L'exigence d'information du public en droit public financier camerounaispar Donylson Brown Seudieu tchinda Université de Ngaoundéré - Master 2 recherche 2021 |
Section 2 : Une exigence aux modalités déterminéesUne opération aussi complexe que l'information du public en droit public financier doit être clairement consacrée. Cette complexité accru ressort du fait que sa réalisation met en exergue la volonté des pouvoirs publics d'être transparent dans leur gestion des ressources financières. Au Cameroun, cette exigence d'information du public se présente comme une exigence couvrant l'ensemble des activitésbudgétaires et extrabudgétaires et portant sur le passé, le présent et l'avenir des financespubliques. Dès lors, pour une meilleure mise en oeuvre de cette exigence d'information, il ressort que cette dernière doit être satisfaite mécaniquement (paragraphe 1), de façon régulière et exhaustive (paragraphe 2). Paragraphe 1 : Une exigence satisfaite mécaniquementL'ensemble des instruments qui régissent la gestion des deniers publics au Cameroun ont la particularitéde consacrés le caractèremécanique, c'est-à-dire quasi automatique de la satisfaction de l'exigence d'information du public. En effet, les plus communs de ces instruments font ressortir l'accèsà l'information sur les finances publiquesà l'initiative de l'administration (A) ou à celle d'unedemande extérieure (B). A- Une exigencesatisfaite à l'initiative de l'administration : l'obligation de publicationdes informations sur les finances publiquesL'obligation de publication s'appréhende trivialement comme l'impératif de rendre public ou de rendre opposable au public. Elle attire de plus en plus l'intérêtdes chercheurs car elle se présente comme le principal gage de transparence et par conséquent de bonne gouvernance administrative et financière. En effet, par cette obligation d'ouvrir l'accèsà l'information aux populations pour que celles-ci puissent tenir les gouvernants en charge de la gestion des deniers publics et de l'exécution des politiques publiques. C'est d'ailleurs cet idéal que voudrait imposer les la plupart des institutions internationales aux Etats africains en général et au Cameroun en particulier. Sur le plan international, lorsqu'on abordait la gestion des finances publiques dans les pays de l'Afrique francophone subsaharienne62(*), il s'agissait de parler des institutions internationales initiatrices des programmes d'ajustement structurel miseen place à la fin des années 1977 pour « aider »ces Etats à résoudre leurs déséquilibres macroéconomiques. Mais aujourd'hui, l'action des institutions internationales est tournée vers l'amélioration de la gouvernance administrative et financière sous l'angle de la transparence à travers l'exigence d'information du public dans la gestion des finances publiques. De manière précise, la publication des informations financières découle à l'origine des normes internationales qui structurent le système financier international mise en place par la BM et le FMI dans le cadre de leurs activités.A l'exempledu Code de bonne pratique en matière de transparence adopté en 199863(*). Ce Code a été suivi par l'élaboration par le FMI des articles d'informations et d'assistance tel le manuel de transparence dans la présentation des données des finances publiques intégrant le système de la comptabilité d'exercice. Dans le cadre communautaire, ici matérialisé par la CEMAC, l'obligation de publication des informations financières est consacrée principalement dans les directives du cadre harmonisé de gestion des finances publiques dans cettezone en particulier celle relative au Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques. En effet, cette dernière met un accent particulier sur la publication par les administrations publiques des Operations financières publiques64(*). Elle consacre d'ailleurs à titre d'illustration le fait que l'administration doit publier les règles et principes qu'elle suit dans l'attribution des aides, subventions et transfères au bénéfice de toute personne privée65(*) ou encore la mise en place des financements pour une dépense publique par une organisation internationale ou un Etat étranger66(*). Sur le plan national, on constate que les dispositions consacrant la satisfactionà l'initiative de l'administration de l'exigence d'information du public sur les finances publiques n'étaient pas suffisammentexistantes, du fait que les individus ne pouvaient pas accéder à l'information qu'à leur demande. Il faut tout de même mentionner qu'il y a une évolution depuis le début du processus de réformedes finances publiques entamée au Cameroun. En effet, il apparaît que cette réformeprocèdeà une internalisation des normes communautaires en reprenant systématiquement les règlesédictées au niveau communautaire d'une part, et en arrimant le régime financier des personnes morale de droit public67(*) aux règles communautaires d'autre part. On peut également évoquer la réforme des marchés publics intervenue par leDécret n°2018/366 du 20 juin 2018 portant Code des Marches Publics. Ces Textes viennent non seulement innover, mais aussi renforcer le dispositif normatif compte tenu de la problématique de la publication des informations sur les finances publiques. Dans le même sens, l'on peut constater que la loi portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun, en consacrant son chapitre 03 a l'information du public, réserveson article 05 au fait que la vente des biens publics doit êtrerégulièrementportéeà la connaissance du public68(*), de même que les relations entre les administrations publiques et les entreprises publiques ou d'autresentités publiques69(*). Ces dispositions augurent ainsi l'existence de l'obligation de publication c'est-à-dire de la satisfaction à l'initiative de l'administration de l'exigence d'information du public sur la gestion des deniers publics. Par ailleurs, l'obligation de publication des informations sur les finances publiquesest aussi consacrée à travers la publicité du débat d'orientation budgétaire. En effet, le débat d'orientation budgétaire que le parlement organise chaque année pour examiner les documents de cadrage à moyen terme, la situation macro-économique et le rapport sur l'exécution du budget de l'exercice en cours est tenu en séance publique, mais sans vote70(*). Le citoyen peut ainsi suivre les discussions et mieux s'informer sur la situation budgétaire du pays. Ceci leur permetde disposer d'élémentssupplémentaires pour pouvoir exercer à temps et en toute connaissance de cause un contrôle populaire de l'action publique. Ce qui, au cas où ils n'en sont pas satisfaits, n'a pas pour vocation d'empêcher ces individués de demander que leur soit communiqué des informations supplémentaires sur la gestion des finances publiques. * 62 V. ONDOA (M), « Ajustement structurel et réforme du fondement théorique des droits Africains post-coloniaux : l'exemple du Cameroun », Revue Africaine de Science juridique, vol.2, n°1,2007, pp77 et S. * 63 Cf. http:// WWW.inf.org/external/rp/exr/facts/fre/f (consulté le 06 Avril 2022 à 11h 30). * 64 Section I de l'annexe au Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques dans la zone CEMAC. * 65 Section I (2) de l'annexe au Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques dans les Etats de la CEMAC. * 66 Idem * 67 C'est le cas de loi du 11 juillet 2018 portant régime financier de l'Etat et des autres entités publiques. * 68 Cf. Article 5 alinéa 1 de la loi n° 2018 /011 du 11juillet 2018 portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun. * 69 Article 8 de la loi n°2018/012 du 11 juillet 2018 portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun. * 70 Article 11 al 2 de la loi n° 2018/012 du 11 juillet 2018, portant Régime Financier de l'Etat et des Autres Entités Publiques. |
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