PARAGRAPHE II- L'ADAPTABILITE DE LA JUSTICE ARBITRALE
Longtemps conçu comme un simple mode d'apaisement des
contentieux, l'arbitrage moderne se caractérise par sa grande
technicité et sa flexibilité.
Ce faisant il est indéniable que, quelle que soit sa
technicité, la pratique arbitrale révèle l'application des
principes universels tels la bonne foi, le respect des contrats, de l'ordre
public, le respect du contradictoire ...
Par ailleurs, l'arbitrage se caractérise par la grande
prévisibilité des solutions arbitrales. Cette
prévisibilité résulte de la spécialisation de plus
en plus notoire des arbitres choisis par les parties elles-mêmes ou par
une institution arbitrale pour leur compétence, leur expérience
ou leur connaissance d'un domaine particulier tel le négoce, le
transport.
A- L'ARBITRAGE EN DROIT OU EN EQUITE
Les clauses compromissoires insérées dans les
contrats d'affaires ou les compromis rédigés à la suite de
négociations pour le règlement des litiges nés
d'opérations complexes montrent que le contexte économique ne
peut être étranger au choix du mode de règlement des
conflits qui opposent les parties lors de l'interprétation ou de
l'exécution des contrats. Lorsque le droit est bien connu et
établi, lorsque le contrat est conclu et ses stipulations respectent les
règles juridiques, on peut raisonnablement penser que le mode de
règlement des conflits qui présente le plus de
prévisibilité et de sécurité est l'arbitrage en
droit.
Cependant, les entreprises ne cessent d'innover dans la
manière de réaliser leurs opérations. C'est
l'intensité de l'innovation contractuelle qui fait que s'en remettre
seulement au droit c'est faire un saut dans l'inconnu. Le droit lui-même
ne cesse d'évoluer et son inadaptation, son absence de clarté
ainsi que ses contradictions rendent difficile la détermination de la
règle de droit exactement applicable. Ce qui justifie que l'arbitre
tranche en équité.
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Il est souhaitable que les arbitres ne tordent pas la
règle juridique pour aboutir à une solution qui s'apparenterait
à une amiable composition. L'arbitre règle les litiges en se
référant aux stipulations contractuelles. En vertu du principe
"pacta sunt servanda"63, le contrat s'impose à lui. Il
constitue la loi des parties et l'arbitre doit l'appliquer.
L'arbitrage en droit est le moyen le plus sûr pour les
parties de conserver la plus grande maîtrise sur l'exécution du
contrat, y compris sur la solution des problèmes apparus lors de son
exécution. L'idéal est évidemment que le contrat soit le
plus complet possible, de telle sorte que les litiges puissent être
tranchés par la simple application des principes et des règles
contractuelles, que sa rédaction soit précise et claire , qu'il
ne comporte aucune contradiction, et qu'il soit rédigé dans le
respect des règles de droit. A défaut, il convient d'opter pour
l'arbitrage en équité.
La mission de l'amiable compositeur est de rechercher la
solution équitable pour résoudre le conflit. Il n'a pas à
se déterminer par rapport à une règle de droit sauf
évidemment la règle d'ordre public. Selon la COUR DE CASSATION
française l'équité consiste à rechercher la
solution la plus juste pour régler la difficulté64.
En tout état de cause, un contrat
équilibré respectant les intérêts des deux parties
aura évidemment plus de chance de bien passer le test de
l'équité qu'un contrat lésionnaire65. Il peut
être important d'introduire le contrat par un exposé des motifs
expliquant clairement la commune intention des parties de faire régler
leurs litiges en équité. Par ailleurs, la bonne foi et la
loyauté lors de la conclusion du contrat et de son exécution sont
aussi des éléments déterminants dans la bonne
appréciation de l'équité.
63 Ce principe postule que les contrats doivent
être respectés par les parties qui les ont conclus, ce principe
résulte également de l'article 1134 du code civil
64 Jean PAILLUSSEAU, Article précité
65 Il n'est d'ailleurs pas sûr que le
lésionnaire sorte indemne d'un jugement en droit qu'il s'agisse d'une
sentence arbitrale ou du jugement d'une juridiction étatique. Les
principes de bonne foi, de loyauté, de contrepartie sont de plus en plus
appliqués par les juges et les arbitres.
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