C. Les Pastoralies
Au mois d'août 2008 a eu lieu sur le plateau de
Beille en Ariège au dessus du village des Cabannes un
évènement intitulé: « Pastoralies, la fête de
la montagne vivante » organisée par l'ASPAP avec pour partenaires
le Conseil Général d'Ariège- Pyrénées, le
Pays des vallées d'Ax et la station de ski du plateau de Beille. «
Vous aimez la montagne et vous avez envie de la comprendre: éleveurs
transhumants, bergers, vachers, professionnels du tourisme, de
l'aménagement de l'espace montagnard, producteurs fermiers...vous
révèlent les multiples vocations du pastoralis
me.»6. Il y a beaucoup de visiteurs bien que le temps soit
très brumeux. Sur une partie du site on trouve un marché avec des
stands de produits du terroir (miel, charcuterie, fromage,...), un forgeron qui
vend ses couteaux, un vendeur de vêtements (dont des capes de berger en
laine),...on trouve aussi des stands liés au tourisme, un pisciculteur a
même installé un bassin et on peut y pêcher des
truites.
Sur le stand de la Fédération Pastorale de
l'Ariège (association se présentant comme « rassemblant des
acteurs du monde rural montagnard pour une meilleure prise en compte de
l'espace et de ses usages ») on trouve des panneaux explicatifs sur
différents sujets tels que: la conduite des troupeaux en estive,
l'entretien des estives etc. Sous la même tente se trouve le stand de
l'ASPAP: vente de tee-shirts, livres, DVD, du numéro «
spécial ours » du magazine
« l'Ariègeois ».
Différentes races domestiques
pyrénéennes sont présentées. Il y a un troupeau de
chevaux de
6 Extrait de la plaquette de présentation de
l'évènement reproduite en annexe
Merens, des ânes des Pyrénées, des
chèvres pyrénéennes (en voie de disparition). On trouve
aussi le chien de Carélie qui n'a rien de pyrénéen mais
qui est utilisé pour la chasse au gros gibier, notamment à l'ours
! Un des évènements majeurs de la journée:
l'arrivée du troupeau de vaches gasconnes.
![](Reintroduction-de-l-ours-dans-les-Pyrenees-Discours-representations-et-processus-d-entree-en3.png)
La chèvre pyrénéenne L'âne des
Pyrénées L'arrivée du troupeau de
vaches gasconnes
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Tout au long de la journée un animateur fait des
commentaires au micro, quand il ne parle pas, ce sont des chants traditionnels
(ariègeois, pyrénéens) en patois qui sont diffusés.
Si on a réservé on peut participer au « grand repas
Ariègeois ».Le public est familial, on voit beaucoup de voitures
immatriculées dans la Haute-Garonne et dans d'autres départements
plus éloignés, sûrement des personnes en vacances dans la
région.
L'après-midi a lieu un forum dont
l'intitulé du programme est: «Pour une biodiversité à
visage humain », il y sera surtout question de l'ours et de la gestion des
estives. Les discours sont passionnés. Ensuite des interventions plus
scientifiques sont faîtes par des techniciens pastoraux et un
biologiste.
Un technicien pastoral de la Chambre d'Agriculture
base son discours sur une étude réalisée par
l'INRA7; des observations ergonomiques montrent que les
éleveurs travaillent beaucoup, qu'ils ont des conditions de travail
pénibles et qu'avec des ours en plus, « on rend des gens malheureux
» et cela crée des « difficultés humaines
».
Ensuite un technicien de la Fédération
Pastorale prendra l'exemple d'une estive où la
vulnérabilité du troupeau a été analysée et
où ont été faites des propositions pour protéger
l'estive des attaques d'ours, pour limiter les risques, car il estime que ce
n'est pas possible de les supprimer totalement. Il met en avant le coût
important de l'aménagement de l'estive (entre 400000 et
500000
7 Institut National de la Recherche
Agronomique.
11
euros). Et il estime que les mesures de protection ont un
impact négatif sur l'estive et sur le troupeau, car les bêtes
étant rassemblées dans le bas de l'estive, il y a un abandon des
bons quartiers, une obligation de réduire les effectifs et au final une
fermeture du milieu (la végétation ligneuse se développe
sur les prairies qui ne sont plus pacagées). La concurrence entre les
bêtes pour la nourriture étant plus importante, les agneaux
grossiraient moins et le regroupement des bêtes favoriserait les
maladies. De plus, des attaques pourraient quand même avoir lieu ou bien
elles se répercuteraient sur les estives voisines moins bien
protégées.
Le biologiste8 qui intervient ensuite
argumente autour du fait que, si l'estive n'est plus pacagée, de
nombreuses espèces de plantes et de micro-organismes, dont la
présence est liée à celle des bêtes, vont
disparaître en entraînant un recul de la biodiversité
montagnarde.
Il apparaît clairement que ce qu'ont voulu mettre
en avant les organisateurs de cette journée ce sont les hommes, leurs
troupeaux et donc la « culture montagnarde » liée à une
pratique pastorale, la transhumance; en d'autres termes ce qu'ils estiment mis
en danger par la présence de l'ours. C'est aussi une
démonstration de leurs pratiques et de leur savoir-faire.
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