B. Gérer sa relation aux autres
Nous détenons à présent les bases pour
comprendre les autres, indispensables pour gérer et améliorer
cette relation à autrui. Pour arriver à cela, il nous est aussi
nécessaire de savoir comment nous communiquons, comment fonctionnent les
relations hiérarchiques et la façon dont nous pouvons
gérer nos carences respectives.
1) Notre communication
De prime abord, nous avons tendance à dire, ce qui
n'est pas faux, dans l'absolu, qu'il faut un émetteur et un
récepteur, puis un message transmis entre eux par des canaux. Cette
vision des choses, très archaïque, est tout à fait valable,
mais trop simpliste à notre niveau. Pour corser un peu plus les choses,
disons plutôt, selon l'Analyse Transactionnelle, que lorsque deux
personnes se rencontrent elles échangent un message grâce à
des transactions. Cet échange entre les Etats du Moi de deux personnes
peut être verbal comme non-verbal. Nous faisons ainsi à nouveau
appel à l'AT.
55 Evelyne Dentz, Equi-management, Pour une
nouvelle écologie du management, p.90, Les Presses du Management,
1995
56 Evelyne Dentz, Equi-management, Pour une
nouvelle écologie du management, p.90 - 91, Les Presses du
Management, 1995
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Nous verrons qu'en fonction de la transaction que nous
émettons, nous invitons et conditionnons l'autre à y
répondre d'une certaine façon.
Reprenons les exemples donnés par René de Lassus
dans son livre L'Analyse Transactionnelle57.
« Quelle heure est-il ? » - « Quinze heure dix.
» : voici un exemple de transaction entre deux Etats du Moi Adulte de deux
personnes.
« Quels incapables ces politiciens ! » - « Ouais !
Vous avez vu comment ils ont réglé le problème des...
» : voici un exemple de transaction entre deux Etats du Moi Parent
Normatif dans leur fonction Critique de deux personnes. « J'ai envie
d'aller me promener. » - « Moi aussi, allons-y. » : voici un
exemple de transaction entre les Etats du Moi Enfant de deux personnes.
« Viens ici ! » - « Oui j'arrive. » :
voici un exemple de transaction entre un Etat du Moi Adulte et un Etat du Moi
Enfant.
« Tu as mal fait ce travail » - « Tu aurais pu
m'aider » : voici un exemple de transaction entre un Etat du Moi Parent et
un Etat du Moi Enfant.
Ces cinq transactions sont des transactions parallèles,
pour les quatre premières et croisée pour la dernière. Ce
type d'échange est direct, clair et sans ambigüité.
Des situations peuvent se présenter durant lesquelles
les transactions deviennent floues et ambiguës ; il s'agit alors de
transaction à double fond. Ces échanges ont souvent un sens
caché, subliminal. Il y a donc un décalage entre ce qui est dit
et ce qui est pensé. Nous distinguons ainsi deux niveaux : le niveau
social (ce qui est dit) et le niveau psychologique (ce qui est pensé,
sous-entendu). Ce type de comportement est très fréquent entre
les individus. L'AT nomme cela les « jeux psychologiques », dont
voici deux exemples empruntés à René de Lassus, de son
livre précité.
Niveau social (ce qu'il se dit)
1ère personne : « Je crains que ce ne soit trop cher
pour vous.
Ou « Voulez-vous voir ma collection de disques ? »
Réponse de la 2ème personne : « Je
vais tout de même le prendre ! »
Ou « Avec plaisir, j'adore la musique ! »
Niveau psychologique (ce qui est sous-entendu)
1ère personne : « T'as l'air bien trop fauché
pour te payer ça ! »
Ou « Viens flirter chez moi ! »
Réponse de la 2ème personne : «
Qu'est-ce qu'il se croit celui-là ! »
Ou « D'accord. Moi aussi j'en ai envie. »
Deux règles se déduisent donc de tous ces
exemples. Les transactions parallèles, c'est-à-dire entre deux
Etats du Moi identiques de deux personnes différentes, peuvent durer
indéfiniment. Et les transactions croisées, c'est-à-dire
entre deux Etats du moi différents de deux individus différents
débouchent sur une rupture.
57René de Lassus, L'Analyse
Transactionnelle, p. 71 à 75, Marabout, 1991
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Notons simplement que ces transactions peuvent se partager en
transactions positives et négatives. Celles-ci se subdivisent encore en
sept autres transactions classées parmi les plus fréquentes,
quatre transactions positives et trois négatives, sur la base de
transactions ok - ok c'est-à-dire je suis ok - tu es ok, et de
transactions ok - non ok c'est-à-dire je suis ok et tu n'es pas ok. Nous
n'aborderons pas cela dans cette thèse, car les éléments
ci-dessus me paraissent suffisants pour partager mes idées et mes points
de vue.
