6.2. Prévention du
blanchiment de capitaux
La faiblesse du système financier congolais tient
également au non respect des procédures établies relatives
à la prévention du blanchiment des capitaux.
Par exemple l'article 5 dit : « Tout paiement
d'une somme en francs congolais ou autre globalement égale ou
supérieure à 10 000 dollars américains ne peut être
acquitté en espèces ou par titres au porteur.
Une instruction du Gouverneur de la Banque Centrale du Congo
détermine les cas et conditions auxquels une dérogation à
l'alinéa précédent est admise notamment pour les
opérateurs économiques régulièrement inscrits au
nouveau registre de commerce, pour les tenanciers des comptoirs d'achat des
matières précieuses et leurs collaborateurs, pour les
opérateurs agricoles et pour leurs employeurs.
Mais nos enquêtes ont démontré que (voir
point n°7Q), les banques privées ne sont pas vigilantes et
n'observent pas cette obligation bancaire pourtant légale. Mais il faut
préciser ici que la loi sur le blanchiment des capitaux doit être
mise en conformité avec l'acte uniforme portant droit commercial
révisé ohada du 15 décembre 2010 sur la transformation du
Nouveau Registre de Commerce en Registre de Commerce et du Crédit
Mobilier.
L'article 6 ajute que : « Tout transfert vers
l'étranger ou en provenance de l'étranger, de fonds, titres ou
valeurs pour une somme égale ou supérieure à 10.000
dollars américains doit être effectué par un
établissement de crédit ou par son
intermédiaire ». Cependant nous remarquons que les hommes
d'affaires (privés ou particulier) voir les politiques et autres
autorités publiques congolaises procèdent à de telles
transactions sans être inquiétés en dehors du circuit
bancaire congolais. (Point n°7Q).
6.3. Défaut de transparence
dans des opérations financières
L'article 7 nous précise que « L'Etat
organise le cadre juridique de manière à assurer la transparence
des relations économiques notamment en assurant que le droit des
sociétés et les mécanismes juridiques de protection des
biens ne permettent pas la constitution d'entités fictives ou de
façade ». Sur le terrain, cette évidence est contredite
par les pratiques liées aux opérations bancaires. (Point
n°8Q).
Les établissements de crédit sont tenus de
s'assurer de l'identité et de l'adresse de leurs clients avant d'ouvrir
un compte ou livret, de prendre en garde des titres, valeurs ou bons,
d'attribuer un coffre ou d'établir toutes autres relations d'affaires.
(Article 8). La vérification de l'identité d'une personne
physique est opérée par la présentation d'un document
officiel original en cours de validité et comportant une photographie,
dont il est pris copie. La vérification de son adresse est
effectuée par la présentation de tout document de nature à
en faire la preuve.
L'identification d'une personne morale est effectuée
par la production des statuts et de tout document établissant qu'elle a
été légalement constituée et qu'elle a une
existence réelle au moment de l'identification. Il en est pris copie.
Les responsables, employés et mandataires
appelés à entrer en relation pour le compte d'autrui doivent
produire, outre les pièces prévues au paragraphe 2 du
présent article, les documents attestant d'une part, de la
délégation des pouvoirs qui leur est reconnue et d'autre part, de
l'identité et de l'adresse des ayants droit économiques.
L'identification des clients occasionnels s'effectue selon les
conditions prévues à l'article 8 alinéa 2, pour toute
transaction portant sur une somme en francs congolais égale ou
supérieure à 10.000 dollars américains. (Article 9).
L'identification est requise même si le montant de l'opération est
inférieur au seuil fixé, lorsque la provenance licite des
capitaux n'est pas certaine. L'identification devra aussi avoir lieu en cas de
répétition d'opérations distinctes, effectuées dans
des périodes rapprochées et pour des montants inférieurs,
par opération, à celui prévu à l'alinéa 1er
du présent article. Dans le cas où le montant des transactions
n'est pas connu au moment de l'opération, il est procédé
à l'identification du client dès que le montant est connu ou que
le seuil prévu à l'alinéa 1er est atteint.
Au cas où il n'est pas certain que le client agit pour
son propre compte, l'établissement de crédit a l'obligation de se
renseigner par tout moyen sur l'identité véritable de l'ayant
droit économique. Après vérification, si le doute persiste
sur l'identité du véritable ayant droit, il doit être mis
fin à la relation, sans préjudice, le cas échéant,
de l'obligation de déclarer les soupçons. (Article 10). Si le
client est un avocat, un comptable public ou privé, une personne ayant
une délégation d'autorité publique, ou un mandataire,
intervenant en tant qu'intermédiaire financier, il ne pourra
invoquer le secret professionnel pour refuser de communiquer l'identité
du véritable opérateur.
