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La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo.

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par Kwasi Nyatefe DOUGBLO
Université Amadou Hampate Ba de Dakar - Master 2016
  

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TITRE I : UNE TRANSPARENCE AFFIRMEE

Dans le souci d'assurer un fonctionnement adéquat de leurs activités, les administrations du Sénégal et du Togo passent en permanence des marchés pour des acquisitions de travaux, de fournitures et services au moyen de montants considérables de fonds publics et d'aides de donateurs internationaux. Les contrats publics en général et les marchés publics en particulier, au regard des montants exorbitants qu'ils mettent en jeu, sont bien souvent considérés comme étant « réfractaires de transparence »41.

De cette évidence est née une volonté qui, d'abord exprimée au plan communautaire, consistera à élaborer un paquet législatif que les Etats devront ensuite incorporer dans leur ordre juridique interne. De cette initiative communautaire, ont vu le jour des principes de passation des marchés publics tels que nous les connaissons aujourd'hui et au rang desquels figure le principe de transparence. Cette modernité communautaire, affirmée à travers les deux directives de l'UEMOA dont nous avons fait cas dans nos propos introductifs, va s'appliquer à toutes les phases de la passation des marchés, en influant tant sur les procédures de passation que sur les mécanismes de contrôle qui les régissent.

Ainsi, ce double mouvement d'influences, qu'il reste d'ailleurs à détailler, montre bien un constant développement de la notion de transparence dans les marchés publics. Fort de cette certitude, nous partirons de la garantie d'une transparence dans les procédures de passation des marchés (chapitre 1), pour aboutir à la garantie d'une transparence dans les mécanismes de contrôle (chapitre2).

41 Cf. CH. BRÉCHON-MOULÈNES, « Transparence et marchés publics », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° spécial sur la transparence, pp. 45-62 qui estime, et l'on ne saurait la contester, que « la relation contractuelle est par nature réfractaire à la transparence » ; ce qui justifie que ce soit en cette matière que l'on ait le plus ressenti la volonté de développer la transparence. Le droit privé constate aussi ce « principe de secret » dans les contrats comme en témoigne J. MESTRE, « Transparence et droit des contrats », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° s pécial sur la transparence, pp. 77-88.

Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 12

La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

CHAPITRE I : GARANTIE D'UNE TRANSPARENCE DANS LES PROCEDURES DE PASSATION

La mise en oeuvre de l'intégrité dans la passation s'inscrit dans une logique interprétative des implications majeures de la transparence dans chacune des phases de passation des marchés publics. Pour ce faire, que ce soit au Sénégal ou au Togo les résolutions prises depuis la déclaration de Paris en passant par les directives de l'UEMOA de 2005 garantissent une transparence affirmée par les textes, puis unanimement acceptée.

A cet effet, il nous importe de voir comment cette transparence se manifeste dans les procédures normales (Section 1) et ensuite comment elle peut être appréhendée à travers les procédures particulières (Section 2).

Section 1 : Une transparence quant aux procédures normales

Les procédures normales de passation sont celles qui admettent les procédés ordinaires de mise en concurrence dans l'attribution d'un marché. La transparence de ces procédures suppose avant tout une intégrité partant de la phase préalable d'appel d'offres (Paragraphe 1), jusqu'aux méthodes proprement dites de mise en concurrence (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'intégrité dans la phase préalable d'appel d'offres

La phase préalable d'appel d'offres est celle qui vient en prélude à toute soumission. La transparence s'y applique à travers d'une part l'élaboration du plan de passation des marchés (A) et celle de l'avis général de passation des marchés (B).

A- Une transparence relative au plan de passation des marchés

Une série de mesures conditionnent l'effectivité de la transparence dans la phase préalable à l'appel d'offres. La détermination des besoins par l'autorité contractante préalablement à tout lancement de la procédure de passation d'un marché constitue l'un des principes rappelés par les

Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 13

La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

codes sénégalais et togolais des marchés publics42.

En effet, avant tout appel à la candidature, consultation ou négociation, la personne responsable des marchés (PRMP) est tenue de déterminer la nature et l'étendue des besoins à satisfaire, de sorte que des prestations qui feront objet de marchés, contribuent à répondre exclusivement à ces besoins déjà identifiés et consignés dans un document dénommé le plan de passation des marchés (PPM)43.

Par PPM, on entend un outil de programmation et de planification des marchés à engager au cours de l'année. Dans ce contexte, toutes les autorités contractantes ont le devoir en début d'année, de recenser tous les besoins des marchés et de les inscrire dans un document. La détermination aussi précise que possible des besoins par l'autorité contractante, annuellement dans un plan de passation des marchés et préalablement à tout lancement de la procédure de passation d'un marché, constitue l'un des fondements de la commande publique, rappelé à l'article 24 du Code des Obligations de l'Administration (COA)44. Lesdites prestations peuvent être définies par rapport aux normes nationales ou internationales applicables, qui doivent être expressément mentionnées dans le Cahier des Prescriptions Spéciales (CPS)45.

En résumé, l'obligation faite aux autorités contractantes de déterminer leurs besoins, a le mérite d'assurer l'efficacité de la procédure de passation et ainsi éviter que des offres ou propositions assorties de réserves, soient remises par les candidats aux marchés.

Une fois les besoins de l'autorité contractante déterminés, celle-ci doit procéder à leur spécification. A cet effet, elle fait une description claire des fournitures, services, travaux ou prestations intellectuelles afin de permettre aux candidats de répondre de façon réaliste et

42 Cf. respectivement les articles 5 al.1 et 6 des CMP du Sénégal et du Togo relatifs à la détermination des besoins à satisfaire.