Dirigeants, managers, collaborateurs, personnel de
l'organisation, sont ainsi quotidiennement confrontés à ces types
de transactions. Il est nécessaire pour chacun d'analyser rapidement ces
transactions, et peu importe le message de l'échange, conserver un
comportement assertif afin de ne pas envenimer la situation. Ce comportement
assertif peut se traduire par l'utilisation de son Moi Adulte pour poursuivre
l'échange, notamment dans le cas où l'individu se sentirait
agressé, lésé, insulté ou rabaissé. Cette
attitude assertive permettra de ne pas trop endommager les relations
interpersonnelles, quelle que soit la relation hiérarchique entre les
individus.
2) Les relations hiérarchiques : le manager face
à son N+1
Nous nous intéresserons ici aux relations
hiérarchiques entre le manager et sa hiérarchie,
c'est-à-dire avec l'équipe de Direction. Ces relations
impliquent, comme dans tout type d'échange, qu'à un moment
donné une des parties, voir les deux, se trouvent face à des
difficultés spécifiques à leur position.
Il est de rigueur de dire qu'un manager doit assumer
« Ses responsabilités aux quatre points cardinaux
: le management au sud c'est-à-dire la gestion de la relation avec ses
collaborateurs et son équipe, mais également aux trois autres
points cardinaux. Au nord, dans la relation avec sa hiérarchie, à
l'est et à l'ouest, dans ses relations transversales, en particulier
dans un rôle de manager hors hiérarchie et non plus en tant que
responsable hiérarchique. »58
Nous ne nous intéresserons ici qu'au management du
nord, nous aborderons le sujet de la relation du manager / dirigeant avec ses
collaborateurs au prochain point. Le management de l'est et de l'ouest ne
rentrent pas ici dans notre sous-partie, car il s'agit de management
transversal, sans lien hiérarchique apparent. Un tableau
récapitulatif sera visible à la fin de cette sous-partie, afin de
distinguer les différences entre ces différents managements de
points cardinaux et responsabilités inhérentes.
Le manager et sa hiérarchie, l'équipe de
Direction, doivent se trouver dans une relation claire, une relation
d'échanges. Cette situation suppose donc que le manager sois à
même de gérer sa relation vis-à-vis de l'équipe de
Direction, en sachant se positionner face à son N+1 et en étant
capable de développer sa maturité relationnelle. Se positionner
face à son N+1 signifie avoir conscience de son degré de
maturité relationnelle.
58 Anne Launay & Jean-Pierre Testa
L'intelligence managériale, p.169, ESF Editeur, 2011
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Stephen R. Covey, a employé quatre intentions dans la
relation59 pour illustrer les différents niveaux de
maturité relationnelle, que nous allons énumérer :
· Perdant - gagnant : dans cette situation le manager va
porter plus son attention sur les besoins et les intérêts de sa
hiérarchie que sur les siens
· Gagnant - perdant : dans cette situation c'est le
contraire, le manager va s'intéresser d'abord à ses besoins et
à ses intérêts, laissant ceux de sa hiérarchie
quelque peu de côté
· Gagnant : le manager ne tiendra compte que de ses
intérêts et de ses besoins, sans s'attarder sur ceux de ses
supérieurs
· Gagnant - gagnant : les intérêts et les
besoins de chacune des deux parties seront pris en considération par le
manager
Dans la situation perdant - gagnant, le manager est soumis
à une forme de dépendance, dans le sens où il attend un
signe de sa hiérarchie avant d'agir. Le manager est ici incapable de
prendre des initiatives. Seule une forte stimulation le fera agir.
Dans le cas gagnant - perdant, le manager est
contre-dépendant. Dans cette situation de malaise, le manager tient une
position constamment opposée à sa hiérarchie, lui
reprochant aucun soutien, aucune clarté d'organisation, mais de son
côté il n'est pas non plus force de proposition.
Dans le paradigme gagnant, le manager est indépendant.
Cela se traduit par une attitude limite désinvolte, dans le sens
où il agit comme s'il était seul à prendre les
décisions, comme s'il était patron de son entreprise. Il ne tient
aucunement compte des directives, attentes, besoins et intérêts de
sa hiérarchie.
Une situation gagnant - gagnant suppose une participation
active du manager. Il est interdépendant. Il prend des initiatives,
émet des propositions et analyse son environnement avant de
décider et d'agir.