Lorsqu'une opération porte sur une somme en francs
congolais égale ou supérieure à 10.000 dollars
américains et est effectuée dans des conditions de
complexité inhabituelles ou injustifiées, ou paraît ne pas
avoir de justification économique ou d'objet licite,
l'établissement de crédit est tenu de se renseigner sur l'origine
et la destination des fonds ainsi que sur l'objet de l'opération et
l'identité des acteurs économiques de l'opération.
L'établissement de crédit établit un
rapport confidentiel écrit comportant tous renseignements utiles sur ses
modalités, ainsi que sur l'objet de l'opération et sur
l'identité du donneur d'ordre et, le cas échéant, des
acteurs économiques de l'opération. Le rapport est
conservé dans les conditions prévues par la loi.
Une vigilance particulière doit être
exercée à l'égard, d'une part, des transferts
électroniques des fonds, internationaux ou domestiques, et d'autre part,
des opérations provenant d'établissements qui ne sont pas soumis
à des obligations suffisantes en matière d'identification des
clients ou de contrôle des transactions. Les établissements de
crédit conservent et tiennent à la disposition des
autorités énumérées à l'article 13, et de la
Banque Centrale du Congo, dans le cadre de ses prérogatives :
1) les documents relatifs à l'identité des
clients pendant 10 ans après la clôture des comptes ou la
cessation des relations avec le client ;
2) les documents relatifs aux opérations
effectuées par les clients et les rapports prévus à
l'article 11 pendant 10 ans après l'exécution de
l'opération, sauf si la déclaration de soupçon faite
à cet effet s'avère non fondée.
Les renseignements et documents visés aux articles 8
à 11 sont communiqués, sur leur demande, à la Cellule des
Renseignements Financiers, aux fonctionnaires chargés de la
détection et de la répression du blanchiment et des infractions
liées à celui-ci agissant dans le cadre d'un mandat judiciaire et
aux autorités judiciaires. Les personnes ayant l'obligation de
transmettre les renseignements et les documents mentionnés, ainsi que
toute autre personne en ayant connaissance, ne peuvent les communiquer à
d'autres personnes physiques ou morales qu'avec l'autorisation de celles
énumérées à l'alinéa 1.
Les établissements de crédit mettent en place un
dispositif de prévention du blanchiment de capitaux. Ce dispositif
comprend :
1) la centralisation des informations sur l'identité
des clients, donneurs d'ordre, bénéficiaires et titulaires de
procuration, mandataires, ayants droit économiques, et sur les
transactions suspectes ;
2) la désignation des responsables de l'unité de
centralisation auprès du siège ou de la direction centrale, de
chaque succursale, et de chaque agence ou service local ;
3) la formation continue des fonctionnaires ou employés
;
4) un dispositif de contrôle interne de
l'exécution et de l'efficacité des mesures adoptées pour
l'application de la loi.
Les autorités de contrôle peuvent, en cas de
besoin, préciser le contenu et les modalités d'application de ce
dispositif. Elles effectuent, le cas échéant, des investigations
sur place afin de vérifier la bonne application et l'efficacité
de celui-ci.
Les bureaux de change et autres personnes morales ou physiques
qui font profession habituelle d'effectuer des opérations de change
manuelle sont tenus (article 15) :
1) d'établir, dans une déclaration, l'origine
licite des fonds nécessaires à la création de
l'établissement ; cette déclaration doit être
adressée, avant tout commencement d'activité, à la Banque
Centrale du Congo aux fins d'obtenir l'autorisation d'ouverture et de
fonctionnement prévue par la loi ;
2) de s'assurer de l'identité de leurs clients, par la
présentation d'un document officiel en cours de validité et
comportant une photographie, dont il est pris copie, avant toute transaction
portant sur une somme en francs congolais égale ou supérieure
à 500 dollars américains ou pour toute transaction
effectuée dans les conditions de complexité inhabituelles ou
injustifiées ;
3) de consigner, dans l'ordre chronologique, toutes
opérations, leur nature et leur montant avec indication des nom,
prénom et post- nom du client, ainsi que du numéro du document
présenté, sur un registre côté et de conserver ledit
registre pendant 10 ans après la dernière opération
enregistrée.
