La protection des logiciels en droit ivoirienpar Ariel Maixent KOUADIANE Université des Lagunes - Master 2 2024 |
B : Le droit de reproduction du logicielL'auteur a également un droit de reproduction du logiciel. La reproduction fait référence à deux hypothèses différentes : la reproduction stricto sensu ainsi que la transformation du logiciel. Dans un premier temps, par reproduction stricto sensu, nous entendons signifier la copie servile112(*) ou quasi-servile113(*) du logiciel. À ce sujet, l'auteur du programme d'ordinateur jouit du droit exclusif d'autoriser la reproduction de son oeuvre, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit, y compris sa numérisation. Autrement dit, lui seul peut permettre la fixation du logiciel sur tout support (généralement sur un support numérique), en un ou plusieurs exemplaires, qu'il soit exprimé en, code source, code objet ou code exécutable ; ou encore qu'il s'agisse du matériel de conception préparatoire114(*). En pratique, l'auteur est le seul à pouvoir autoriser la copie d'un logiciel sur un support de stockage (Clé USB, disque dur, CD, DVD, Cloud, etc.). Le droit de protection des créateurs de logiciels se retrouve encore plus renforcé que la libre reproduction à des fins privées, existant en droit d'auteur classique, est interdite en ce qui concerne les programmes d'ordinateur. En effet, l'article 10 de l'annexe 7 de l'ABR115(*) dispose précisément que la libre reproduction pour l'usage privé de l'utilisateur ne s'applique pas à la reproduction des programmes d'ordinateur. Toutefois, le droit de reproduction de l'auteur n'est pas absolu. À cet égard, la loi ivoirienne 116(*)sur le droit d'auteur prévoit, au profit de l'utilisateur, le droit d'effectuer une copie sauvegarde. Il s'agit d'un mécanisme destiné à préserver l'utilisation du programme d'ordinateur, en protégeant l'utilisateur du logiciel d'une éventuelle destruction du logiciel ou de son support. Ainsi, au sens de l'article 31 de la loi ivoirienne sur le droit d'auteur, « la personne ayant le droit d'utiliser un programme d'ordinateur peut faire une copie de sauvegarde pour préserver l'utilisation du programme d'ordinateur ». En ce sens, l'article 17 de l'annexe 7 de l'ABR 117(*)prévoit : « L'utilisateur légitime d'un exemplaire d'un programme d'ordinateur peut, sans l'autorisation de l'auteur et sans paiement d'une rémunération séparée, réaliser un exemplaire [...] à condition que cet exemplaire soit : [...] nécessaire à des fins d'archivage et pour remplacer l'exemplaire licitement détenu dans le cas où celui-ci serait perdu, détruit ou rendu inutilisable. » Cette disposition, beaucoup plus explicite que la précédente, met en lumière la cause de cette exception : le remplacement d'un programme devenu inutilisable. Dans un second temps, la transformation118(*) du logiciel peut résider dans l'adaptation, l'arrangement ou la traduction d'un logiciel. D'abord, l'adaptation consiste à s'inspirer du code d'un logiciel afin d'en créer un nouveau. Ensuite, l'arrangement du logiciel signifie le changement de disposition des éléments de programmation du logiciel. Enfin, la traduction, c'est l'expression du code du logiciel dans un langage de programmation différent de celui adopté pour le logiciel initial. Toutes ces opérations, on le constate, ont ceci de commun qu'elles présupposent l'accès au code du logiciel. Or, il serait inconcevable que quiconque puisse librement accéder et transformer le code d'un logiciel. C'est pourquoi le droit de reproduction comprend également le droit exclusif pour l'auteur d'autoriser l'adaptation, l'arrangement ou la traduction de son oeuvre. Toutefois, ce droit est tempéré par les intérêts de l'utilisateur. À ce titre, l'article 18 susvisé prévoit également : « le propriétaire légitime d'un exemplaire d'un programme d'ordinateur peut, sans l'autorisation de l'auteur et sans paiement d'une rémunération séparée, réaliser [...] l'adaptation de ce programme à condition que [...] cette adaptation soit nécessaire à l'utilisation du programme d'ordinateur à des fins pour lesquelles le programme a été obtenu ». Autrement dit, l'utilisateur du logiciel est autorisé à procéder à la modification du logiciel (principalement du code source) quand cette opération est nécessaire à son utilisation. Par conséquent, un auteur ne peut s'opposer à ce que l'utilisateur altère le code source de son programme afin d'en corriger les erreurs, ou bien dans l'optique de le rendre compatible avec d'autres logiciels. Le monopole de l'auteur lui permet d'exploiter le logiciel. Et ce monopole est garantit par l'action en contrefaçon. * 112On entend par copie servile, la copie identique en tous points d'un logiciel ou d'une autre création. * 113La notion jurisprudentielle de copie quasi servile exprime la copie réalisée avec d'infimes différences, si bien que le public pourrait la confondre avec la création originale. * 114B. SCHAMING, op. cit., p.174 * 115 Op. cit. * 116 Op. cit. * 117 Op. cit. * 118Nous avons opté pour le terme transformation dans l'optique d'éviter la répétition du vocable adaptation. Mais, en réalité, la traduction et l'arrangement d'un logiciel constitue, à n'en point douter, une adaptation. C'est pourquoi, nous désignerons également par adaptation ces droits, pour la suite. En ce sens : Loutfi, M.-H. (1989). Réflexions sur la protection juridique des logiciels. Bulletin du droit d'auteur, XXIII(4). p.20 |
|