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La victimisation du personnage féminin dans Walaandé, l'art de partager un mari et Munyal, les larmes de la patience de Djaili Amadou Amal


par Germaine DANGA MOUDA
Université de Maroua - Master2 2021
  

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En somme, ce chapitre nous a permis, à partir des exploitations des indices textuels, d'entrer dans le cosmos idéologique de notre auteur. Le résultat de l'analyse textuelle montre que Djaili Amadou Amal est une écrivaine féministe. Cependant, elle ne se contente pas seulement de présenter la condition féminine. Elle attire l'attention de la gent féminine africaine en générale et peule en particulier sur un fait. Il revient à la femme en générale de forger son propre destin pour se libérer de la domination masculine si elle estime être sous leur emprise. Comme les épouses d'AlhadjiOumarou, les femmes doivent agir ensemble en synergie pour opérer le changement auxquels elles aspirent. Ce changement viendra de la femme elle-même.

Conclusion générale

L'écriture de la victimisation de la femme dans deux romans de Djaïli Amadou Amal a été explorée tout au long de cette recherche. La femme africaine en général et celle représentée dans le corpus vit une situation d'inconfort. Elle est oppressée de toute part, à la fois par la famille, l'époux, la belle famille. Bien plus, les lois régissant le fonctionnement de la société ou de la famille/foyer ne sont pas en sa faveur. Elle nage dans un tourbillon de règles qui la maintienne en état de captivité. L'objectif était donc de faire voir la situation de sujétion de la gent féminine en ce qui concerne son statut, son rôle et ses conditions de vie dans la société représentée dans l'univers romanesque. En outre, l'état de personnage victime devrait être analysé afin de ressortir les sources, ou les faits qui sont le soubassement du statut de dominée de la femme. Étant donné que des prédispositions sont établies pour la domination, les personnages hommes emploient des moyens mis à leur disposition pour l'effectivité de la subordination. Cette analyse s'est attelée à comprendre ces procédés usités dans le but de maintenir la gent féminine sous le joug de l'homme. Ce qui n'est pas sans conséquence pour elle. Dans son statut de sujet, la femme subit un certain nombre de pratiques qui arrivent à la métamorphoser à la fois psychologiquement et physiquement. L'aspect idéologique de l'écriture de Djaïli n'est pas passé inaperçu. Il a fait partie de l'objectif de cette analyse.

Le cadre théorique dans lequel s'inscrit cette recherche est la Sociocritique telle que théorisée par Claude Duchet. En effet, le recours à la sociocritique était indispensable tout au long du travail, parce qu'elle nous permet de mettre en évidence les différents aspects de tradition dans les écritures romanesques francophones que seule l'analyse littéraire ne peut pas élucider. Cette méthode d'analyse propose une lecture sociohistorique du texte. Selon lui, l'approche sociocritique tente de construire « une poétique de la société, inséparable d'une lecture de l'idéologique dans sa spécificité textuelle » (Duchet, 1971 : 6). En fait, la méthode sociocritique a permis de s'intéresser à ce que le texte signifie, et aussi à ce qu'il transcrit, c'est-à-dire à ses modalités d'intégrer l'histoire au niveau du contenu aussi bien que la forme. Aussi elle s'est avérée efficace et importante pour l'analyse du corpus pour plusieurs raisons ainsi : L'auteure s'est fortement inspirée de la société et de ses faits et pratiques projetés dans la peinture du monde de fiction. De plus, il a été important d'utiliser la méthode sociocritique, car les heurts de la supériorité de l'homme à la femme retombent sur un échantillon des individus faisant partie de la société d'où tous les gens en sont sensibles. Ensuite, la domination masculine dans les sociétés africaines, c'est-à-dire la patriarchie, semble être source d'inspiration pour l'auteure. Ainsi, l'on a étudié l'organisation sociale, politique et économique, tant au niveau des normes que des pratiques en rapport avec la victimisation de la femme.

L'on s'est attelé dans le premier chapitre à étudier les sources de la victimisation dans les deux oeuvres du corpus. En effet, l'imaginaire du peuple représenté dans l'univers littéraire est l'élément duquel la subordination de la femme à l'homme est tramée. S'appuyant sur les croyances et les principes religieux, en l'occurrence l'Islam, les personnages homme font une interprétation subjective de ces éléments. Ils en détournent les sens afin de se placer au-dessus de la gent féminine. Certains préjugés calqués sur l'image de la femme que se représentent les peuples font partie des arguments avancés pour pérenniser la maltraitance. Aussi, la femme, du moment où elle n'a pas droit à la parole, elle ne bénéficie pas non plus de la scolarisation. L'absence de l'éducation scolaire chez la jeune femme ne lui permet pas de réclamer ses droits, encore moins de comprendre les fourberies de l'homme qui n'ont pour seul justificatif que l'affirmation de sa masculinité. Pour ce qui est des traditions, la société peule, source de création pour l'auteur, s'exprime à travers le corpus par des principes liés au patriarcat. La femme se doit de se conformer à ces règles qui sont extériorisés par le pulaaku. Ce principe qui repose sur la patience et la retenu. Ainsi, face aux vicissitudes de la vie au foyer, il est imposé à la femme de patienter, de faire preuve de retenu.

