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Gestion administrative et pédagogique des établissements et rendement interne des écoles: cas des lycées du département de la Kabbia au Tchad


par Kadakna BAISSANA
Université de Maroua - Master 2 2014
  

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I.3. La non prise en compte de l'ancienneté du chef d'établissement

Généralement, que ce soit dans l'éducation ou dans une autre institution, la promotion à la tête d'une organisation doit tenir compte de l'ancienneté.

Au Tchad, les nominations aux postes de chefs d'établissement sont théoriquement déterminées par la loi no 16/PR du 13 mars 2006 qui relève que pour être nommé à la tête d'un établissement il faut avoir son nom sur la liste d'aptitude. C'est une liste qui détermine la qualification de l'enseignant, son expérience et son ancienneté dans la fonction. Conformément à cette loi, la réalité sur le terrain est tout autre chose dans le Département de la Kabbia.

D'après notre enquête, 78,43% de nos répondants nous ont affirmé que les nominations des chefs d'établissement ne prennent pas en compte leur ancienneté. Ces données ont été reparties par établissements comme suit : 24 soit 47,05% aux collèges publics, 8 soit 15,64% dans les collèges communautaires, 4 soit 7,84 dans les collèges privés et 4 soit 7,84% dans les lycées. À ce sujet, nos répondants parlent toujours de nomination politique, payante et par affinité. À cet effet, un des répondants affirme que: «  la nomination des chefs d'établissement subit beaucoup plus l'influence politique ; d'où la mauvaise répartition caractérisée par la présence des stagiaires qui ont assez des difficultés à noter les échelonnés ». Selon l'intéressé, il y a une forte présence des stagiaires à la tête des établissements qui rencontrent assez des difficultés par manque d'expérience. Comme solution il propose le désengagement de la politique de l'éducation pour voir une nomination des responsables selon le critère de mérite. Les difficultés de toutes sortes que rencontrent les stagiaires à la tête des établissements ont des répercussions directes sur le rendement scolaire des élèves. C'est pourquoi une promotion par mérite serait souhaitable pour un résultat probant.

Constatant la présence nombreuse des contractuels non formés à la tête des établissements, un autre répondant regrette l'absence de l'État dans l'établissement en général et au lycée en particulier. Face à ce constat, il affirme ce qui suit : « Si les nominations aux postes des chefs d'établissement ne respectent pas les mérites, c'est parce qu'il y a trop de flou dans l'appareil d'État ». Selon lui, il ne peut pas y avoir de raison pour qu'un lycée puisse manquer d'un responsable en l'occurrence le lycée de Léo Mbassa où les enfants préparent l'examen surtout le baccalauréat. L'absence de ce personnage important a selon lui entrainé un grand retard dans le démarrage des classes et ce qui a influencé sur les résultats des élèves.

Le répondant d'un autre collège, lui n'apprécie pas la nomination au poste de responsabilité des chefs d'établissements qui se négocie auprès de l'équipe d'Inspection. Il souligne avec précision que pour avoir un directeur ou un enseignant, il faut débourser une somme de trente mille francs (30000 FCFA), une chèvre, un sac du riz. La lecture du tableau ci-après nous en dit mieux en ce qui concerne l'ancienneté des chefs d'etablissement dans la Kabbia.

Tableau no20 : Répartition de chefs d'établissement selon l'ancienneté

Ech Statut Statut

Ech

Bac

Instituteurs

CAP-CEG

CEG

Licence

Maitrise

Total

%

00

04

11

11

2

1

29

56,86

1er

 
 

4

1

 

5

9,80

 
 

3

2

2

7

13,72

 
 
 

6

 

6

11,76

 
 
 

1

1

2

3,92

 
 
 
 
 
 
 

 
 

1

 
 

1

1,96

 
 
 
 
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 

 
 
 
 

1

1

1,96

10è

 
 
 
 
 
 
 

11è

 
 
 
 
 
 
 

Total

04

11

19

12

5

51

100

Source de tableau : Donnés des enquêtes

Dans ce tableau la lecture nous fait comprendre qu'il y a un nombre important des chefs d'établissement 29 soit 56,86% qui n'ont pas d'échelons. Ce sont soit des bacheliers ou des instituteurs bacheliers qui en principe, devaient s'occuper des établissements primaires. Ils sont au nombre de 15 soit un pourcentage de 29,41% suivis de 11 stagiaires soit 21,56% à diriger l'établissement secondaire premier cycle. Les chefs d'établissement titulaires d'un échelon et plus sont au nombre de 22 soit 43,13% repartis à la tête des établissements secondaires comme moyens. Conformément à la loi 900, on note à la tête des établissements des contradictions où les certifiés destinés à l'enseignement secondaire se retrouvent à la tête des collèges et des professeurs de collège à la tête des lycées. Tel est le cas de collège de Pont Carol où le directeur est un professeur certifié contrairement au lycée de Bongor Hanhan où le proviseur est un professeur de CAP-CEG de 1er échelon ainsi que le lycée de Domo Dambali. L'autre cas est celui de lycée de Léo Mbassa ou il n'y a pas un proviseur et c'est un contractuel diplômé en relations internationales qui dirige l'établissement.

Cette mauvaise promotion au poste de chef d'établissement a été également reconnue par le secrétaire général du syndicat des enseignants du Tchad qui affirme que : « Dans un lycée de la place, on a poussé l'outrecuidance jusqu'à nommer un professeur de CEG stagiaire comme directeur de CEG avec sous son autorité des professeurs certifiés bardés d'échelons. Quelque part au Salamat souligne-t-il, on a nommé un instituteur adjoint stagiaire comme Inspecteur de l'Enseignement Primaire ». Pourtant, la loi no 17/PR/2001du 31 décembre 2001 en son article 53 dit qu'il est formellement interdit de faire assumer par un stagiaire les responsabilités afférentes aux fonctions de direction ou de contrôle. Cela nous amène à nous interroger sur ces écoles et leur rendement. Or la qualité de chef d'établissement est l'élément principal pour la réussite de l'établissement. Selon l'Agence de Coopération Culturelle et Technique (1992), les directeurs d'établissements scolaires, d'après leur formation pédagogique et administrative, déterminent dans une mesure importante, les conditions dans lesquelles l'enseignement est dispensé et la possibilité d'une amélioration de la formation dans l'école même. Pour Kantabazé (2010), une étude menée en Egypte auprès de 60 écoles aboutit aux résultats similaires. En effet, ladite recherche conclut que les meilleurs résultats scolaires sont enregistrés dans les écoles dont les directions sont confiées aux personnes bénéficiant d'une formation professionnelle et une longue expérience dans l'enseignement avant la date d'accéder à ce poste.

L'ancienneté seule permet de connaitre l'agent, sa qualification et son expérience dans le domaine. L'UNESCO (2006 ) nous fait comprendre que dans plusieurs pays, notamment en Allemagne, on a envisagé doter les établissements scolaires de chefs d'établissement formés en administration et en gestion et sans expérience directe de l'enseignement. Le même document souligne que dans la plupart des pays du monde, les chefs d'établissement doivent être qualifiés comme enseignants et posséder une ancienneté de fonctions dans un établissement d'enseignement allant de 2 à 10 ans.

En définitive, la promotion au poste de chef d'établissement a été reconnue par nos informateurs comme illogique du fait que cela ne tient pas compte du professionnalisme, de l'ancienneté des agents nommés. Le personnels non expérimentés promus au poste de responsabilité éprouvent d'énormes difficultés dans le management des établissements.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams