§2. La période post coloniale
Ce paragraphe va nous permettre de faire un regard sur les
différentes grèves qui ont été
déclenchées après la colonisation de la République
Démocratique du Congo notre pays et de comparer par rapport à la
période coloniale, comment l'administration coloniale réagissait
lorsqu'il y a déclenchement de la grève.
Ici, nous allons prendre la grève de l'ONATRA parce
qu'elle est parmi des plus anciennes sociétés et qui a
enregistré beaucoup de grèves, la grève de la SNCC ainsi
que la grève de HABARI KANI du 11 février 2015 ; ces deux
dernières grèves constituent des grèves récentes
enregistrées à Lubumbashi.
A. La grève de l'ONATRA
1. La grève Du 23 mars 1976
Cette grève était déclenchée
à cause de certaines difficultés de la trésorerie qui a
fait que l'employeur ne puisse pas payer la gratification conventionnelle aux
travailleurs.
Les travailleurs se sont concertés d'attendre d'abord
la paie du salaire du 20 mars et alors immédiatement après faire
la grève85.
Les travailleurs n'avaient même pas recouru à
l'inspection du travail pour la conciliation ni, même saisir une
autorité en dehors de l'entreprise.
MWABILA MALELA note que si en 1976 les grèves de la
SNCZ, de la GECAMINES et de l'ONATRA avaient semblé revêtir
quelques gravités par moment elles se sont néanmoins
déroulées en dehors de toute concertation entre les travailleurs
de ces différentes entreprises, sans doute par un effet
85 LUWENYEMA LULE,
op.cit, p.379.
[27]
d'entraînement et d'imitation que par un «
débordement » de la conscience de condition et de la
fidélité à l'entreprise86.
Les années 1976 et 1977 étaient marquées
par quelques mouvements de grève enregistrés à la fois
à Kinshasa et à Lubumbashi, et dans quelques centres industriels
comme Likasi et Kolwezi.
Ces mouvements de grève n'avaient pas une grande
envergure dans l'ensemble à cause de la réaction
énergétique de l'instance politique qui les considérait
comme contraire à l'éthique politique.
2. La grève du 21 mai1979
Suite au coût très élevé de la vie
et le pouvoir d'achat insignifiant les travailleurs de l'ONATRA
s'étaient concertés pour réclamer une augmentation des
salaires et des avantages sociaux.
Non satisfaits dans leur revendication les travailleurs se
sont décidés de faire grève, ils attendent d'abord
à toucher le salaire du mois, après avoir touché, ils
déclenchent la grève.
Cette attitude leur permettait de faire vivre leurs familles
pendant la période de la grève dont la durée était
incertaine et de tenir le coup.
Durant, cette période les grévistes
étaient menacés par les militaires et des agents des services de
sécurité pour qu'ils reprennent le travail, aucun travailleur ne
voulait reprendre parce qu'ils avaient des moyens de substance, le salaire
perçu avant le déclenchement de la grève.
Au bout de six jours de grève, l'employeur céda
et accorda une augmentation salariale de 3% pour les agents de cadre, et 15%
pour les travailleurs relevant de la classification générale des
emplois87.
Les travailleurs avaient repris le travail lorsque leur
employeur avait répondu à leur revendication tout en majorant les
taux d'indemnités de logement et de transport ainsi que les allocations
familiales ; le travail avait repris le 27 mai.
86 MWABILA MALELA, op.cit, p.7.
87 LUWENYEMA LULE, op.cit, p.380.
[28]
Tout au long de cette procédure, l'inspection du
travail n'était pas du tout associée au règlement de ce
conflit88.
Ceux-là qui étaient associés, il y avait
les responsables de l'ONATRA, le commissaire d'Etat aux transports ou soit le
ministre des transports et communications et l'UNTZa.
Nous pouvons dire à ce sujet que l'inspection du
travail était écartée comme d'habitude de toute
procédure de conciliation de conflits du travail ; les travailleurs et
les employeurs se contentaient seuls en cas de conflits collectifs du
travail.
