CONCLUSION DU CHAPITRE PREMIER
La protection de l'environnement est désormais une
préoccupation importante pour l'humanité, car l'avenir de cette
dernière en dépend. C'est au demeurant la raison pour laquelle
Jean-Marc LAVIEILLE affirme qu'il « est désormais admis que
l'ensemble des éléments de l'environnement (air, eau, sol,
ressources naturelles, faune, flore, paysage), qu'ils soient sous juridiction
nationale ou dans les espaces internationaux, doit être
protégé dans l'intérêt des générations
présentes et futures »103. Cette prise de
conscience tend à se généraliser, même au niveau des
Etats africains qui ont, pendant longtemps, marqué leur méfiance
à l'égard de cette activité, en arguant qu'elle constitue
un dirimant pour leur développement économique. Si au niveau
national africain et dans les Pays En Développement, la protection de
l'environnement a le vent en poupe, il y a lieu toutefois de relever ici que
les organisations africaines d'intégration économique ne font pas
encore de la protection de l'environnement une question centrale. La CEMAC en
effet, accorde une place secondaire à la protection de l'environnement.
Ce caractère accessoire est la conséquence de plusieurs facteurs.
Il s'agit en réalité des facteurs historiques et
théoriques d'une part et les facteurs conjoncturels et structurels
d'autre part. De manière succincte, l'héritage du processus
d'intégration de la CEMAC conforte cette situation, de plus la
trajectoire de la protection de l'environnement en Afrique n'est pas en reste.
Par ailleurs, le contexte économique, politique et social104
et la structuration de l'intégration en Afrique centrale105
entrainent le caractère secondaire de la protection de l'environnement
dont la manifestation est dans plusieurs aspects communautaires.
103 Jean-Jacques KAMGA NZEYE, La mise en oeuvre de l' «
Agenda 21 des Nations Unies » au Cameroun, mémoire de master II en
droit, Université de Douala, 2014, p.10.
104 Le contexte sous régional est marqué par le
sous-développement, les crises politiques et conflits.
105 Cette structuration est marquée par le chevauchement
entre les CER sous régionales (CEMAC et la CEEAC).
CHAPITRE II: LA MATERIALISATION DU CARACTERE
SECONDAIRE DE LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DANS LE PROCESSUS
D'INTEGRATION DE LA CEMAC
36
L'intégration de la CEMAC est construite autour d'un
ensemble de textes juridiques. Ces textes juridiques forment l'ossature du
droit communautaire 106 . Les textes communautaires créent
des institutions et organes chargés de conduire le processus
d'intégration. Ainsi, ces textes reflètent la politique de
l'intégration. En effet, l'intégration de la CEMAC est avant
toutes choses économique et monétaire. Cependant, il est
important de relever que l'objet économique et monétaire de
l'intégration régionale ne peut exclure d'autres objets, tels que
la paix, la sécurité ou l'environnement. La CEMAC s'inscrit dans
cette logique, dans la mesure où elle s'implique dans la protection de
l'environnement. De plus, le processus d'intégration de la CEMAC a
été organisé en plusieurs étapes. Dès lors,
il devient intéressant de s'interroger sur la matérialisation du
caractère secondaire de la protection de l'environnement dans l'arsenal
juridique (Section I), avant d'analyser ce caractère secondaire dans la
mise en oeuvre de l'intégration (Section II).
106 L'Union Européenne définit le Droit
Communautaire comme étant « un ensemble de dispositions
contenus dans les traités constitutifs et dans les textes
élaborés par les instances communautaires ». Voir en ce
sens : BAKARY OUTTARA, « le rôle des organisations sous
régionale dans le développement du droit de l'environnement :
l'exemple de l'UEMOA », in Laurent GRANIER (Coord.), Aspects
contemporains du droit de l'environnement en Afrique de l'Ouest et Centrale,
UICN, GLAND, 2008, p.178
37
SECTION I: La matérialisation du
caractère secondaire de la protection de l'environnement dans l'arsenal
juridique de la CEMAC
La protection de l'environnement fait partie des
préoccupations des Communautés Economiques Régionales.
Cela ne fait plus l'objet de débat, du moins pour ce qui est des CER que
l'on retrouve en Afrique107. Il faut tout de même le relever
avec Rose Nicole SIME, ces Organisations d'Intégration Régionale
n'ont pas pour vocation première la protection de
l'environnement108. Cet état des choses ferait donc de la
protection de l'environnement une préoccupation non prioritaire dans le
processus d'intégration d'une OIR telle la CEMAC. Ceci est tout le
contraire de l'Union Européenne qui considère désormais
l'environnement comme une « préoccupation essentielle
»109. En réalité, la protection de
l'environnement dans le processus d'intégration de la CEMAC
présente un caractère accessoire. Ce caractère se
matérialise dans l'arsenal juridique de l'intégration, de ce fait
ce caractère secondaire se matérialise dans l'arsenal juridique
(paragraphe I) et aussi dans le dispositif institutionnel (paragraphe II).
Paragraphe I : Le caractère secondaire de la
protection de l'environnement dans l'arsenal normatif de la CEMAC
La protection de l'environnement trouve tout de même une
place dans les textes juridiques de la CEMAC. En effet, malgré la
réticence observée au départ par les Etats africains
vis-à-vis des préoccupations environnementales110, ces
dernières ont finalement eu raison des premiers. Certainement à
cause des catastrophes environnementales qui ont ébranlé le
monde111 ; et le lien étroit qui existe entre la
dégradation de l'environnement et la pauvreté. C'est nul doute la
raison pour laquelle, Rose Nicole SIME indique que « la
dégradation de l'environnement et la raréfaction de certaines
ressources naturelles constituent autant de freins au développement que
les gouvernements africains ne peuvent ignorer »112.
Ainsi, les
107 BAKARY OUTTARA a commis une étude sur le rôle
des CER dans la protection de l'environnement.
108 Voir Rose Nicole SIME, op. Cit., p. 175.
109 Il faut cependant rappeler que l'UE aura attendu environ
vingt (20) ans pour inclure les dispositions relatives à la protection
de l'environnement dans ses textes de base.
110 Voir Simon CHARBONNEAU, Droit Communautaire de
l'Environnement, l'Harmattan, PARIS, 2002, p. 11. D'après cet
auteur, « plus un pays était en retard dans son
développement, plus il avait tendance à ignorer l'importance des
problèmes écologiques ».
111 Quelques exemples : l'Amoco Cadiz en 1978, Tchernobyl en
1986. Voir Jean Claude TCHEUWA, « La conditionnalité
environnementale», UNESCO, La Conditionnalité dans la
coopération internationale, Colloque de Yaoundé, 20-22
juillet 2004, pp. 82-94, (spéc.84).
112 Voir Rose Nicole SIME, « L'intégration et
l'harmonisation des normes de droit international de l'environnement dans le
droit africain », in Laurent GRANIER (coord.), Aspects contemporains
du droit de l'environnement en Afrique de l'Ouest et Centrale, UICN, Gland
Suisse, 2008, pp.157-176 (spéc. 175).
38
Etats membres de la CEMAC ont dû introduire,
implicitement ou explicitement, les préoccupations environnementales
dans la stratégie d'intégration de la CEMAC ; tout
dépendant de l'importance que les uns et les autres accordent à
la protection de l'environnement. De fait, certaines institutions accordent de
l'importance à la protection de l'environnement113, d'autres
au contraire en tiennent compte mais de manière accessoire. Dans le
cadre de l'intégration de la CEMAC, jusqu'ici c'est de manière
accessoire que l'arsenal juridique appréhende la protection de
l'environnement. En fait, l'arsenal juridique de la CEMAC est constitué
de textes fondamentaux formant le droit primaire, et les autres textes qui en
découlent. Ceux-ci forment le droit dérivé. Ainsi, le
caractère secondaire de la protection de l'environnement est-il
expressif dans les textes fondamentaux (A) et dans les textes
dérivés (B).
A. LE CARACTERE SECONDAIRE DE LA PROTECTION DE
|