43 Le plan de passation des marchés concerne tous les types de marchés, suivant un modèle type fixé par l'ARMP.

44 Article 24, COA « En vue d'assurer l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics, la conclusion des contrats d'achat passés à titre onéreux par les acheteurs publics exige une définition préalable de leurs besoins par ces acheteurs».

45 « Le CPS, préparé par l'autorité contractante, constitue le document destiné à compléter les dispositions du Cahier des Clauses Administratives Générales (CCAG) et du Cahier des Clauses techniques Générales (CCTG) afin de préciser les obligations contractuelles, et les clauses techniques reflétant les circonstances particulières de l'appel d'offres concerné », Manuel de procédure du code des marchés public du Sénégal, page 33.

La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

compétitive. Rappelons par ailleurs que pour les marchés de fournitures, travaux et services courants, on parle de spécifications techniques mais pour les marchés de prestations intellectuelles, la spécification des besoins est effectuée dans les Termes de Référence (TDR).

En outre une étape délicate dans les procédures préalables à la soumission réside dans l'évaluation du montant des besoins. Dans ce contexte, l'estimation du montant des besoins en toute transparence est nécessaire non seulement pour le calcul des crédits requis, mais aussi pour éviter les fraudes et déterminer si les seuils d'application des procédures formalisées de passation d'approbation ou de contrôle des marchés sont atteints.

Une fois ces seuils atteints, l'autorité contractante procède au choix de la procédure de passation. La question la plus élémentaire qui se pose ici est de savoir s'il convient de recourir à une mise en concurrence ou d'attribuer un contrat sur une base non concurrentielle. Dans le premier cas, l'autorité contractante est tenue de respecter les procédés compétitifs et ce pour les marchés fractionnés lorsque le seuil est atteint. Mais lorsque le montant des marchés est inférieur au seuil règlementaire, il est simplement attribué sur une base non concurrentielle.

Par exemple dans le secteur public sénégalais, les marchés dont les montants estimés atteignent 70.000.000 Francs CFA pour les travaux, 50.000.000 Francs CFA pour les services courants et fournitures, 50.000.000 Francs CFA pour les prestations intellectuelles doivent être passés par la procédure dite d'appel d'offres ouvert qui fera objet de développement dans les prochaines parties. Quant au Togo, le seuil de passation est de 25.000.000 pour les travaux, 50.000.000 pour les fournitures et services et 25.000.000 pour les PI.

Toutefois le fractionnement des marchés par une autorité contractante, dans le but de le soustraire aux obligations de concurrence est contraire au principe de transparence et par est par ricochet interdit à la fois en droit positif sénégalais et togolais.

Le deuxième volet de la transparence que nous allons analyser ne se rapporte plus ni à l'identification des besoins, ni à leur spécification ou même à leur évaluation ou au choix de la

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Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les procédures de passation 15

La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

procédure, mais bien à la publication46 du document qui renferme tous ces procédés c'est-à-dire le plan de passation des marchés. Rappelons que la publication de ce document vise avant tout à garantir l'accès des marchés au plus grand nombre de candidats au regard de principes de liberté d'accès et d'égalité de traitement des candidats.

Sous cet angle, la publicité dans la passation s'identifie à un « système d'informations performant permettant la publication régulière et en temps opportun de toute l'information sur les marchés publics »47. Le plan de passation des marchés est élaboré par la cellule de passation des marchés de l'autorité contractante, et est ensuite transmis à la Direction Centrale des Marchés Publics (DCMP) au plus tard le 1er décembre de l'année précédent l'année budgétaire considérée. La DCMP vérifie la conformité du document et en assure la publication dans les trois jours suivant la réception.

L'autorité contractuelle dispose d'un délai de sept jours pour tenir compte des observations faites par la DCMP. Après ce délai, la DCMP publie le plan de passation des marchés en faisant au préalable un rapport détaillé à l'Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP). Une fois la publication faite sur le portail des marchés publics et au moins dans un quotidien officiel, les potentiels candidats ont désormais la possibilité de connaitre tous les projets de marchés inscrits au titre de l'année concernée.

Au Togo, cette exigence est prévue par l'article 14 du décret n° 2009-277 portant code des marchés publics48. Tout comme au Sénégal, c'est à partir du « Plan Prévisionnel de Passation des Marchés » (PPPM)49 que l'autorité contractante extrait les marchés dont elle est sûre de l'exécution. Par ricochet, et ce à l'exception des marchés passés par entente directe, les autres marchés passés par les autorités contractantes et qui n'ont pas été au préalable inscrits dans le

46 F. LLORENS, « principe de transparence et contrats publics », Contrats et marchés publics, janvier 2004, pp. 4-12 « la transparence est à la base de la réglementation la plus ancienne en ce domaine (celle des marchés publics) sous la forme notamment d'une obligation de publicité minutieusement organisée ».

47 Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés publics, P. 2

48 Les marchés à passer par les autorités contractantes doivent avoir été préalablement inscrits dans les plans prévisionnels initiaux ou révisés qu'elles ont élaborés à peine de nullité, sous réserve de l'appréciation de la DNCMP.

49 Dénomination du code togolais des marchés publics de 2009.

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La transparence dans les marchés publics au Sénégal et au Togo

PPM sont en principe nuls. Il ne serait pas superflu cependant de préciser que le PPM est révisable.

En définitive, c'est le PPM qui sur fond de transparence, donne un aperçu des marchés susceptibles d'être conclus. Une fois répertoriés, ces marchés seront consignés dans un autre document et qui fera l'objet de la prochaine sous-partie de notre analyse.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote