Le retrait d'agrément aux compagnies d'assurance dans la zone CIMA.( Télécharger le fichier original )par Emilienne Michou Goghoue Tchomte Université de Dschang - master II 2010 |
CONCLUSION DU CHAPITRE 1En conclusion, le droit CIMA et OHADA sont deux ordres juridiques autonomes et d'égale valeur. L'enchevêtrement de leurs espaces est à l'origine d'un éventuel conflit. Entre les normes de procédure CIMA et l'AUPCAP, ce conflit n'est plus simplement virtuel, mais plutôt réel. Le domaine d'application de l'AUPCAP englobe entièrement celui des normes de procédure du code CIMA. Or, on note une certaine antinomie entre ces deux normes, pouvant engendrer une insécurité juridique criarde. A une même question juridique, on pourrait avoir autant de réponses que de juges saisis, alors que l'objectif du départ était bien l'harmonisation du droit. En outre, aucune de ces réponses n'aura une autorité certaine, car aucun des ordres juridiques ne détient la clé de la répartition des compétences entre normes en concurrence74(*). Pour une plus grande harmonie entre les deux droits, il est souhaitable qu'à l'avenir qu'il y ait un accord de coopération comportant un calendrier précis des consultations préalables et des objectifs communs à atteindre par coordination des actions d'intégration juridique75(*), qu'il s'agisse de la production ou de la modification des normes. C'est une manière simple d'anticiper et de prévenir ou de résoudre la concurrence entre les deux droits. On relève à cet effet l'exemple du droit comptable élaboré par l'O.H.A.D.A et l'U.E.M.O.A. Ce risque de chevauchement a été évité dans ce cas particulier par la concertation en amont des deux organisations pour prévoir un droit et un plan comptable quasiment identique avec d'une part, l'Acte uniforme portant sur le droit comptable et d'autre part, le Système Comptable Ouest Africain (SYSCOA) En dehors de cette formule de concertation formelle ou non, toujours possible, d'autres mécanismes généraux préventifs ou de solution des conflits de compétences restent à venir dans la zone africaine subsaharienne. Cependant, pour des raisons techniques et pratiques l'application du code CIMA en tant que règle spéciale s'impose pour la liquidation des compagnies d'assurance en cas de retrait d'agrément. CHAPITRE 2 : LA PROCEDURE SPECIALE DE LIQUIDATIONAU CAS DE RETRAIT D'AGREMENTLe retrait total des agréments décidé par la Commission emporte de plein droit, à dater de sa publication au Journal Officiel et/ou dans un Journal d'annonces légales, si elle concerne une entreprise d'un Etat membre, la dissolution de l'entreprise ou si elle concerne une entreprise étrangère, la liquidation de l'actif et du passif du bilan spécial de ses opérations sur le territoire national. La dissolution sus évoquée entraine la liquidation des biens. Cette procédure spéciale de liquidation des biens qu'il ne faut pas confondre avec la liquidation des biens de l'AUPCAP se déroule conformément aux dispositions des articles 325-1 à 325-10 du code CIMA comme l'indique la lettre même de plusieurs de ces dispositions qui font expressément allusion au seul cas de retrait d'agrément à l'exclusion de la faillite76(*). Même si elle A des caractères fortement administratifs, cette procédure est essentiellement judiciaire. Serait-il exactement le cas si la société en cause était une société publique. A ce sujet, Monsieur Albert PAMSY, chef de la division des assurances au ministère des finances au Cameroun pense que « si le mode de liquidation judiciaire opté exclusivement pour les compagnies d'assurances en zone CIMA est compréhensible en raison de l'anonymat de ces sociétés, il est bien possible qu'il soit envisagé une liquidation administrative dans le cas d'une société publique où l'Etat est l'unique actionnaire. » la liquidation de la Caisse Nationale de Réassurance (CNR) du Cameroun est une preuve patente. La CNR était une société nationale de réassurance détenue à 100% par l'Etat du Cameroun. Elle a été créée dans l'optique d'un part, de limiter l'évasion des capitaux que les camerounais plaçaient à l'étranger auprès de leurs réassureurs, et d'autre part d'accroitre le financement local de l'économie. La liquidation de la CNR s'ouvre par décision administrative numéro 2400/MINEFI/DAJ du 7 aout 2000 fixant les organes de la liquidation et leur mission. Pour les organes, il s'agit d'une commission administrative spécialisée, composée des membres issus de la direction des affaires juridiques (DAJ), de la direction des contrôles économiques et des finances extérieures (DCEFE) et de la commission technique des privatisations et des liquidations. Cette commission créée pour 6 mois renouvelable a une mission presque identique à celle du liquidateur. On se demande bien pourquoi cette discrimination. A notre sens, il s'agit tout d'abord d'une question de souveraineté. Malgré l'harmonisation, les entreprises publiques ont du mal à s'aligner. Puisqu'elles sont l'émanation de l'Etat, celui-ci conçoit mal l'idée de se faire diriger par une autorité extérieure. En outre les entreprises publiques bénéficient des prérogatives exorbitantes de droit commun. En ce sens, les actions des pouvoirs publics dans le cas d'espèce illustrent parfaitement ces prérogatives : l'Etat camerounais a pris en charge par le mécanisme de titrisation, les soldes dus par la CNR aux sociétés camerounaises d'assurances pour montant de 5 milliards de francs CFA, il a annulé une dette fiscale de 200 millions de francs CFA, en contrepartie de ces actions, il a acquis une partie des immeubles de la CNR. Ces actions sont inconcevables dans la liquidation des compagnies d'assurances dont la mise en oeuvre (S1) et le dénouement (S2) doivent se faire suivant les prescriptions légales.
S1- LA MISE EN OEUVRE DE LA PROCEDURE SPECIALE* 74 V. ISSA-SAYEGH (J), « conflit entre droit communautaire et droit régional dans l'espace OHADA » OHADATA D-06-05 * 75 Idem * 76 Art 325-1alinéa 2 « dans les deux cas (de retrait) ... » ; art 325-3 alinéa 1er « ... la commission de contrôle des assurances publie la décision prononçant le retrait... »art 325-6 « en cas de liquidation effectuée dans les conditions prévues à l'art 325-1... » art 325-7 « ... les créances que garantie le privilège établi à l'article 325-6 doivent être payées par le liquidateur, sur ordonnance du juge-contrôleur, dans les dix jours de la décision de la commission de contrôle des assurances prononçant le retrait d'agrément... » v. dans ce sens ASSI-ESSO (A), ISSA-SAYEGH (J) et LOHOUES-OBLE (J), op. cit Page 76 |
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