Les procédures du contrôle fiscal en droit marocain: rappel et essai d'analyse.( Télécharger le fichier original )par Fouad EL OTMANI Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales, SETTAT - master en Sciences et Techniques Fiscales 2015 |
Paragraphe 2 : Pouvoir d'appréciation de l'administration124(*)Correspond à un pouvoir de libre appréciation que la loi laisse à l'agent administratif125(*). Ce pouvoir est régi par l'article 213 du CGI, qui laisse la possibilité à l'administration de déterminer une nouvelle base d'imposition, d'après les éléments dont elle dispose. Lorsque les écritures comptables présentent des irrégularités graves de natures à mettre en cause la valeur probante de la comptabilité126(*) ou/et lorsque la comptabilité présente des insuffisances des chiffres déclarés. 1. Comptabilité présentant des irrégularités graves127(*)ü Le défaut de présentation d'une comptabilité et l'absence des inventaires conformément aux dispositions de l'article 145 du CGI ; ü Les erreurs, omissions ou inexactitudes graves et répétées, constatées dans la comptabilisation des opérations ; ü L'absence des pièces justificatives privant la comptabilité de toute valeur probante ; ü La non-comptabilisation d'opérations effectuées par le contribuable ; ü La comptabilisation des opérations fictives. Ces irrégularités sont de nature à mettre en cause le caractère probant de la comptabilité128(*). Cependant, lorsque la remise en cause de la comptabilité est dûment justifiée par l'administration, la charge de la preuve incombe129(*) au contribuable130(*). Par contre, si la comptabilité présentée ne comporte aucune des irrégularités graves énoncées ci-dessus, l'administration ne peut remettre en cause ladite comptabilité et reconstituer le chiffre d'affaires que si elle apporte la preuve de l'insuffisance des chiffres déclarés131(*). De plus, l'administration apprécie aussi le choix de gestion du contribuable sur le fondement de la théorie de Les deux théories sont encore non définies par la législation marocaine, mais en pratique l'inspecteur les trouve souvent et sont considérés comme formes d'erreurs, notamment en réintégrant dans les résultats de l'entreprise les dépenses qui ne remplissent pas les conditions de déductibilité132(*) fiscale133(*). 2. Comptabilité présentant des insuffisances des chiffres déclarés134(*)L'administration va juger non seulement la régularité da la comptabilité présentée mais encore et surtout sa sincérité, c'est-à-dire elle vérifie dans quelle mesure la comptabilité produite reflète toutes les opérations effectuées par l'entreprise135(*). En cas d'insuffisance des chiffres déclarés, même en absence des irrégularités comptables graves, l'administration peut remettre en cause la comptabilité et procède à la reconstitution du chiffre d'affaires. En effet, une comptabilité peut être tenue en conformité avec les règles générales comptables et révéler néanmoins des minorations des chiffres déclarés, car les entreprises qui dissimulent une partie de leurs ventes emploient des méthodes qui rendent la fraude difficile à déceler, tell que la dissimulation d'achats ou de ventes. Cependant, la charge de la preuve de l'insuffisance du chiffre d'affaire déclaré incombe à l'administration. La preuve de l'insuffisance du chiffre d'affaires peut se faire selon trois méthodes d'après la note circulaire (Contrôle quantitatif ; contrôle matière et l'utilisation des constants et paramètres de fabrication), mais d'une manière générale, la loi ne prévoit aucun texte qui définie la méthodologie de reconstituer le chiffre d'affaire, d'où elle varie, non seulement d'une entreprise à l'autre, mais même d'un inspecteur à l'autre et que le choix de la méthode utilisée reste tributaire des éléments en position de l'administration ou puisés dans les données de la comptabilité présentée. A. Le contrôle quantitatif Confronte le bon de livraison et le bon de commande et vérifie que les quantités livrées correspondent bien à celle commandée136(*). Utilisé généralement pour la reconstitution du chiffre d'affaires dégagé par une activité de revente en l'état137(*) de produits achetés138(*) . Pour une activité de revente en l'état : l'inspecteur recherche pour une ou plusieurs catégories d'articles déterminés139(*) : - Le nombre d'articles achetés au cours de l'exercice. - Le nombre d'articles figurant aux stocks d'ouverture et de clôture de l'exercice. - Le nombre d'articles vendus au cours de l'exercice, d'après le livre des ventes. La méthode consiste à vérifier la concordance des mouvements des produits commercialisés140(*) d'où le vérificateur s'assure de l'équation suivant141(*) : Au cas où il y a lieu d'une inégalité entre les deux termes de l'équation, l'indice est soit une minoration des ventes ou des stocks, soit une minoration d'achats et par conséquence l'inspecteur rectifie les bases d'imposition. Et c'est ainsi que le vérificateur tentera de trouver les preuves : Prix moyen de vente = CA déclaré/ Quantité vendue B. Le contrôle matière S'applique généralement dans les entreprises de production et consiste à reconstituer la production de l'entreprise en remontent toute la chaîne de production. Le contrôle matière permet de suivre les entrées des matières utilisées dans la production et la sortie des produits fabriqués142(*). L'inspecteur commence par rechercher les quantités de matières premières ou de fournitures normalement utilisées pour la fabrication de chaque nature de produits vendus143(*). L'inspecteur détermine les flux en quantité de matière consommée selon la formule : entrées = stock initial + achats - stock final, avant de comparer le résultat à la production déclarée vendue déterminée, selon la formule : sorties = ventes +stock final -stock initial144(*). De même, l'utilisation de