Pour ce qui est des moyens employés par les personnages hommes pour assujettir la femme, ils sont entre autre le mariage forcé, la répudiation, l'éducation discriminatoire, la dépersonnalisation de la femme, la femme muselée. Ainsi, toute femme qui s'écarte des principes du pulaaku ou qui tenterait de se soustraire de l'autorité masculine se voit mariée ou répudiée sans qu'elle n'ait à justifier son attitude. Au-delà, elle est violentée et violée sous prétexte qu'elle appartient, selon l'islam ou la tradition peule à l'homme.La victimisation n'est pas sans conséquence pour les personnages qui prennent part au forfait. Lorsque le patriarcat s'abat avec toute sa rigueur sur la gent féminine, elle manifeste des troubles psychologiques, la famille se disloque, le personnage peut même perdre la vie.

L'écriture de Djaïli Amadou Amal, à travers ses deux romans étudiés, a une forte teneur idéologique. En effet, engagée pour la cause de la femme du sahel, sa production littéraire permet une prise de conscience à la fois des hommes et des femmes. À cet effet, le parcours des personnages jonchés de changements d'attitudes et de regrets permet aux lecteurs de prendre conscience de la situation précaire de la femme. L'auteure véhicule des messages à travers les situations que traversent les femmes et les hommes. D'aucuns regrettent les actes de violence posés à l'égard de la femme, d'autres se révoltent contre le système en place et les hommes.

La recherche a révélé que la domination de l'homme se perpétue. Le patriarcat et la religion donnent la liberté à l'homme de dominer et d'opprimer la femme. Par le biais du sacrée coutume et tradition, l'homme réussi à faire accepter à la femme la mentalité d'infériorité. Par conséquent, la femme, celle représentée dans les deux romans, par rapport à l'homme, est placée à l'arrière-plan de la société. Elle accepte d'accomplir des rôles qui lui sont attribués par la société : une épouse, une procréatrice, une mère, une éducatrice de la formation précoce et un modèle de femme. Elle n'a pas de droits à être écoutée et reconnue. Elle n'a le droit de prendre des décisions dans sa famille et chez le mari même pour les affaires du mariage qui la concernent. Au cours de l'époque coloniale, le statut de la plupart des femmes africaines restait encore inférieur et n'a guère changé de meilleur, en dépit de l'introduction des valeurs occidentales dans la société africaine.

Au fil du récit, certains personnages féminins ont acquis de l'expérience et sont excédées par les agissements des hommes. Ce qui a soulevé chez elles la prise de conscience de leur situation d'opprimées. N'acceptant pas d'être opprimée et exploitée, la femme a eu recours à la révolte pour se libérer du système traditionnel et patriarcal. De nos analyses, il est clair qu'il y a plusieurs formes de révolte par lesquelles les femmes démontrent leur mécontentement de toutes formes de l'oppression contre les hommes. La révolte se manifeste par le biais de rejet, de refus, de réaction, de discours insolent, de mauvais comportement, de libre emploi du corps incluant, pour ne mentionner que ceux-là. Toutes ces formes de révolte sont bien articulées par notre auteure dont les oeuvres ont été explorées dans notre travail. Suite à la révolte, la femme évolue, de la femme ménagère, docile, soumise et passive à celle émancipée. Les personnages femmes ont découvert que leur aliénation par l'homme passe par l'emploi de la tradition et la religion comme mécanismes de l'aliénation. Elles ont compris que le phénomène du mariage comme un système où la femme n'a pas le droit de décision car, elle est contrainte à épouser un homme pour qui le sentiment le plus intime n'est jamais apparu pour parler d'amour. L'imposition d'époux à la femme (mariage forcé) par les familles les réduit au champ minimal de la liberté d'expression dont l'idéal aurait voulu qu'elle puisse donner son assentiment tout comme l'homme. La femme voit alors ce qui peut être le droit à son égard s'envoler comme si de rien n'était.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote