B. La centralité des pouvoirs publics malgré
l'ouverture démocratique
La centralité des pouvoirs publics peut renvoyer de
manière précise à la fois à ses difficultés
à s'approprier les outils relatifs à la démocratisation et
à une certaine tendance de légitimité de son pouvoir.
64 ENAMA TSANA Joseph, La gouvernance au sein
des Organisations de la Société Civile camerounaise, projet de
promotion de la gouvernance au sein des OSC camerounaise,
Yaoundé, 2012, p.77.
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1. Les difficultés d'appropriation d'un
modèle universalisant
Nous vivons désormais, dans des sociétés
où de moins en moins de gens acceptent l'idée que les élus
se réservent pour eux seuls la responsabilité de gouverner. Des
sociétés, plus exactement, où toute initiative
gouvernementale qui n'est pas réputée avoir fait l'objet
préalable d'un consensus avec les « partenaires sociaux » se
voit aussitôt décriée sur la scène médiatique
par une multitude de groupes de pression qui se considèrent comme
acteurs de l'arène managériale, lorsqu'il s'agit
d'ébaucher telle politique, de mener à bien tel projet, de passer
ou de modifier une loi ou un règlement. Cette nouvelle culture
politique, qui s'est développée au cours des trois ou quatre
dernières décennies en Occident65 renvoie à la
notion de « gouvernance », mieux encore, d' « action publique
». Selon R. HIRSCH, la gouvernance se rapporterait à « une
conception de gestion qui réunit, outre l'État lui-même,
une multitude de corps intermédiaires66 ». Il s'agit
d'une structure horizontale au sein de laquelle les gouvernements ne sont
qu'une force parmi d'autres. Ce paradigme de gestion des affaires publiques a
très tôt été miroité aux pays africains vers
la fin et le début des décennies 1980 et 1990.
Toutefois, la formule politique adoptée au moment des
indépendances par la majorité des Etats africains « un
dirigeant, une idéologie, un parti unique 67» est loin
d'avoir fait son temps. En effet, les pratiques autoritaires, l'échec de
la greffe de la démocratie en Afrique demeurent du fait que les
dirigeants ont certes perçu la dynamique de démocratisation comme
un atout pour vaincre les différentes crises mais, les réformes
apportées par la démocratie n'ont pas de manière
fondamentale modifiées les précédents schémas de
gestions orchestrés au lendemain des indépendances. Ce
caractère centraliste de l'Etat ne permet pas un vécu réel
du processus de la démocratie participative. La société
civile est certes figurante mais elle constitue un instrument au service des
pouvoirs publics dont, les visées sont de s'arrimer de manière
théorique aux grandes vertus de la démocratie.
2. La légitimité du pouvoir
Etatique
La réceptivité de l'héritage surtout
français et quelques fois anglais dans la centralisation des
procédés décisionnels constitue encore une
référence dans l'organisation et
65 KOMINGS Piet, L'Etat, l'agro-industrie et la
paysannerie au Cameroun : Le réveil du Cameroun in Politique
africaine n°22, Paris, Karthala, 2006, p.43.
66 HIRSCH Robert, Ajustement structurel et
politiques alimentaires en Afrique subsaharienne, Politique africaine in
Economie alimentaire, la purge libérale, Paris, Editions Karthala,
1990, p.198.
67 GORAN HYDEN ET MICHAEL BRATTON, Gouverner
l'Afrique, Vers un partage des rôles, Lille, Nouveaux Horizons,
1992, p.12.
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la gestion de l'espace public en Afrique en
générale et au Cameroun singulièrement. Malgré la
configuration qu'impose les fondamentaux de la gouvernance, l'Etat continue
d'exercer le pouvoir au niveau des autres acteurs soit par ses
représentants directs (les gouverneurs, préfets,
sous-préfets etc....) et indirects, notamment par la fabrique de
certaines organisations de la société civile partisanes.
C'est ainsi qu'en dehors d'initiatives ponctuelles, il
n'existe aucune véritable disposition institutionnalisée non
lucrative. Tout engagement est vu comme une remise en cause de la
légitimité de l'Etat, et ceux qui militent pour une cause sont
taxés d'opposants, selon Séverin Cécile ABEGA.
En somme, les mécanismes de concertation entre OSC et
Etat se présentent comme une option non détachable du
développement socioéconomique au sein des Etats. C'est fort de ce
constat que le Cameroun a entrepris diverses initiatives allant dans le sens
d'un cadre managérial qui se veut multi acteur dans l'enceinte des
affaires publiques. Cette volonté, bien que confirmée à la
fois de manière théorique par la ratification des accords
internationaux et régionaux, la mise en exercice de divers documents
juridiques et stratégiques, et pratique par des appuis au renforcement.
Nonobstant ces efforts remarquables, les logiques de concertation entre OSC et
pouvoirs publics, font état d'une faiblesse considérable du
degré d'appropriation par les OSC des mécanismes de concertation
avec les pouvoirs publics dont, l'apport du PASOC s'avère être une
initiative pertinente.
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