Il ne va pas sans dire que la situation de maturité
relationnelle est celle d'interdépendance. Développer sa
maturité relationnelle permettra au manager d'entretenir de meilleures
relations avec ses supérieurs hiérarchiques et de mieux la
gérer sur le long terme. Le manager, pour sortir de ces situations
inconfortables, doit s'habituer à penser « NOUS », et pour ce
faire il est nécessaire de trouver un juste milieu entre le « JE
» et le « VOUS », respectivement il faut que le « JE »
s'adapte pour entrer dans une relation de co-construction, et que le «
VOUS » se transforme en prises d'initiatives de la part du manager. La
situation de contre-dépendance peut s'améliorer si le manager
accepte de tenir compte et ainsi de comprendre l'objectif de sa Direction et
s'implique dans l'organisation.
Pour qu'une relation durable s'instaure entre le manager et
ses supérieurs hiérarchiques, il est indispensable que les
besoins soient clarifiés dès le début de la relation, pour
éviter des problèmes relationnels pouvant provenir d'une mauvaise
adéquation entre le degré d'autonomie professionnelle du manager
et le style de management employé par sa hiérarchie. Deux besoins
sont fréquents notamment lorsque l'on entame une nouvelle
carrière dans une nouvelle entreprise. Le manager a certes son bagage
professionnel derrière lui, a certes de nombreuses années
d'expérience et le savoir, savoir-faire, savoir-
59 Stephen R. Covey, Les 7 habitudes des gens qui
réalisent tout ce qu'ils entreprennent, Editeur First, 2005
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être et savoir-évoluer nécessaires pour
occuper les fonctions de ce poste, mais il faut être conscient, qu'en
étant nouveau dans une entreprise, même un manager
expérimenté est un manager débutant. Je souhaite
préciser que le terme de « débutant » n'est nullement
utilisé de façon péjorative. Il symbolise simplement le
niveau du manager dans CETTE entreprise le jour de la prise de ses fonctions.
Cette situation faire généralement naître deux types de
besoins : le besoin d'être managé, aussi étonnant que cela
puisse paraitre, et le besoin d'être aidé.
Chaque individu est différent lorsqu'il change de
milieu, lorsqu'il découvre un nouvel environnement, ainsi sa
capacité d'adaptation sera plus ou moins rapide, de même que sa
capacité à maitriser les nouveaux aspects qui l'entourent, ce qui
aura un impact sur son autonomie sur une mission ou dans la prise de
décisions. Il attendra donc de la part de sa hiérarchie un style
de management en accord avec sa situation et il sera amené à
demander de l'aide ou des conseils à ses supérieurs dans sa
recherche de solutions face à une situation soulevant un
problème.
Ces premières étapes sont primordiales pour
pouvoir espérer une relation saine sur le long terme, mais pour
contribuer à cette réussite, le manager doit être capable
de gérer efficacement les relations avec son N+1. Il est donc
nécessaire que le manager fasse état à son
supérieur s'il y a un problème, une incompréhension, une
inadéquation entre la façon dont il est managé et son
autonomie professionnelle, etc.
Pour que cette relation nouvellement née perdure, trois
éléments sont à garder à l'esprit. Il est important
d'apporter un feed-back à son supérieur hiérarchique. Le
feed-back permet d'énoncer des éléments négatifs,
comme des besoins non satisfaits, par exemple. Une méthode simple est la
méthode DESC60. Il s'agit de Décrire la situation,
d'Exprimer le problème inhérent à cette situation, de
Solutionner, c'est-à-dire que le manager proposera des solutions
à son supérieur, et enfin d'expliquer à son N+1 les
Conséquences apportées par les solutions fraichement
proposées. Le second élément dont il faut faire usage, est
la définition de la relation entre les deux parties, en termes
d'autonomie souhaitée, de communication, de reporting, etc. Le
troisième et dernier élément, non pas des moindres,
concerne l'adaptation du manager au style de management de son supérieur
hiérarchique.
Nous venons de découvrir les aspects inhérents
aux relations entre le manager et son supérieur hiérarchique,
dans le cadre d'un management hiérarchique. Les autres types de
management, de projet et transversal, ne nous intéressent pas dans cette
thèse, mais voici simplement un tableau61, comme outil de
comparaison, résumant les spécificités de chaque mode de
management, afin d'en repérer les différences majeures.
60 Anne Launay & Jean-Pierre Testa
L'intelligence managériale, p.177, ESF Editeur, 2011
61 Anne Launay & Jean-Pierre Testa
L'intelligence managériale, p.169, ESF Editeur, 2011
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