DEUXIEME CHAPITRE : ETAT DE LIEU DE L'INIQUITE
ENTRE LES SEXE DANS L'EDUCATION EN RDC
INTRODUCTION DU DEUXIEME CHAPITRE
Comme mentionné dans l'introduction, nous rappelons que
la stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP visait
l'atteinte d'un triple objectif : accroitre l'accès à
l'éducation, accroitre l'équité et la rétention, et
améliorer la qualité de l'éducation.
A travers le parcours documentaire, nous avons constaté
que, de ces trois
objectifs, les efforts entrepris par le gouvernement congolais
et ses partenaires ont permis d'accroitre l'accès à
l'éducation et que l'équité et la qualité de
l'éducation restaient en souffrance durant le parcours scolaire. Raison
pour laquelle nous avons focalisé notre travail sur le deuxième
objectif, celui de l'équité.
Ainsi, le présent chapitre va retracer l'ampleur des
iniquités constatées durant le parcours scolaire et relever
quelques causes et/ou facteurs qui favorisent leur persistance.
A cet effet, nous avons défini trois critères
à travers lesquels nous avons évalué l'ampleur des
iniquités dans le secteur particulier de l'éducation: la
rétention, le leadership féminin ainsi que les
stéréotypes et clichés sexistes.
- La rétention à
l'école. Pour ce premier critère, nous partons de
l'idée que l'égalité dans l'éducation ne se limite
pas à l'égalité d'accès, mais qu'elle doit aussi
viser l'achèvement, gage d'une autonomisation effective. Nous allons
ainsi évaluer ce critère à travers l'analyse du taux
d'achèvement et du taux des abandons scolaires.
- Le leadership féminin dans les structures
éducatives congolaises. Cet indicateur cherche à
analyser l'existence du modèle féminin dans ces structures. Un
modèle ou une référence peut constituer un
élément de motivation aux études mais aussi, en
participant dans la gestion des structures éducatives, les filles
développent des capacités managériales qui pourraient leur
être utile dans la vie active. C'est pourquoi à ce niveau nous
allons analyser la place que la femme occupe dans le comité des
élèves, le pourcentage des femmes dans le corps enseignant, le
pourcentage des femmes responsables des établissements scolaires et
l'effectif des femmes impliquées dans l'inspection du système
éducatif.
Par ailleurs, si la RDC a atteint des résultats
satisfaisants de scolarisation dans l'enseignement primaire, il n'en a pas
été le cas pour l'enseignement
35
- Présence des stéréotypes et
clichés sexistes. De l'étude de STEELE (1997), nous
avons retenu que les stéréotypes peuvent conduire les personnes
qui les subissent à une démotivation ou au développement
de moins d'efforts dans le processus d'apprentissage. Ainsi allons-nous,
à ce niveau, analyser les rôles attribués aux femmes dans
les manuels scolaires ainsi que la nature des relations existantes entre les
personnages femmes et les personnages hommes.
2.1 Examen de l'iniquité entre les sexes dans
l'éducation en ROC
2.1.1. Inégalités dans la rétention
à l'école
? Analyse du taux d'achèvement
Graphique 1 : Le taux d'achèvement de l'école
primaire
120
100
|
100
|
Comparaison
|
du
taux 100
|
|
89,86
|
d'achevement
|
100
|
du
78,38
|
primaire
84,53
|
|
(en
100
|
%)
81,02
|
91,12
|
|
|
|
|
|
|
|
80
|
|
69,7
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
60
|
|
51
|
|
|
|
53,81
|
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|
|
|
|
|
|
|
|
40
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
20
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
0
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
RDC Afrique Sub Pays fragiles Monde
|
Cible 1990 2013
Source : RDC, Rapport OMD 2000-2015: Evaluation des
progrès accomplis par RDC dans la réalisation des Objectifs du
millénaire pour le Développement; septembre 2015, page
37.
De ce graphique il y a lieu de constater que, comparativement
à la moyenne des pays de l'Afrique Subsaharienne et même des pays
fragiles, le taux d'achèvement du cycle primaire est resté bas en
fin 2013, le pays est donc loin d'atteindre la cible de 100% tel que voulu par
le plan d'action de Dakar.
Cette situation soulève la problématique de la
qualité de l'enseignement en République Démocratique du
Congo, et surtout sa capacité dans la rétention des enfants
à l'école.
36
secondaire où les résultats restent mitigés
et l'écart entre garçons et filles demeure déplorable.
Graphique 2: Taux de scolarisation et d'achèvement entre
filles et garçons au primaire et au secondaire.