3. La grève du 21 mai 1980
Les travailleurs de l'ONATRA ne pouvaient plus digérer
la mauvaise politique salariale pratiquée par
l'employeur89.
Comme il était de coutume à l'ONATRA, les
travailleurs touchaient d'abord la prime du 20 courant et après ils
déclenchent la grève le jour suivant.
La cause la plus primordiale de cette grève, il
existait au sein de la société une très grande
disparité entre les primes de fonction accordées aux autres
travailleurs relevant de la classification générale des
emplois.
Cette grève s'était soldée au
détriment des travailleurs, car aucune solution concrète
n'était apportée compte tenu des difficultés
financières de l'entreprise, l'employeur avait invité la
délégation syndicale pour qu'elle sensibilise les travailleurs
pour la reprise du travail.
Cette grève était un échec pour les
travailleurs par rapport aux autres grèves précédentes
auxquelles l'employeur répondait positivement à leur
revendication.
4. La grève du 21 octobre 1983
Trois ans plus tard les travailleurs de l'ONATRA avaient
estimé que la
somme de 144 Zaïres allouée au titre
d'indemnité de logement s'avérait dérisoire face au
coût des loyers pratiqués dans le marché immobilier.
88LUWENYEMA LULE, op.cit, p.380. 89Ibidem.
[29]
Les travailleurs avaient adressé des revendications
à l'égard de leur employeur, mais ce dernier avait refusé
de négocier avec la délégation syndicale.
Le refus de négocier avec la délégation
syndicale poussa les travailleurs à déclencher la grève.
Au terme de 3 jours de grève l'employeur avait cédé et il
avait accordé l'indemnité de logement à 450 Zaïres et
les travailleurs avaient repris le travail.
Nous pouvons signaler aussi que les travailleurs avant de
déclencher la grève, ils avaient attendu à toucher le
salaire du mois comme d'habitude pour tenir le coup pendant la période
de la grève.
5. La grève du 21 janvier 1985
L'employeur avait promis une augmentation salariale aux
travailleurs depuis le mois de novembre 1984, et pourtant à cette
période le programme de redressement économique convenu avec le
fonds monétaire international ne permettait pas au conseil
exécutif d'envisager une quelconque majoration des salaires dans le
secteur public et paraétatique90.
A la paie du 20 décembre 1984 les travailleurs
étaient surpris que la majoration salariale promise par l'employeur ne
fût pas réalisée. Cette situation avait poussé les
travailleurs à négocier avec l'employeur, mais celui-ci fit
sourde oreille.
Les travailleurs s'étaient décidés dans
le calme d'attendre la paie du 20 janvier, leur habitude était d'abord
d'attendre la paie du mois pour faire la grève.
Au sixième jour de la grève le président
de la République avait invité une délégation de 300
travailleurs de l'ONATRA à la cité du parti à
N'selé en vue d'entendre leurs doléances91.
A partir de cette rencontre qu'avait organisé le
président avec la délégation des travailleurs ce qui
permit le président de révoquer le président
90LUWENYEMA LULE, op.cit, p.380.
91Ibidem, p.382.
[30]
délégué général (Monsieur
Honoré PAELINCK) et annonça la nomination du citoyen LUKUSA
MUENGULA92.
Le P.D.G. était reproché de la démagogie,
la non information des travailleurs, l'insubordination par le non respect de
l'engagement pris par le conseil exécutif du redressement de
l'économie nationale.
De toutes les grèves enregistrées à
l'ONATRA, nous avons constaté que les travailleurs avaient toujours
l'habitude avant de procéder au déclenchement de la grève,
ils attendaient d'abord qu'on leur paie le salaire du mois courant, ce salaire
leur permettait de tenir le coup pendant la grève.
Et puis, les travailleurs ne recouraient pas à la
procédure légale en cas de conflit collectif du travail, ils se
contentaient d'arrêter le travail, et l'employeur était tenu de se
mettre sur la table des négociations avec la délégation
syndicale de l'entreprise afin de trouver un compris, et dans d'autres
situations l'armée intervenait pour remettre de l'ordre, tout en
arrêtant les meneurs.
|