SECTION II : CRITIQUES ET PERSPECTIVES
§1 : CRITIQUES
Il est évident que les immunités parlementaires
sont des prérogatives qui mettent les parlementaires à l'abri des
poursuites judiciaires en vue d'assurer le libre exercice de leur mandat.
Le parlementaire étant un acteur institutionnel qui
parle au nom et pour le compte de son mandat reçu du souverain primaire
qui est le peuple, il ne peut qu'être juste et normal que les opinions
qu'ils expriment dans le cadre de sa mission soient immunisées en vue
d'accorder une facilité à exprimer et dire ce qu'il pense au
sujet de la gestion de la chose publique.
Mais aujourd'hui la population congolaise est victime des
exactions de toutes sortes de la part des parlementaires, elle ne peut
malheureusement pas compter sur la justice officielle pour être
rétablis dans ses droits, laquelle est dominée par le spectre
d'impunité ou la règne d'une justice complaisante,
tolérante et inégale.
Le principe de l'égalité de tous devant la loi
est un pallier de l'Etat de droit, il devient cependant difficile voire
même impossible de dire que nul n'est censé ignorer la loi si les
parlementaires le sont.
Le législateur en prévoyant à l'article
107 Al1 de la constitution les immunités parlementaires, il s'est
limité seulement à dire «qu'aucun parlementaire
ne peut être poursuivi, recherché, arrêté,
détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis par
lui dans l'exercice de ses fonctions. » 68mais ne
précise pas quelle sorte d'opinion ou vote qui peut être couvert
d'irresponsabilité, devant cette ambiguïté, nous pensons que
les immunités apparaissent comme un feu vert qu'on donne aux
parlementaires de vivre dans une délinquance totale.
Et dans son alinea2 dit en outre « Aucun
parlementaire ne peut, en cours de sessions, être poursuivi ou
arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu'avec
l'autorisation de
68 Article 107 al 1 de la constitution du 18 février
2006
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l'assemblée nationale ou du sénat,
selon le cas. En dehors de sessions, aucun parlementaire ne peut être
arrêté qu'avec l'autorisation du bureau de l'assemblée
nationale ou du sénat, sauf en cas de flagrant délit, de
poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La
détention ou la poursuite d'un parlementaire est suspendu si la chambre
dont il est membre le requiert. La suspension ne peut excéder la
durée de la session en cour 69».
Hormis le cas de flagrance la poursuite d'un parlementaire est
conditionnée par l'autorisation du bureau dont il fait partie alors que
ce qui se fait dans la pratique lors qu'il faut enlever les immunités
d'un parlementaire est déplorable.
Dans la pratique nous découvrons une sorte d'influence
politique ou précisément une forme de discrimination entre
parlementaires, cette discrimination se manifeste selon que le parlementaire
appartient à telle ou telle autre famille politique ou selon qu'il est
de la majorité ou de l'opposition, au lieu que l'assemblé
nationale ou le sénat se limite à regarder le caractère
sérieux et sincère de la demande de la levée
d'immunité.
D'ailleurs lors de la rentrée judicaire de 2017 le
Procureur General près la cour de cassation FLORY KABANGE NUMBI,
déplorait le fait que pour la période allant de 2012 au 15
septembre 2017 ; 103 dossiers avaient été ouverts à son
office dont 97 pour l'assemblée nationale, 1 pour le Senat et 5 cas de
flagrance, sur les 98 réquisitoires de demande d'autorisation transmis
au parlement ; 7 seulement ont reçu suite à l'Assemblée
nationale soit un taux de 6,78%. Nous cogitons que ces immunités
affaiblissent le pouvoir judicaire en donnant l'impression de cautionner
l'impunité et l'autoprotection de certains justiciables.
Le principe même et les modalités de
l'immunité parlementaire dépendent, entre autres du fondement
historique de nos droits et de la conception qu'il est possible d'avoir des
rapports entre les pouvoirs. Mais son existence et sa pratique obligent
à considérer son impact sur l'opinion publique.
