2. De la situation d'appel à la question de
départ
2.1. Situation d'appel
Etudiante en DTS IMRT j'ai pu au cours de mes trois
années de formation réaliser de nombreux stages en milieu
privé et publique. Pendant mes stages, quelle que soit la
spécialité rencontrée, j'ai toujours posé les
même questions aux manipulateurs qui me formaient : «
Rencontrez-vous souvent des situations d'urgence, comme un arrêt
cardio-respiratoire par exemple ? » ou « Est-ce que cela vous arrive
souvent d'avoir une urgence vitale pendant un examen ? »
Innocemment au départ puis au fur et à mesure de
mon avancée dans la formation et de la construction de ma conscience
professionnelle je me suis sérieusement posée la question. Et je
l'ai très sérieusement posée aux manipulateurs m'entourant
tout au long de mes stages. Les deux situations suivantes vécues en
stage n'ont fait que renforcer mon intérêt pour ce sujet.
C'est en début de deuxième année, lors
d'un stage de médecine nucléaire en CHU, que j'ai
rencontré ma première situation d'urgence. L'examen
programmé était une scintigraphie pulmonaire pour un nourrisson
d'un an, celui-ci était accompagné de sa mère. En arrivant
dans le service le patient était calme, installé dans les bras de
sa mère ; après son installation il pleurait beaucoup ne
comprenant pas pourquoi il était maintenu de force avec sur le visage un
masque, qui lui englobait le nez et la bouche, le tout maintenu par un inconnu
( !). Avec en plus une hotte aspirante au-dessus de la tête, et deux
étrangers le regardant fixement (un manipulateur et moi-même).
Situation plutôt perturbante pour un enfant de cet âge... Tout
était prêt, le matériel était en place et le patient
en position. Lors de la phase d'inhalation du produit radioactif tout se
déroulait comme prévu. Après quelques inspirations,
entrecoupées de cris et de pleurs, la manipulatrice a mesuré la
radioactivité absorbée par le patient, le résultat
était anormal. Aucune radioactivité n'était
décelée. Les manipulateurs se sont concertés, nous nous
sommes concentrés sur l'installation du patient et sur le
matériel tout en continuant de le faire respirer jusqu'à ce que
sa mère, qui regardait la scène dans un coin de la pièce,
ne pousse un cri. Toute notre attention est alors revenue sur l'enfant qui
était devenu bleu. Tout son visage était cyanosé. En une
fraction de seconde le matériel a été
débranché et retiré, les médecins appelés et
l'enfant pris en charge pour qu'il se ré-oxygène. Pendant ce
court laps de temps je me suis rendue compte que le niveau de stress des
manipulateurs avait grimpé en flèche car ils ne savaient pas quoi
faire.
J'ai été surprise par la rapidité de
réaction de l'équipe. L'arrivée des médecins a
été immédiate et ils ont pris en charge l'enfant qui a
retrouvé un état respiratoire normal. Personnellement, durant
les
GENSOUS JULIE (2012 - 2015) 4
secondes où tout se passait, j'ai été
incapable de réagir et je ne savais pas quoi faire. Je n'ai pu
qu'observer les manipulateurs agir avec rapidité pour prévenir et
alerter mais paniquer pour les soins à réaliser. Après cet
incident j'ai interrogé les manipulateurs sur leur ressenti et leur
réponse générale fut « stress et panique à
bord ».
Au cours de la même année j'ai effectué un
stage de scanner dans un CHU spécialisé dans l'urgence. Lors d'un
examen injecté pour une suspicion d'embolie pulmonaire sur une patiente
en fin de vie, venant du service de réanimation, celle-ci a fait un
arrêt cardio-respiratoire. Les manipulateurs ne se sont pas rendus compte
tout de suite de l'état de la patiente. En effet l'interne
réanimateur discutait avec un manipulateur et le deuxième
manipulateur m'expliquait le déroulement de l'injection du produit de
contraste iodé sur la console de scanner. Nous nous en sommes rendu
compte lors de la vérification des images scanographiques, la
distribution du produit de contraste dans le corps de la patiente était
anormale. C'est à cet instant que l'interne réanimateur a vu que
le tracé du monitoring était à plat. Tout a
été très vite. Un manipulateur est entré en salle
et a crié « arrêt cardiaque ». Il a sorti la table de
l'anneau du scanner pour rapprocher la patiente de l'interne, qui a
commencé les gestes de premier secours. Le manipulateur en salle de
console a appelé le numéro d'urgence, le personnel de
réanimation est arrivé dans la minute avec tout le
matériel nécessaire pour réanimer la patiente. En quelques
secondes radiologues, médecins et infirmiers urgentistes sont
arrivés en salle d'examen. Après 30 minutes de réanimation
le coeur de la patiente a repris un rythme et il a été
décidé de poursuivre l'examen avec une seconde injection.
Durant cette situation d`urgence les manipulateurs sont
restés en salle de console, à regarder les réanimateurs.
Je leur ai demandé par la suite, leurs impressions et leur ressenti par
rapport à cet évènement. Leur discours a été
légèrement différent de la première situation car
ils travaillent dans un service d'urgence mais l'impression
générale était tout de même un état de stress
intense.
|