Taux brut de scolarisation (en %) /
2009
97,5
Primaire Secondaire
83
Garçons Filles
51,2
28,8
Taux d'achevement (en %)/ 2009
55,9
Primaire Secondaire
34
Garçons Filles
36,2
13,4
Source : Annuaire statistique de l'EPSP
2008-200910.
En 2009, l'écart du taux brut de scolarisation entre
les filles et les garçons était élevé dans
l'enseignement primaire et très prononcé dans le secondaire. En
ce qui concerne le taux d'achèvement, le constat est plutôt
inquiétant. 34 % des filles avait achevé l'enseignement primaire
contre seulement 13% au secondaire.
Cette situation peut mieux être observée dans le
graphique suivant: Graphique 3 : Disparité entre garçons et
filles selon le cycle de l'enseignement
Superieur
secondaire
Primaire
|
|
Filles Garçons
|
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110
Source : Données tirées du rapport OMD 2000-2015
Au regard de ce graphique, l'on s'aperçoit qu'au fur et
à mesure que le degré de l'éducation augmente, le nombre
de fille diminue. Si pour 100 garçons on
10 Nous utilisons les données des annuaires
statistiques 2008-2009 car la stratégie étudiée a
été élaborée sur cette base.
37
compte environs 95 filles, la différence devient
d'environs 20 au secondaire et de 50 au supérieur.
? Analyse des abandons scolaires
L'abandon scolaire constitue un deuxième facteur majeur
influençant la rétention des enfants à l'école. En
effet, d'après l'enquête nationale menée en 2013 sur les
enfants et adolescents en dehors de l'école, les filles courent les
risques les plus élevés d'abandon que les garçons. Car, 6
ans après l'entrée à l'école, 16,6 % des filles et
12,1% des garçons abandonnent leurs études11. En plus,
les enfants des milieux ruraux sont très exposés au risque
d'abandon, et les taux après 12 ans d'entrée à
l'école représentent 45,6% pour les enfants des milieux ruraux
contre 27,4% pour ceux des centres urbains.
Dans la prochaine section, nous allons démontrer que
les causes des abandons ne sont pas identiques aux centres urbains qu'en
milieux ruraux.
Les grossesses constituent l'une des principales causes de la
désertion. Pour s'en rendre compte, notre enquête menée
dans les écoles primaires et secondaires sur les causes d'abandon
scolaire lié aux grossesses a révélé la situation
suivante:
Tableau 2 : Taux d'abadons scolaires liés aux grossesses
(Année scolaire 2014-2015)
|
Ecoles Primaires
|
Ecoles Secondaires
|
Total Général
|
F
|
G
|
T
|
F
|
G
|
T
|
F
|
G
|
T
|
Nombre total
d'abandons
|
742
|
530
|
1272
|
357
|
469
|
826
|
1099
|
999
|
2100
|
Nombre d'abandons
lies aux grossesses
|
160
|
0
|
160
|
144
|
10
|
154
|
3014
|
10
|
314
|
Taux d'abandons liés aux grossesses
|
22%
|
0%
|
13%
|
40%
|
2%
|
19%
|
27%
|
0,1 %
|
15%
|
Source : Nos enquêtes menées dans 30 écoles
lors du stage.
Ce tableau fait ressort deux situations :
D'abord, nous nous rendons compte qu'en termes d'effectif, les
garçons abandonnent leurs études tout autant que filles, quoi que
le nombre de celle-ci restent élevé. Cependant, les causes de
l'abandon diffèrent d'un sexe à l'autre. C'est pourquoi, une
démarche genrée voudra que les causes des abondons pour les
11 RDC, Rapport de l'enquête nationale sur les
enfants en dehors de l'école, 2013.
38
filles et garçons soient analysées distinctement
et que des actions de réponses soient spécifiques à chaque
cause/sexe.
Ensuite, l'on se rend compte que pour les filles, le taux
d'abandon scolaire au secondaire environne la moitié. Car en fait, 4
filles sur 10 abandonnent leurs études pour être rendues
grosses12. Au niveau du primaire, le taux semble être
réduit (22% au primaire contre 40 % au secondaire). Cependant, en
considérant l'âge des filles qui sont inscrites à ce niveau
d'étude (principalement moins de 15 ans), l'on se rend bien compte du
danger que cette société encours du point de vue de la protection
de l'enfant. En poussant des analyses au-delà du sujet du présent
travail, nous pensons que cette situation est un des facteurs qui augmente la
prévalence des viols en RDC13. Donc, les viols largement
rapportés ne seraient pas liés aux conflits armés mais
aussi aux pratiques sociales.
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