Les casinos et établissements de jeux sont tenus
:1° d'adresser, avant de commencer leur activité, une demande
d'agrément au Ministère ayant l'économie dans ses
attributions avec copie à la Banque Centrale du Congo aux fins d'obtenir
l'autorisation d'ouverture et de fonctionnement prévue par la loi en
vigueur, et de justifier, dans cette demande, de l'origine licite des fonds
nécessaires à la création de l'établissement
;2° de tenir une comptabilité régulière et d'en
conserver les pièces pendant 10 ans. Les principes comptables
définis par la loi sont applicables aux casinos et cercles de jeux ;
3° de s'assurer de l'identité, par la présentation d'un
document officiel original en cours de validité et comportant une
photographie, dont il est pris copie, des joueurs qui achètent,
apportent ou échangent des jetons ou des plaques de jeu pour une somme
supérieure à l'équivalent de 2.000 dollars
américains ;4° de consigner, dans l'ordre chronologique, toutes les
opérations visées au paragraphe 3° du présent
article, leur nature et leur montant avec indication des noms et prénoms
des joueurs, ainsi que du numéro du document présenté, sur
registre côté et de conserver ledit registre pendant dix ans au
moins après la dernière opération enregistrée ;
5° de consigner, dans l'ordre chronologique, tous transferts de fonds
effectués entre ces casinos et cercles de jeux sur un registre
côté et de conserver ledit registre pendant 10 ans après la
dernière opération enregistrée.
Dans le cas où l'établissement de jeux est tenu
par une personne morale possédant plusieurs filiales, les jetons doivent
identifier la filiale par laquelle ils sont émis. En aucun cas, des
jetons émis par une filiale ne peuvent être remboursés dans
une autre filiale, y compris à l'étranger.
Mais nos enquêtes prouvent que le défaut de
transparence bat le plein dans les relations entre la BCC et les Banques
privées. Aucune transparence n'est de mise car la BCC semble
politisée au point qu'elle n'est pas elle-même transparence au
détriment des normes prudentielles de Bâle I, II et III.
6.3.1.
Collaboration des autorités chargées de lutter contre le
blanchiment
La Cellule des Renseignements Financiers (article 17)
: u» ne Cellule des Renseignements Financiers, dotée
d'une autonomie financière, d'un pouvoir de décision propre et
placée sous la tutelle du Ministre des Finances, est créée
et organisée dans les conditions fixées par un décret
présidentiel. La mission de la Cellule des Renseignements Financiers est
de recueillir et de traiter les renseignements financiers sur les circuits de
blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. A cet effet, la
Cellule des Renseignements Financiers collabore avec le Ministère de la
Justice. La Cellule des Renseignements Financiers est chargée :
1) de recevoir, d'analyser et de traiter les
déclarations auxquelles sont tenus les personnes et organismes
visés à l'article 4 ;
2) de recevoir également toutes autres informations
utiles, notamment celles communiquées par les autorités
judiciaires. Le Service peut aussi, sur sa demande, obtenir de toute
autorité publique et de toute personne physique ou morale visée
à l'article 4, la communication des informations et documents dans le
cadre des investigations entreprises à la suite d'une déclaration
de soupçon ;
3) de réaliser ou de faire des études
périodiques sur l'évolution des techniques utilisées aux
fins de blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme sur le
territoire national ;
4) d'émettre des avis sur la politique de l'Etat en
matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du
terrorisme et sur sa mise en oeuvre. A ce titre, il propose les réformes
appropriées au renforcement de l'efficacité de la lutte contre le
blanchiment de capitaux ;
5) de faire rapport au Ministère Public.
La Cellule des Renseignements Financiers élabore des
rapports trimestriels sur ses activités. Ces rapports indiquent les
techniques de blanchiment et de financement du terrorisme éventuellement
relevées sur le territoire national et les propositions visant à
renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du
terrorisme. Il établit annuellement un rapport récapitulatif. Ces
rapports dont copies sont réservés au ministre de la Justice et
au Gouverneur de la Banque Centrale du Congo, sont adressés au ministre
des Finances.
L'organisation du Service, les conditions de nature à
assurer ou à renforcer son indépendance, ainsi que le contenu et
les modalités de transmission des déclarations qui lui sont
adressées, sont fixés par Décret du Président de la
République. Les agents de la Cellule des Renseignements Financiers sont
tenus au secret des informations ainsi recueillies qui ne peuvent être
utilisées à d'autres fins que celles prévues par la
présente loi.
Ils ont qualité d'agents et d'officiers de police
judiciaire.
La Cellule des Renseignements Financiers peut, sous
réserve de réciprocité, échanger des informations
avec les services étrangers chargés de recevoir et de traiter les
déclarations de soupçon, lorsque ceux-ci sont soumis à des
obligations de secret analogues et quelle que soit la nature de ces services. A
cet effet, elle peut conclure des accords de coopération avec ces
services. Lorsqu'elle est saisie d'une demande de renseignement ou de
transmission par un service étranger homologue traitant une
déclaration de soupçon, elle y donne suite dans le cadre des
pouvoirs qui lui sont reconnus par la présente loi pour traiter de
telles déclarations.
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