l'exercice, résultat de l'équation, doivent correspondre au nombre des produits vendus (consigné sur les factures de vente). Toutes différences correspondent à des produits dont la vente a été dissimulée145(*). De plus, l'inspecteur recherche l'emploie des matières premières utilisées chez les fabricants en utilisant le contrôle matière par la main d'oeuvre (rendement moyen par ouvrier, nombre d'heures de travail, quantité d'énergie utilisée...). Le temps passé à l'élaboration des produits finis - et par conséquent, le coût de la main-d'oeuvre correspondante est, en générale, relativement aisé à déterminer. En appliquant, au montant des salaires de l'année, le rapport constaté entre le prix de vente du produit fabriqué et le cout de la main-d'oeuvre correspondante. On pourrait donc théoriquement obtenir le montant approché des recettes de l'année146(*). En général, d'après des entretiens effectués, le fisc marocain apprécie une comptabilité par la comparaison des valeurs constatées dans les données de quatre derniers exercices comptable connus. Comme : le chiffre d'affaires, produits accessoires, autre produit d'exploitation, charges d'exploitation, résultats d'exploitation, produits financiers, charges financiers, résultats financiers, résultats non courant, résultat fiscal, production, marge brut, valeur ajoutée, excédent brut d'exploitation, charges de personnel (...). Ensuite, l'agent vérificateur calcule des ratios comptables comme "marge brute/chiffre d'affaires" ; "valeur ajoutée/la production", "excédent brut d'exploitation/production" ; "Actif immobilisé brut/ production" ; charges de personnel/chiffre d'affaires ; "impôt/chiffre d'affaires" (...). L'observation des variations d'un exercice à l'autre permet au fisc d'apprécier la sincérité de la comptabilité, d'où prouver l'insuffisance du chiffre d'affaires déclaré. Signalons que ces méthodes de reconstitution du CA sont variées selon la nature de l'activité contrôlée et par fois selon des données dont dispose le vérificateur qui opte pour une méthode de son choix, qui est marquée de subjectivité, selon son niveau de formation et sa compétence qui s'affine avec l'expérience, et aussi avec la diversité des dossiers traités147(*). Pour conclure, l'important c'est que les reconstitutions, au terme des travaux de vérification, doivent être justifiés par l'administration et généralement la charge de preuve incombe au : - Contribuable : lorsque la comptabilité, soit présente des irrégularités graves, soit inexistante, ou n'a pas été mise à la disposition de l'administration. - à l'administration fiscale : si la comptabilité n'est attachée d'aucune irrégularité graves mais présente des insuffisances du chiffre déclaré.
* 124 On doit distinguer 3 cas : celle de compétence liée (Le contenu de la décision administrative est alors prédéterminé par la loi, qui définit certains éléments de fait nécessaires à la prise de décision). Un pouvoir discrétionnaire (toutes les fois qu'une autorité agit librement, sans que la conduite à tenir lui soit dictée à l'avance par une règle de droit. L. MICHOUD, études discrétionnaires, revue général de d'administration, 1914, p.5) et notre cas, un pouvoir d'appréciation où la décision de l'administration est subordonnée à des éléments de faits, qu'elle doit elle-même appréciée. * 125 R. BONNARD, le pouvoir discrétionnaire des autorités administratives et le recours pour excès du pouvoir, RDP, 1923, page 5. * 126 IKRAM GHERISS, la performance du contrôle fiscal au Maroc, thèse professionnelle a l'ESCAE MAROC, 2007, page 94. * 127 Article 213-I du C.G.I Maroc. * 128 Voir le paragraphe 1 : conservation des documents comptables * 129 Être à la charge de, revenir obligatoirement à. * 130 Notes circulaire page 211. * 131 Article 213-I dernier alinéa du C.G.I Maroc. * 132 Pour que la charge soit déductible, elle doit être engagée ou supportée pour les besoins de l'activité imposable. Article 8 du C.G.I MAROC. * 133 KHALIL HALOUI, Garanties du contribuable dans le cadre du contrôle fiscal en droit Marocain, op.cit. p.43 * 134 Article 213-I-3 du C.G.I Maroc. * 135 Vérification fiscale : quelles garanties pour le contribuable, la vie éco, éditions 30-06-2006, article rédigé par Khalil Haloui, juriste conseil d'affaires. * 136 André Locussol, Comprendre la crise et l'actualité économique 2000 définitions sous forme de mini-cours, Editions le Manuscrit, 2010, p. 114. * 137 Autrement dit : les commerçants grossistes. * 138 Notes circulaires N° 717, D.G.I. MAROC, op.cit, p. 211. * 139 Jean Celeste, Contrôle fiscal au Maroc, op. cit, p.84. * 140 Saïd Ourchakou, Le contrôle fiscal au Maroc : organisation et pratique de vérification de comptabilité, Université Paris Panthéon Sorbonne, Master droit et gestion des ressources publiques, 2006, page 65. * 141 Jean Celeste, Contrôle fiscal au Maroc, op. cit, p. 85. * 142 BRAHIM JBARA, Contrôle fiscal au Maroc, constats, critiques et suggestions, certificat professionnel comptable et financier, ISCAE MAROC, année universitaire 2012 /2013, p.39. * 143 Jean Celeste, Contrôle fiscal au Maroc, op. cit, p. 85. * 144 KHALIL HALOUI, Les garanties du contribuable dans le cadre du contrôle fiscal en droit Marocain, op.cit, p.58. * 145 Le contrôle fiscal au Maroc : organisation et pratique de vérification de comptabilité, po.cit, p.85. * 146 Jean Celeste, Contrôle fiscal au Maroc, op. Cit, p. 86. * 147 Tahour Mohamed, Vers une amélioration du contrôle fiscal Marocain « cas pratique de la vérification générale de la comptabilité », mémoire de fin d'études sous le thème, Master spécialisé en Sciences et techniques fiscales, université HASAN 1 ER , faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales de SETTAT , année universitaire 2013-2014, p.60. |
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