A la lumière de la séparation des pouvoirs, le
pouvoir judiciaire peut remplir ses missions en toute indépendance sans
se soucier des poursuites et pressions de la part du pouvoir exécutif ou
législatif et du citoyen.
69 Article 107 al2 de la constitution du 18 février
2006
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Mais le principe de la séparation de pouvoir et
d'indépendance du juge veulent que le juge ne soit soumis à
aucune pression, ni contrainte ou influence de quelques organes ou aux
individus que ce soit.
La constitution consacre également cette
indépendance de pouvoir judiciaire vis-à-vis du pouvoir
exécutif et législatif. Sur ce nous mettons l'accent sur la mise
sous tutelle du pouvoir judiciaire par le pouvoir législatif voire
même exécutif, ces derniers en vue de protéger ses sujets,
auteurs de certains crimes graves, non seulement qu'il s'ingère dans des
affaires judicaires mais également, il se permet donc à donner
des ordres au pouvoir judiciaire, qui est censé être
indépendant. C'est pourquoi l'indépendance du pouvoir judiciaire
a toute les mérites d'empêcher toute incursion
irrégulière dans la sphère judiciaire.
De ce fait la constitution donne au pouvoir législatif
le pouvoir de contrôler la justice, c'est ce qui est à la base de
l'impunité pour la plus part des infractions commises par les
parlementaires.
D'ailleurs aux termes de l'article 149al1 de la constitution
dispose que « le pouvoir judiciaire est indépendant du
pouvoir législatif et exécutif 70»
et l'article 150 ajoute que « le pouvoir
judiciaire est le garant des libertés individuelles et des droits
fondamentaux des citoyens »71. Ici la
constitution pose deux principes celui de la séparation de pouvoir et
d'indépendance du pouvoir judiciaire, et ces principes veulent que le
juge ne sois soumis à aucune pression, ni contrainte ou influence de
quelques organes ou aux individus que ce soit.72 C'est-à-dire
tout simplement que le juge n'est soumis qu'à l'autorité de la
loi, donc nous trouvons inconcevable, que le pouvoir législatif puisse
avoir le pouvoir de décider sur l'opportunité des poursuites de
ses sujets.
Nous pensons que la relation entre le pouvoir judiciaire et le
pouvoir législatif peuvent s'elle n'est pas bien encadrée,
être à la base d'un dysfonctionnement pouvant entrainer
l'effondrement de l'appareil judicaire. C'est pourquoi le pouvoir judiciaire a
tout le mérite d'empêcher toute irrégularité pour le
bon fonctionnement de l'appareil judiciaire.
Les pouvoirs de l'Etat sont organisés de façon
que chacun arrête l'autre, et c'est dans cette optique que nous trouvons
anormal voire même intolérable que les membres
70 Article 149al1 de la constitution du 18 février 2006
71 Article 150 de la constitution du 18 février 2006
72 Association congolaise pour l'accès à la
justice, rapport annuel 2012
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du pouvoir législatif échappent aux poursuites
judiciaires. L'idée que nous nous donnons ici de la séparation du
pouvoir est que le pouvoir arrête le pouvoir par le biais d'un
contrôle mutuel, mais c'est un contrôle visant l'équilibre
des pouvoirs et non une immixtion d'un pouvoir dans les activités
essentielles de l'autre.
Eu égard, les parlementaires commettent beaucoup d'abus
avec toute conscience parce qu'ils savent qu'ils ne seront pas poursuivis,
puisqu'ils sont bénéficiaires des immunités,
d'inviolabilité et des privilèges de juridiction, c'est pourquoi
on doit leur bloquer tous ces avantages illégaux afin qu'ils
répondent devant la justice comme tout autre citoyen et ça sera
la bonne justice que tout le monde va applaudir.
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