « E-santé » ne saurait être utilisé pour désigner un logiciel d'archivage.

Dans un second temps, la constitution de la marque exige le respect de formalités. Il s'agit du dépôt suivi de l'enregistrement de la marque238(*).

Pour être propriétaire d'une marque, il faut présenter une demande d'enregistrement ou, en d'autres termes, la déposer. Cette formalité peut être accomplie suivant la voie du dépôt direct, et, dans ce cas, la demande est déposée directement à l'OAPI ou transmise par voie postale ; ou par la voie du dépôt indirect, auquel cas la demande est déposée ou adressée par pli postal au ministère chargé de la propriété industrielle.

Le dossier d'enregistrement comprend la demande d'enregistrement comportant les mentions obligatoires (Formulaire M301) ; la pièce justificative du versement à l'Organisation de la taxe de dépôt ; un pouvoir sous seing privé, sans timbre, si le déposant est représenté par un mandataire ; le document de priorité le cas échéant ; enfin, dans le cas d'une marque collective, le règlement d'utilisation.

Le déposant, dans la demande, doit notamment indiquer les produits auxquels s'applique la marque (en l'occurrence un logiciel) ainsi que leurs classes conformément à l'arrangement de Nice. En l'espèce, c'est la classe 9 qui correspond aux « logiciels ». Cela dit, si le logiciel en lui-même est un produit, il peut impliquer également des services annexes. Il convient alors d'étendre la marque aux classes 38 (Services de télécommunications) et 42 (conception et développement d'ordinateurs et de logiciels).

Après le dépôt, le dossier d'enregistrement est examiné par l'OAPI afin d'examiner sa régularité tant au fond qu'en la forme. En cas d'irrégularité, notification est faite au déposant. Un délai de trois mois leur est alors accordé aux fins de régularisation. Ce délai peut être prolongé de 30 jours sur demande justifiée du déposant ou de son mandataire. À l'expiration de ce délai, toute demande non régularisée est rejetée par décision du directeur général de l'OAPI. Le déposant dispose d'une voie unique de recours, la saisine du Conseil Supérieur de Recours.

Si la demande est régulière, le déposant se voit attribué un certificat d'enregistrement, lequel certificat est publié. Dès lors, il jouit d'un monopole sur la marque.

* 232 Op. cit.

* 233 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.19

* 234 Op. cit.

* 235 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.24

* 236 Ibid.

* 237 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.25

* 238 La marque est facultative. Mieux dit, une personne est en droit d'exploiter une marque sans l'avoir préalablement enregistrée. Cependant, le cas échéant, elle ne jouira d'aucun droit sur la marque et ne pourra, en conséquence, s'opposer ni à son usurpation ni à son enregistrement future par un tiers.

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