b. Un problème quantitatif ou qualitatif ?
»48.
Éric Charmes s'interroge sur les chiffres de
l'artificialisation, cette dernière étant selon lui un
problème davantage qualitatif que quantitatif47.
Agreste, la revue publiée par le ministère de
l'Agriculture, souligne en 2010, que le laps de temps dans lequel
l'équivalent d'un département était artificialisé
avait été réduit, passant de 10 à 7 ans. Toutefois,
d'après l'auteur, la définition de l'artificialisation ici
retenue est celle de la TERUTI-Lucas, et cette dernière est relativement
extensive : « sont retenus les routes, chemins et bâtiments de
toute nature, mais aussi les espaces non bâtis considérés
comme urbains (espaces verts, pelouses, équipements sportifs, terrains
vaques etc)
Les milieux agricoles restent toutefois les premiers
touchés par les impacts de l'urbanisation, mais « ces impacts
sont moins dus à la quantité des sols artificialisés
qu'aux modalités de l'artificialisation »49. La
focalisation sur les aspects quantitatifs, développés par la
cartographie, mettrait un voile sur ce qui pose véritablement
problème, à savoir « la forme prise pas les extensions
urbaines et périurbaines et la manière dont elles
s'organisent. »50
En effet, les métropoles ne s'étendent plus
guère par étalement continu de leurs espaces bâtis, mais
par émiettement. Le périurbain est émietté, et
l'impact de cette caractéristique soulève beaucoup plus de
problèmes que la quantité des terres artificialisées. Si
l'urbanisation se faisait exclusivement par étalement continu, en
continuité des limites des métropoles françaises, ces
impacts seraient bien moindres qu'avec les formes actuelles de la
périurbanisation car l'émiettement démultiplie les
surfaces de contact entre l'agriculture et les territoires urbanisés.
Ainsi, l'urbanisation massive du rural augmente les occasions de conflits entre
les activités agricoles et les activités urbaines.
Concernant la biodiversité également,
l'émiettement à un impact très fort. Cette forme
d'artificialisation empêche certaines espèces d'évoluer sur
de grands périmètres, et ces
47 Eric Charmes, « L'artificialisation est-elle
vraiment un problème quantitatif ? », Etudes
foncières, ADEF, 2013
48 Ibid.
49 Ibid.
50 Ibid.
26
dernières se heurtent aux coupures introduites
notamment par les infrastructures routières. De plus, avec
l'intensification des flux circulatoires sur les étendues de plus en
plus vastes des aires urbaines, ces coupures se renforcent. Éric Charmes
annonce les moyens mis en oeuvre pour lutter contre cette fragmentation :
« de là découle notamment l'insistance actuelle des
textes de loi sur les corridors et les trames vertes et
bleues.»51
Ainsi, l'apparition de l'artificialisation à travers
les cartes ne permet pas de rendre compte de la complexité du
phénomène en raison de l'imprécision de la cartographie.
Cette imprécision est d'autant plus préjudiciable que
l'artificialisation ne peut pas être mesurée seulement à
partir de chiffres car elle est qualitative autant, voire plus, que
quantitative.
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