PARAGRAPHE II : L'INVIOLABILITE ET LES PRIVILEGES DE
JURIDICTION
La doctrine consacre la « summa divisio »
entre l'irresponsabilité, l'inviolabilité et les
privilèges de juridiction. Il ne faut pas surtout confondre ces trois
concepts.
Dans le cas d'irresponsabilité, il y a interdiction des
poursuites judiciaires est la conséquence d'un vide juridique et ne
constitue pas une règle immunitaire autonome, on sous-entend ici, qu'il
n'y a pas d'infraction légale, donc pas de poursuite possible.
L'élément légal de l'infraction et tout bonnement
supprimé, à tel point qu'il n'y a point, qu'il n'y a pas eu de
délit.
A l'instar d'irresponsabilité, les parlementaires
bénéficient d'inviolabilité. En ce sens «
qu'aucun parlementaire ne peut, en cours de sessions, être poursuivi
ou arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu'avec
l'autorisation de l'assemblée nationale ou du sénat, selon le
cas. En dehors de sessions, aucun parlementaire ne peut être
arrêté qu'avec l'autorisation du bureau de l'assemblée
nationale ou du sénat, sauf en cas de flagrant délit, de
poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La
détention ou la poursuite d'un parlementaire est suspendu si la chambre
dont il est membre le requiert. La suspension ne peut excéder la
durée de la session en cours 55»,
L'inviolabilité parlementaire est liée aux actes
qualifiés d'extérieurs à la fonction de parlementaire et
tend à garantir le libre exercice de cette dite fonction.
53 LUZOLO Bambi LESSA E.J, syllabus de procédure
pénale, destinés aux étudiants de G2 droit, Kinshasa,
UNIKIN, 1999, p.35
54 JOSE TASOKI MANZELE, op.cit., p.56
55 Article 104 de la constitution du 18 février
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Dans l'inviolabilité parlementaire, nous sommes en
présence d'une infraction qui existe et qui peut être
envisagé mais selon, le respect d'un régime procédural
spécial, non dérogeable.
L'inviolabilité a pour objet d'éviter que
l'exercice du mandat parlementaire ne soit entravé par des poursuites
visant des actes accomplis par les parlementaires. Elle tend à
déférer l'action pénale sans faire disparaitre le
caractère illicite des faits reprochés.
Il sied de signaler que, dans tous les cas le parlementaire
fautif des faits infractionnels ne peut être poursuivi, que lorsque son
immunité est levée. L'inviolabilité parlementaire consiste
en l'impossibilité d'interpeller, d'arrêter ou d'imposer une
quelconque restriction de la liberté d'un parlementaire sans avoir
obtenu l'accord préalable du bureau de la chambre à laquelle il
appartient.
C'est toujours le mandat qui est protégé
à travers la personne du parlementaire. Mais la nature des
immunités de forme (inviolabilité) diffère de celle de
l'immunité de fond (irresponsabilité), car, ce dernier soustrait
l'élu au droit commun parce qu'une justification le couvre et
présente de ce fait un caractère absolu et perpétuel,
alors que l'inviolabilité ne signifie pas l'impunité
pénale.
Elle s'analyse en une immunité de procédure,
garantissant le parlementaire pris en qualité d'individu contre les
poursuites pénales abusives ou vexatoires intentés contre lui, a
raison des faits étrangers à l'exercice du mandat.
Destinés à éviter que cet exercice ne soit pas
entravé par des poursuites ou par l'arrestation, l'inviolabilité
protège, au-delà de la personne du parlementaire,
l'intégrité de la représentation
nationale56.
Il sied de préciser que, cette autorisation, n'est pas
importante pour poursuivre un parlementaire dans le cas suivants :
? Lorsque l'arrestation est consécutive au flagrant
délit ;
? Lorsque l'arrestation intervient dans le cadre de poursuite
déjà
autorisées par la plénière de
l'assemblée nationale ou du sénat ; ? Lorsque l'arrestation
intervient en exécution d'une peine privative
de liberté dans le cadre d'une condamnation
déjà définitive57.
56 P. AVPRIL et J. GICQUEL, op.cit., p.48
57 NYABIRUNGU MWENE SONGA, op.cit., p.243
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Enfin, aux termes de l'article 107(in fine) de la
constitution, la détention ou la poursuite d'un parlementaire est
suspendue si la chambre dont il est membre le requiert. La durée d'une
telle suspension ne saurait excéder celle de la session en cours
Dans une analyse purement scientifique on ne devait pas parler
de la levée d'immunité mais plutôt
d'inviolabilité.
Contrairement aux privilèges de juridiction qui sont,
d'après le professeur LUZOLO BAMBI, des dérogations aux
règles de compétences matérielles répressives qui
font que certaines catégories des personnes puissent être
jugées par des juridictions bien déterminées, à l'
exclusion de toutes les autres. Et c'est dans le souci d'assurer une bonne
justice.58
Il s'agit d'éviter que la qualité de la personne
poursuivie n'influe négativement sur l'objectivité du
juge59.
Cette institution trouve son fondement dans le souci de voir
même les personnes jouissant d'un haut rang social, répondre de
leurs actes répréhensibles sur le plan pénal sans qu'elles
aient l'occasion de fausser par leur influence la bonne administration de la
justice.
C'est pourquoi on attribue cette compétence
répressive à un juge dépourvu de la compétence
matérielle, à l'égard d'une infraction. L'on se fonde
l'occurrence sur le statut personnel de délinquant,
généralement sur les fonctions qu'il occupe dans la
société pour lui designer un juge, suffisamment mur et
difficilement influençable au regard du nouveau technique ou social
qu'il aura atteint à mesure que sa carrière a connu
l'évolution pour autant, les privilèges de juridiction tendent
à protéger la justice ou en assurer l'indépendance du
juge. Toutefois, il importe d'observer que les privilèges de juridiction
peuvent se révéler préjudiciables à certaines
justiciables dans le sens des derniers, pour les affaires qui leurs concernent,
sont privés du double degré de juridiction60.
Tous égaux devant la loi, nous ne sommes pas pour
autant tous identique, devant la loi. Cela s'explique par le fait que nous ne
sommes pas tous justiciables de mêmes
58 LUZOLO BAMBI LESSA E.J et BAYONA Ba MEYA N.A,
Manuel de procédure pénale congolais, Kinshasa, PUC,
2011, p.91
59 ANGELIQUE SITA MUILA, op.cit., p.82
60 TASOKI MANZELE J.M, procédure pénale
congolais, Ed. Harmattan, 2016, p.31
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juridictions; c'est à dire, certaines infractions
commises par une certaine catégorie des personnes ne sont susceptibles
d'être instruites et jugées que par une juridiction dictées
par la loi, même si l'acte constitutif de l'infraction est du droit
commun.
C'est ainsi qu'à chaque fois qu'une personne, pour une
infraction donnée, est traduite, sur base de sa qualité ou sa
position socioprofessionnelle, devant une juridiction autre que celle dont la
compétence matérielle a été attribuée pour
ladite infraction, il y a privilège de juridiction. C'est une
dérogation aux règles de compétence matérielle des
juridictions établis par le législateur.
A cet effet la constitution reconnait à la cour de
cassation une compétence exclusive pour autoriser la mise en
détention des parlementaires61.
61 Article 153 alinéas 3 point 1 de la constitution du 18
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